Welcome to Hard Times - Burt Kennedy (1967)

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manuma
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Welcome to Hard Times - Burt Kennedy (1967)

Message par manuma » mer. mai 11, 2011 10:47 am

Hard Times est une bourgade typique du Far West, avec son saloon et ses habitants aussi braves que pacifiques. Le jour où un bandit masqué vient y semer la panique, nul ne lui résiste, et surtout pas Will Blue, le maire, peu porté sur des actes d'héroisme qui pourraient nuire à sa santé. Le calme revenu, Will Blue participe à la reconstruction générale et prend en charge un jeune garçon dont le père a été tué. Il se promet d'être brave, la prochaine fois. La ville renaît, réanimée par l'ouverture d'un saloon, peuplé de nombreuses jolies femmes. Le retour du bandit masqué, toujours aussi sauvage, va mettre chacun devant ses responsabilités.

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Welcome to hard times est l’adaptation, par Burt Kennedy lui-même, du roman éponyme de E. L. Doctorow, auteur américain probablement plus connu des cinéphiles pour les adaptations cinématographiques de ses romans Ragtime, The Book of Daniel et Billy Bathgate, respectivement portés à l’écran par Milos Forman, Sidney Lumet et Robert Benton. Notons tout de suite que le romancier n’était guère satisfait de travail de Burt Kennedy (comme il ne le sera pas davantage de celui de Milos Forman quelques années plus tard) et considérait tout simplement Welcome to Hard Times comme, à ses yeux, « le second pire film jamais réalisé ».

Quoi qu’il en soit, et quoi qu’E.L. Doctorow ait espéré voir exprimé à l’écran initialement, Welcome to Hard times propose une très intéressante réflexion sur la construction socio-industrielle de l’Ouest, balayant au passage quelques mythes tenaces et images d’Epinal sur les pionniers et bâtisseurs de ces nouvelles contrées, hommes et femmes de bonne volonté cherchant à construire ensemble un monde meilleur. Le film nous montre au contraire une société s’érigeant dans le feu, le sang, les rapports de force – avec une question essentielle revenant tout au long du récit : comment répondre à la violence aveugle ? - les tractations financières et l’exclusion de l’autre (l’indien, qui demeure constamment en bordure du village).

Alors bien sûr, Burt Kennedy n’étant pas le plus grand cinéaste révisionniste de l’Ouest américain, il tempère cette noire vision par des passages plus légers dans le ton (le personnage de Warren Oates, celui du représentant du gouvernement) dans lesquels on repère distinctement sa patte. Mais sans que cela ne nuise fondamentalement au bon fonctionnent du film. Au contraire, il se crée ainsi une curieuse ambiance schizophrène, qui maintient constamment le spectateur sur la défensive, dans l’attente notamment du dernier round de cette pièce westernienne en trois actes, à savoir le retour de l’homme de Bodie, sorte d’Attila de l’Ouest.

Enfin, Burt Kennedy joue assez adroitement sur l’aspect allégorique de son sujet, limitant géographiquement son récit au seul village de Hard Times et à la colline qui le surplombe, et instaurant dans le premier acte une ambiance quasi irréelle, à la lisière du fantastique.

Ainsi, si l’on est peut-être loin des intentions premières de E.L. Doctorow, le résultat n’en tient pas moins, dans ses dysfonctionnements et contradictions mêmes, du western hors norme méritant assurément de figurer parmi les titres plus notables de son auteur.

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