Sacré Gaspard Noé qui même avec un film d'apparence plus banale (Béatrice Dalle doit tourner une scène avec Charlotte Gainsbourg pour son premier long-métrage) parvient à faire ressentir au spectateur un véritable malaise. L'intro très calme et posée qui voit les 2 actrices échanger sur leurs anecdotes de vie est rapidement perturbée par l'irruption de 2 forceurs apprentis-réalisateurs, début d'une succession d'emmerdements et de la montée en puissance d'une cacophonie désordonnée qui échappe à tout contrôle.
Lux Aeterna est abordé avec légèrement plus d'humour qu'à l'accoutumée chez Noé mais on se sent toutefois mal pour Béatrice Dalle qui se retrouve malmenée de toutes parts, poussée à la faute, en proie aux dénigrements et à la conspiration quasi-publique de son producteur à son encontre. S'il rend un bel hommage aux coulisses parfois bordéliques du cinéma, le film traite assez nettement des violences faites aux femmes, que ce soit Dalle rendue impuissante à subir les décisions de la ligue patriarcale des vieux de la vieille, ou plus explicitement encore, Gainsbourg dont la souffrance émotionnelle authentique est filmée avec jouissance par le chef opérateur qui fait semblant de n'y voir qu'une performance artistique consentie.
La réalisation demeure à la hauteur des tics de Noé : c'est bien filmé, le choix des cadres aux angles arrondis est très agréable à l’œil (une douceur qui contraste avec le contenu du film), le générique est illisible et les citations constituent le squelette de la narration. Content de revoir Abbey Lee Kershaw à l'écran (Mad Max Fury Road, The Neon Demon). Et 50 minutes est la durée parfaite pour ce moyen-long car s'il avait fallu atteindre les 90 minutes réglementaires, connaissant Noé, on aurait eu droit à 3/4 d'heure de stroboscopes multicolores dans la tronche (là, les 5/10 min sont largement suffisants à achever tout photosensible). Dernière chose : j'adore l'affiche.