The Dark Knight - Christopher Nolan (2008)

[MadXav]

Dans le Mad Movie de cet été, ils ont l'air de dire (non, en fait ils le disent clairement) que Nolan voulait une version de 3h pour son film et que Warner voulait une version allégée de "seulement" 2h30 pour la sortie en salles. Si ceci est vrai, on ne peut que constater que Nolan n'a pas eu le dernier mot...

[Manolito]

A noter que la version Imax contient un prologue exclusif tourné en Imax (comme plusie'urs autres scènes du film d'ailleurs (qui est aussi dispo sur le bluray de "Batman Begins"). Je crois que le seul cinéma qui le passera en imax (avec certaines séances en vostf) sera le Gaumont de Marne la Vallée, à côté d'eurodisney...

[Fatalis rex]

(Petits) SPOILERS


Vu à l'instant, et le film est clairement meilleur que BATMAN BEGINS. Pour faire rapide :

LES - :

- On retrouve toujours ces problèmes de montage dans des scènes d'action illisibles (la poursuite avec le camion est incompréhensible) ou dans des transitions malheureuses entre les scènes, quand le film saute brusquement du coq à l'âne (quand on retrouve Dent et Rachel dans le restaurant, par exemple). Nolan devrait sérieusement penser à changer de monteur.

- Le film est long. Très long. Une bonne demi-heure de trop, avec une pseudo-scène de suspens (les bateaux) franchement dispensable.

- On a lynché Katie Holmes, alors qu'elle avait franchement plus de charisme que l'actrice qui la remplace.

- J'ai toujours du mal avec le jeu de Christian Bale.

- Toujours à cause de cette volonté de réalisme, les particularités physiques du Joker ne sont plus dûes à un accident. C'est juste un type maquillé, seul son sourire cicatrisé est irréversible. En plus, on ne sait strictement rien de son passé, si ce n'est une brève allusion à sa femme (mensonge ou réalité ?), en clin d'oeil au KILLING JOKE d'Alan Moore. D'ailleurs, le scénariste paraît fier de ne pas avoir créé un passé au personnage (la scène de la prison, où Gordon annonce qu'on ne sait rien sur lui...).

- Les gadgets hi-tech, toujours aussi HS dans une histoire qui devrait être celle d'un détective vigilante...

- Pas de manoir Wayne, pas de batcave... (mais un container sur un dock ). Le mythe en prend un coup.

Bon, j'ai volontairement commencé par le négatif, parce que le film recèle de moments vraiment jouissifs.


LES + :

- D'abord, le Joker. C'est bien simple : ça n'est pas un film sur Batman, relativement effacé avec le fadasse Bale, mais un film sur le Joker. Ledger bouffe l'écran. Psychotique, imprévisible, chacune de ses apparitions fait basculer le film dans une folie totale, qui atteint son comble avec la scène de l'hôpital (qui a fait rire tout le monde dans la salle). Et encore, j'ai vu le film en VF. Je ne sais pas si c'est possible, mais Ledger mériterait un Oscar posthume pour sa performance totalement borderline (qui lui a coûté cher).

- Les face à face entre Batman et le Joker font partie des rares moments où on a vraiment l'impression d'être dans la BD, car la dualité des deux personnages est très bien rendue. Psychorigidité contre folie furieuse, discours sur la nécessité pour le Joker d'exister provoquée par les agissements de Batman, tension sexuelle, masochisme du Joker... On retrouve aussi bien le DARK KNIGHT RETURNS de Frank Miller que le KILLING JOKE d'Alan Moore dans ces instants-là.

- Pile ou Face : décidément, les méchants du film volent la vedette à Batman. Parfait dans son rôle de procureur, inquiétant dans son rôle de super-vilain, Dent vient peupler le bestiaire de Gotham qui, à cause des agissements de Batman, se rapproche de plus en plus de la ville surréaliste de la BD, bien plus que dans le trop réaliste BATMAN BEGINS (d'ailleurs, l'apparition de l'Epouvantail et l'extinction des gangs mafieux sont là pour nous rappeler que la ville est devenue le territoire de cinglés costumés dignes de la BD). Notons que l'aspect de Pile ou Face, longtemps maintenu secret, est totalement gerbant (dans le "bon" sens du terme).

Que dire d'autre... A voir vraiment pour Ledger, qui fait totalement oublier Nicholson et dont les "farces" renvoient directement à la folie des comics.

[dario carpenter]

Un peu mieux que "Batman begins" et les Schumi,mais film un peu vide d'enjeux et surtout beaucoup trop long avec notamment ce climax interminable aux dialogues explicatifs et sentencieux...restent quelques petits trucs sympas grâce aux personnages d'Eckhart et Ledger,quelques scènes d'action un peu plus lisibles que celles du premier opus mais en ce qui me concerne le "Batman Returns" de Burton restera indétrônable

[Fatalis rex]

Un peu mieux que "Batman begins" et les Schumi

Oh ben quand même, au minimum ! D'ailleurs c'est marrant le contraste entre le Double-face de Schumi, pauvre guignol avec un masque de Halloween, et celui de Nolan, figure tragique et cauchemardesque.

[Algor]

(Petits) SPOILERS
- Le film est long. Très long. Une bonne demi-heure de trop, avec une pseudo-scène de suspens (les bateaux) franchement dispensable.

D'autant plus que cette scène et une autre dans le film, rappelle un peu trop le même choix que doit faire Spiderman dans le premier opus de Sam Raimi!
C'est pas beau copier!

[Akton]

Bon film de l'été, mais certainement pas le chef d'œuvre tant attendu qui devait révolutionner le genre... On ne s'ennuie pas lors des 2h30 de projection, sans pour autant être totalement pris par une intrigue qui ne surprend jamais vraiment.

Les acteurs sont eux aussi tous bons, et bien entendu Ledger relève le défi de reprendre un rôle marqué par Nicholson, mais tout cela reste au final assez sage et bien dans les clous de ce qu'on attend...

Au niveau des les scènes d'action, le constat est un peu le même: celles ci sont plutôt réussies (et surtout lisibles), mais on a jamais droit à une quelconque claque visuelle et, le pire, c'est qu'elles ont toutes un air de déjà vues...

Petit spoiler:
A mon avis, le film aurait vraiment pu basculer dans une autre catégorie, lors de la scène des ferrys... et surtout si on avait eu droit à une conclusion plus tragique et moins consensuelle... certainement qu'avec un mec comme Carpenter, le film aurait changé de dimension, là on doit se contenter d'un bon produit bien réalisé avec quelques ambitions, mais qui au final ne nous surprend jamais...

[Fatalis rex]

Le Joker va tout de même assez loin dans sa folie. Il tue pas mal de monde, fait sauter des trucs, on ne sait jamais ce qu'il va faire, et c'est l'essence du personage (à noter, un GRAND moment de cinéma, quand le Joker conduit la bagnole de flic les cheveux au vent. Ca dure quelques secondes, mais c'est un pur moment de cinéma).

[dario carpenter]

(à noter, un GRAND moment de cinéma, quand le Joker conduit la bagnole de flic les cheveux au vent. Ca dure quelques secondes, mais c'est un pur moment de cinéma).

oui,c'est même l'un des meilleurs passages..heureusement d'ailleurs que Ledger et Eckhart proposent des personnages et prestations intéressants,parce que pour le reste du film...

[Manolito]

Un excellent film qui nous prouve après "Le prestige" que Nolan est vraiment un des meilleurs, si ce n'est le meilleur réalisateur de cinéma fantastique en circulation. Un regard sérieux, adulte, solide et ambitieux qui propose un vrai renouvellement du cinéma de super-héros en le mêlant aux films poilciers/gangsters des années 70/80 - avec en plus un coté playboy de luxe, aux joujous extraordinaires dans le style de James Bond.

D'abord, c'est vraiment LE film à voir au cinéma sur un très grand écran, c'est filmé énOOOOOOrmissime - la poursuite au milieu du métrage ... Il y a un sens du cadrage, de la profondeur de l'image, de l'ampleur qui est vraiment sans commune mesure avec des films comme "Iron Man", "L'incroyable Hulk", "Hancock" - ou même "Batman Begins" - qui font chiches et tout petits à côtés. (c'est peut-être d'ailleurs dû aux passages filmés en IMAX de certaines choses)

Le film déploie une splendeur, une ampleur impressionnante. On a vraiment l'impression de voir un grand film, du grand cinéma ; et ça, ça fait du bien. Le côté fresque, épique, on le retrouve avec une intrigue extrêmement riches en personnages variés, importants, extrêmement écrits et développés. Là où "spiderman III" s'est pris les pieds dans le tapis en voulant mélanger trop de méchants, "Dark Knight" s'en sort vraiment magistralement, les nombreux récits cohabitants avec énormément d'habileté et de réussite. Comme dans "Begins", toutes les actions des personnages sont logiques dans leur façon de penser, d'être dépeint. Il y a clairement de quoi remplir trois ou quatre films dans un seul "Dark knight" ! La distribution est vraiment irréprochable, je ne vois pas ce qu'on peut ajouter de plus, tout le monde est à sa place, et on sent le plaisir de vrai cinéphile de la part de Nolan de nous ressortir Eric Roberts et William Fichtner, ou bien de nous refaire une petite apparition de l'épouvantail. Ledger mérite les éloges qu'on lui a accordé ; c'est vrai qu'on s'éloigne du côté SF/fantastique/gothique des précédentes incarnations de Batman dans on personnage. Mais tant mieux, c'est nouveau, c'est différent, c'est pour ça que c'est bien... Ca s'appelle faire des choix artistiques... Aaron Eckhart est un acteur qui ne me plait pas trop d'habitude, mais là, il est absolument parfait du début à la fin du film, et dans un rôle très varié, par facile... "Batman Begins" se posait les questions de la justice et de la corruption et "Dark Knight" poursuit dans cette voie en continuant à penser le rôle du Batman dans l'histoire de Gotham, son rôle de "mal nécessaire". Toute cette partie est particulièrement développé avec le personnage de Dent. Mais il développe aussi le personnage du Joker comme une incarnation du chaos face à diverses incarnations de l'ordre, ou même des ordres (ceux de la pègre, de la politique, de la justice, de la loi du plus fort qu'applique Batman). dans les rebondissements et les révélations, il est difficile de ne pas penser aux prestidigitateurs du "prestige"... Des personnages metteurs en scène de leurs actions et de leurs combats, avec un sens de la théâtralité et du "trucage" toujours mis en avant. Mettre en scène, c'est tromper, c'est tricher...

Il y a vraiment un moment où on se dit qu'on va avoir un chef d'oeuvre parfait, après l'évasion du Joker. La science de l'écriture et du rebondissement des frères Nolan est vraiment énorme. Mais, c'est vrai que la scène des bateaux est un moment où le film bascule vers trop de conformisme ou de "gentillesse". C'est là où on se dit que Nolan ne nous fait pas un second "Prestige", car ici, il reste lié à certaines conventions du gros cinémas de major... Un peu dommage, car on passe à pas grand chose de la perfection...

Un peu en-dessous d'un "Spider Man 2" côté super-héros, un peu en dessous d'un "Prestige" côté Nolan, mais quand même un très grand film, une excellente fresque d'action à voir sur un écran énorme et son digital pour en apprécier l'envergure vertigineuse et la richesse thématique et narrative qui confine au bourratif !

[Fatalis rex]

Justement, là où le traitement du Joker est très réussi, alors que c'était vraiment LE personnage à ne pas rater, c'est que Nolan fait bien passer l'idée que si Batman n'existait pas, le Joker ne serait pas apparu, et que son seul rôle c'est de foutre le bordel. Et subtilement, on abondonne la Gotham réaliste, avec son look new yorkais et ses mafieux italiens, pour basculer doucement vers la Gotham gothique et surréaliste de la BD. L'Epouvantail devient un méchant récurrent, deux nouveaux bad guys défigurés font leur apparition, et la pègre "réaliste" est chassée par ces nouveaux arrivants complètement psychotiques. Du coup, Batman tombe dans un cercle vicieux et s'endurcit, et on finit par (enfin) se rapprocher de ce qu'est le comic-book. Quel dommage que Ledger ne joue plus jamais le Joker...

[AAWIL]

vu hier soir et j'ai franchement adoré ! Putain, ça faisait longtemps que j'avais pas été scotché devant un film au ciné. Bien plus reussi que Batman Begins (que j'avais egalement bcp aimé).
Cependant, malgré cette reussite, il a des defauts qui peuvent gener. Je vais un peu copier mes camarades en faisant les + et les - du film... en commençant par les - :

Les - :

- La durée. 2h30, c'est long, trop long par moment. Il y a une bonne demi heure de trop à mon gout.
- Le Montage. ça rejoint le probleme de la durée dans le sens où le montage est cette fois-ci bien different de celui de Batman Begins (que certains reprochaient d'avoir une 1ere partie 'vide' et limite toute l'action dans la 2eme). Là le probleme est plutot ce rythme en dent-de-scie. c-a-d : action-dialogue-action-dialogue-action. Vu comme ça, àa n'a pas l'air genant mais le probleme est qu'on a l'impression que le timing est le meme à chaque fois.


SPoilers :


- l'epouvantail, aussi vite, aussi vite expedier. Meme si l'idée de la reconversion en dealer avec sa drogue hallucinogene semblait amusante, ça reste quand meme le personnage le plus baclé du film.

- Le scene avec le sonar et la vision en 3D. Je sais pas... j'ai trouvé ça un poil too much




LES + :

+ Les acteurs. Et surtout Ledger qui nous livre une interpretation du Joker hallucinante !!! Celle de Nicholson fait limite pale figure face à celle de Ledger qui bouffe l'ecran a chaque apparition. Le coté psycho tout en gardant son coté theatral est magnifique.

+ Les scenes d'actions, nettement plus lisibles que dans Batman Begins. Du coup on apprecie chaque scene. Celle avec la Batmoto est l'une des meilleure que j'ai vu depuis un moment sur granr ecran.

+ LE face a face Batman-Joker...

+ Le Theme abordé. C'est sur que le scenario n'a rien d'extraordinaire et que ça peut paraitre deja vu. Mais je trouve que la reflexion sur le veritable visage d'un heros est nettement plus interessante dans The Dark Knight que dans tout les Spiderman reunis (où les dialogues sont vraiment imbuvables). Meme si ici aussi certains dialogues sont parfois maladroits (deja presents dans Batman Begins).

+ Two-Face, superbe travail sur les effets speciaux. Et Aaron nous livre un Harvey Dent convaincant.


Bon, y'aurait encore bcp à dire. Pour l'instant je vais m'arreter.

Mais c'est sur que je viens de voir là probablement le meilleur film d'action de l'année. une bonne petite claque.

[Fatalis rex]

SPOILERS


Pour l'Epouvantail, il faut le voir comme un guest-star. C'est juste pour faire passer l'idée que maintenant, il fait partie intégrante de la galerie de super-vilains de Gotham, qui passe son temps à faire des coups. C'est un outlaw, dorénavant.

J'ai oublié : le dernier dialogue entre Batman et le Joker, qui rappelle celui en haut de la cathédrale dans le Burton : Joker la tête à l'envers, pendu au-dessus du vide, dont la vie ne tient qu'à un fil, en train de rire, et Batman à l'endroit, les pieds sur terre, il fallait le trouver !

Quand on sait qu'Angelina Jolie fait du lobbying pour jouer Catwoman dans le 3ème film, on n'a pas envie que ça s'arrête.

[Dragonball]

Pour "Libération", Batman et un film fasciste et Christian Bale est aussi expréssif qu'un Micro onde !

Ouf, ce concert de louange face au dernier film de nolan commençait à me stresser !

Cape. «The Dark Knight», projet politico-moral dans une atmosphère sombre, illuminée par un Heath Ledger incontrôlable.
DIDIER PérON

QUOTIDIEN : mercredi 13 août 2008
The Dark Knight de Christopher Nolan avec Heath Ledger, Christian Bale, Gary Oldman, Maggie Gyllenhaal… 2h27.


L’accueil critique favorable réservé à The Dark Knight étonne plus que le succès du film au box-office américain (160 millions de dollars de recette dès le premier week-end d’exploitation), plutôt prévisible puisque la franchise Batman est une vache à lait pour la Warner, depuis le premier épisode réalisé par Tim Burton, en 1989. Le positionnement adulte voulu par le réalisateur Christopher Nolan, né à Londres en 1970 et révélé en 2000 avec l’étonnant Memento, a fonctionné à plein régime. La plupart des journaux américains «sérieux» (à l’exception notable du New Yorker) ont applaudi ce Batman sombre, ancré dans l’atmosphère d’épouvante maussade qui semble saisir l’Amérique contemporaine. Tous les articles soulignent à quel point le film fait implicitement référence à un pays choqué par les attentats du 11-Septembre et n’en finissant pas, depuis, de remâcher ce coup de bambou traumatique. Entre hantise du terrorisme et menace écologique, les superproductions américaines se succèdent (Je suis une légende, Phénomènes, Wall-E…) qui, en forme de mises en garde de plus en plus alarmantes, agitent le spectre du retour à la barbarie (pour les hommes) et à la vie sauvage (pour l’espace urbanisé).

Baston. Le Batman nouveau ne fait donc qu’abonder dans cette vogue apocalyptique. Histoire de rappeler, en pleine période estivale, aux vacanciers rôtissant au soleil de la sottise, que le monde n’est pas une partie de plaisir (en paréo à fleurs) mais une baston (en cape noire et oreilles de chauve-souris). La noirceur du propos est doublée, hors-champ, par la mort de Heath Ledger, qui interprète le Joker. Le jeune acteur, devenu célèbre en 2005 pour sa composition de cow-boy pédé dans le Secret de Brokeback Mountain d’Ang Lee, avait été retrouvé inanimé dans son appartement de New York, en janvier dernier, alors que les premières images de The Dark Knight commençaient à circuler. L’autopsie avait conclu à une overdose médicamenteuse (un cocktail d’anxiolytiques et d’analgésiques). Sa prestation limite, qui remplit d’une énergie incontrôlable chaque séquence où il apparaît, vide d’autant les scènes où il s’absente. Méconnaissable sous le maquillage défigurant du Joker, Ledger semble péter les plombs en direct et les rumeurs qui, après le tournage, le disaient perturbé par un rôle qui l’aurait envahi au-delà du raisonnable, alimentent à tour de bras la légende de ce néo-James Dean, qui pourrait recevoir un oscar à titre posthume.

Même si Nolan a tourné son film à Chicago (avec une petite échappée à Hongkong), la mégapole Gotham City évoque irrésistiblement New York. Une fois encore, la ville est en proie à la violence. Les différentes crapuleries locales ont fait alliance pour régner sur tous les secteurs de l’illégalité. Mais un nouveau personnage déboule comme un chien plus que fou : le Joker. Psychopathe fardé en clown, le visage balafré par le sourire à l’arme blanche que lui a taillé son père, le Joker ne s’intéresse pas à l’argent mais, beaucoup plus fort, au chaos. Il est qualifié à plusieurs reprises de «terroriste», dénomination curieuse mais qui tire la figure du malfrat déphasé vers celle de l’idéaliste politique prêt à tout pour semer l’anarchie. Il est combattu par deux idéalistes, le lieutenant de police Jim Gordon (Gary Oldman) et le fringuant procureur Harvey Dent (Aaron Eckhart, trop fade pour le rôle).

Orgueil. Et Batman alors ? Ses interventions en CDD prêtant main forte à la puissance publique finissent par poser problème. Au fond, n’a-t-il pas péché par orgueil en voulant étrangler toutes les mafias en même temps, jetant, avec ses gros bras, des hectolitres d’huile sur un feu qu’il est officieusement censé éteindre ? Derrière le masque noir, le multimilliardaire Bruce Wayne (Christian Bale, aussi expressif qu’un four à micro-ondes) commence à douter de sa vocation justicière.

Christopher Nolan et son frère Jonathan ont d’évidence cherché, dans leur scénario, à créer des situations qui évitent le bras de fer du bien et du mal, au profit de débats triangulaires, où les intérêts des uns et des autres se superposent et souvent s’annulent. La tonalité crépusculaire du film trahit aussi la solennité d’un projet qui entend mener de front le roulement de mécanique du film d’action et le débat politico-moral. Un coup de Batmobile, un dialogue de Platon, un bourre-pif bien placé, un séminaire sur Leo Strauss…

Mais on a quand même l’impression que le vacarme des traditionnelles séquences d’actions (bagnoles écrabouillées et bâtiments explosés) relève de la même poudre aux yeux que les efforts désespérés de Nolan pour avoir l’air plus finaud que la moyenne. Sa noirceur n’est jamais mélancolique et sa description d’un monde traversé par la terreur trahit non une véritable angoisse, mais une occasion rêvée d’en rajouter une couche. Le film, du moins, prête voix à une sourde demande fascistoïde, l’obsession générale du «nettoyage» de la ville confinant ici au grotesque.

[Manolito]

Je ne l'ai pas lu car ça n'a pas l'air intéressant...