La prisonnière du désert (John Ford) (1956)

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ementeht-ré
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Message par ementeht-ré » jeu. juil. 20, 2006 7:50 pm

je suis en train de le voir en ce moment sur a r t e

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Machet
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Message par Machet » ven. juil. 21, 2006 9:58 am

ementeht-ré a écrit :je suis en train de le voir en ce moment sur a r t e
C'est intéressant de constater à quel point les indiens n'étaient que de la chaire à canon. (cf. l'assaut final :shock: ). Ça en dit long de l'état d'esprit de l'époque (de la réalisation du film, j'entends). Je sais bien que cela fait parti des codes du western classique (indien = méchant, cowboy = gentil) et que le cinéma de John Ford s'intéresse avant tout aux portraits (savoureux) du clan "cowboy". Je ne connais pas assez l'oeuvre de John Ford pour savoir si il était lui même indifférent au génocide indiens. A-t-il fait par la suite des films pro-indiens (ou disons des films qui les considéraient autrement que comme des sauvages juste bon à mourir) ?

La mise en scène est impressionante, mais La prisonnière du désert, sur une télé, ça le fait moyen. On n'a qu'une envie, aller le revoir immédiatement sur un écran géant.
Il y a un p'tit détail qui me chiffonne

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Message par CHIEN_FOU » ven. juil. 21, 2006 10:08 am

Je ne sais pas ce qu'en pense Manolito, mais je pense que le retournement du traitement des Amérindiens dans les westerns est plutôt tardif. Années 1970 ?

Que peux-tu nous en dire Manolito ?
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Message par Manolito » ven. juil. 21, 2006 10:17 am

Le cinéma de John Ford est plutôt considéré comme pro-indien en général ; voir son portrait assez négatif de Custer dans "Le massacre de fort apache", àà une époque ou d'autres cinéastes, comme Raoul Walsh, pouvait en dresser un portrait très héroique. "La prisonnière du désert" ne m'a pas frappé comme particulièrement anti-indien. Vu qu'il n'est pas très pro-cowboy non plus ! Mais je ne suis pas un spécialiste de la question. Il me semble que le premier western considéré comme variment gentil avec les indiens est "la flèche brisée" de Delmer Daves, 1950... Mais je ne suis pas un spécialiste du sujet...

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Message par ementeht-ré » mar. juil. 25, 2006 9:10 pm

je viens de voir que "la prisonnière du désert" vient de sortir en dvd,la meme série que la "horde sauvage".

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Message par Manolito » mar. juil. 25, 2006 10:30 pm

Il est sorti en France depuis longtgemps, mais je crois que c'est une nouvelle édition, avec un nouveau télécinéma, comme celle sortie récemment aux USA ?

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Message par Lord Ruthven » mar. juil. 25, 2006 10:31 pm

Il me semble que le premier western considéré comme variment gentil avec les indiens est "la flèche brisée" de Delmer Daves, 1950...
C'est bien ça. Après, pour le traitement pro-indiens, les productions européennes ont pas mal déblayé le terrain aussi, avec par exemple la saga allemande des Winnetou, dans les années 60.
Gna !

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Message par arioch » dim. janv. 21, 2007 1:36 am

Lord Ruthven a écrit :C'est bien ça. Après, pour le traitement pro-indiens, les productions européennes ont pas mal déblayé le terrain aussi, avec par exemple la saga allemande des Winnetou, dans les années 60.
N''exagerons pas non plus ! Les Winnetous, ce ne sont pas des films qui revendiquent quelque chose. C'est tres gentillet les Winnetous. Ce sont avant tout des Westerns ou le heros est un indien. A ce niveau la, des heros indiens, il y en a eu largement avant dans le cinema americain.
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Message par Akton » mer. mars 28, 2007 4:14 pm

J’ai vu le film hier soir et franchement, je suis vraiment partagé entre le talent de Ford pour dépeindre les magnifiques décors de Monument Vallée, et le traitement réservé aux indiens. Tout a été dit sur les décors, et je suis d’accord sur le fait que l’image est vraiment belle et majestueuse (renforcé par les couleurs en Technicolor).
Par contre, là ou le bas blesse terriblement, c’est la représentation des indiens dans ce film. Qu’ils soient méchants ou de « bons » indiens (c’est à dire ceux avec qui les blancs commercent)… on est assez souvent à la limite du détestable.
Quand Martin commerce avec une bande d’indien, et que par erreur il achète une indienne, la plus moche de la bande (effet comique voulu ?), il lui donne des coups de bottes pour la faire dégringoler de l’endroit où il dort… sous les sourires narquois d’Ethan… ça provoque un malaise. Malaise déjà présent quand Martin et Ethan se rendent au fort pour constater si Debbie fait partie des prisonnières blanches libérées par la cavalerie lors de l’attaque d’un camps d’indiens, toute les blanches sont présentées comme folles, l’une d’elle sourie bêtement, l’autre joue avec une poupée… bref « elles sont devenues toutes des Comanches » dit Ethan…
A aucun moment, un indien n’a un comportement positif, voire même humain, ce sont tous soit des bruts qui tuent, soient des simplets, soient tout bonnement des cibles pour les rangers texans. D’ailleurs, j’allais même dire que les femmes blanches ne sont pas beaucoup mieux traitées : elles portent toutes un tablier et ont les mains occupées soit avec une carafe soit avec un plat de nouilles.

Bref, outre ses qualités esthétiques indéniables, le film nous montre quand même une vision bien réductrice de l’Ouest américain qui, 50 ans après avoir été réalisé, est assez pénible à voir.

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Message par arioch » mer. mars 28, 2007 4:17 pm

Ce que tu vois comme des defauts, si tu veux mon avis, c'est voulu pour faire ressortir le cote raciste et haineux du personnage blanc.
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Message par Manolito » mer. mars 28, 2007 4:18 pm

Les blancs ne sont pas beaucoup mieux traités dans le film... Enfin, bon... :?

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Message par Akton » mer. mars 28, 2007 4:38 pm

J’arrive pas à voir vraiment l’ambiguïté des personnages blancs. Même si on peut voir en Ethan un personnage blessé par la guerre avec un passé sûrement très lourd, les autres apparaissent plutôt de façon positive : que ce soit Martin le jeune plein de fougue, le reverrant sheriff plein de bon sens et de toujours de bons conseils, le fou du village qui fait rire tout le monde, etc...

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Message par arioch » dim. oct. 21, 2007 5:10 pm

Revu il y a quelques jours LA PRISONNIERE DU DESERT qui, avec ses chemises à carreaux, aura du mal à convaincre les réfractaires au Western américain. Et pourtant, nous sommes en 1956 lorsque John Ford tourne, pour la première fois, à Monument Valley un Western comportant des éléments plutôt violent mettant face à face, avec respect, les Américains et les vrais Américains.

Pour commencer, le film est magnifique d'une point de vue esthétique et c'est tres probablement du au talents des personnes qui l'ont tournés mais aussi grâce au Vista Vision et au Technicolor. La profondeur de champs est absolument incroyable, c'est du vrai cinéma plus que les trucs monochrome qu'on nous balances depuis trop longtemps !
JE VEUX DE LA COULEUR, BORDEL !

L'histoire, on vous en a déjà parlé. Une famille se fait massacrer par des comanches qui emmenent quelques unes des femmes avec eux. Deux hommes décident de partir à la recherche de l'une d'entre elles. Le premier est un homme dur, revenu récemment de la guerre, qui déteste les indiens. Le second est un métis indien a qui on renverra à la gueule à plusieurs reprises un racisme ordinaire dont il pourrait tres bien faire ou fait l'objet. La recherche va se dérouler sur plus de dix ans ou les deux hommes vont donc suivre la trace d'un certain "Scar" (Cicatriz ou Le Balafré, selon les interlocuteurs). Alors abordons les points de vue qui laisse pas mal à penser que le film n'est pas aussi raciste qu'on pourrait le croire...

Lorsque les deux personnages antagonistes se rencontre, Ethan Edward et Scar (l'homme blanc et l'indien), le premier lui balance un "Tu parles bien notre langue, tu as reussi a l'apprendre ?" (un truc du genre) sur un ton narquois et méprisant. Quelques minutes plus tard, l'indien lui dit exactement la même chose. Le personnage blanc est ainsi tourné en ridicule. Si l'on ne voulait pas, dans un tel film, faire ressortir un côté fier et plus profond du personnage de l'indien, la séquence aurait ete inversée ou meme occulté. Pourquoi se moquer de l'homme blanc ?

Autre trait important du film, les exactions des indiens sur les colons ne sont pas montrés. La violence du film reste d'ailleurs hors champ et se retranscrit plutot par les reactions des personnages. Ethan ressort d'une maison et empeche Martin d'y entrer... Ethan revient d'un canyon tout déboussolé et explique qu'il n'y avait rien et qu'il faut prendre un autre chemin (l'explication viendra plus tard). On ne gomme donc pas l'horreur de ce que font les indiens, on pourra prendre cela comme une façon d'expliquer qu'ils sont donc foncièrement mauvais. Pourtant, lorsque les villages des indiens sont attaqués, nos héros découvrent des femmes et des enfants massacrés mais aucun homme. Il en va de même lors de l'attaque avec Ethan ou, bizarrement, on voit surtout des femmes courir ou des enfants pendant que nos heros chevauchent a toute allure en flinguant tout ce qui bouge. Certes, cela n'a rien a voir avec la sauvagerie américaine vue dans SOLDAT BLEU mais rappelons encore une fois que nous sommes en 1956 pas à l'aube des années 70. Parmi les victimes de l'armée, on trouve même la femme indienne de Martin dont la présence au milieu du village des comanches massacrés est un mystère (explicitez dans le récit avec une large porte ouverte portant à croire qu'elle etait la pour aider Martin, la fleche sur le sol formé de cailloux en etant d'ailleurs une preuve évidente).

Dans LA PRISONNIERE DU DESERT, la violence n'est pas unilatérale, elle existe des deux côtés. Que pensez de Ethan Edwards qui se taille un scalp dans sa quete vengeresse ? Que pensez de Ethan Edwards qui pense que les femmes blanches souillées par les indiens méritent une balle dans la tête ? Car le personnage principal est un homme dévoré par la haine. John Wayne y est, d'ailleurs, vraiment excellent et la caméra de John Ford magnifie son jeu d'acteur (si !). Face à lui, Scar, l'indien, est un homme qui est, lui aussi dévoré par la haine et qui cherche à se venger. Pour légitimer ses actions, il dit lui même qu'on lui a tué ses deux fils et que pour cela il prend des scalps. Comme déjà dit, que va faire par la suite Ethan Edwards ? Il se taille un scalp ! J'imagine qu'en 1956, le film devait être perçu comme un spectacle d'une grande violence. En tout cas, il ne rencontrera pas vraiment son public, LA PRISONNIERE DU DESERT ne gagnera son statut de classique du Western qu'au fil du temps (un peu comme ROLLERBALL de John McTiernant ? Non, faut pas déconner non plus ! :D).

Et une image pour faire plaisir à Rusty :wink:
Image Image
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Message par arioch » sam. nov. 17, 2007 12:18 am

Je crois que la haine d'Ethan est pourtant a plusieurs reprises mise en avant. Quand il tire dans les yeux du cadavre indien, ce n'est certainement par bonté d'ame mais bel et bien pour desacralise la sepulture d'un indien. Il ne l'aurait jamais fait pour un blanc. Si il n'etait pas raciste, pourquoi voudrait il tuer celle qu'il considere a present comme une peau rouge donc juste bonne a etre tué ! De meme, lorsque chez les militaires, il y a la sequence avec les femmes blanches recuperees aux indiens. Pour Ethan, ce ne sont plus des blanches, ce ne sont plus des etres humains ! S'il ne s'agit pas de racisme alors qu'est ce que c'est ?

Scar en soit est une victime au meme titre que Ethan l'est, lui aussi. Ce sont deux hommes tres semblables, rudes et determine, qui prenent la voie de la violence pour regler un probleme qui ne le sera jamais puisque c'est un cercle vicieux.
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Re: "La prisonnière du désert" (J.Ford)

Message par Manolito » dim. sept. 06, 2009 7:12 pm

Revu... il est vrai que les remarques ci-dessus faisant de "La prisonnière du désert" un film anti-indien sont assez hallucinantes. A-t-on vraiment vu le même film ?? :shock: :shock: C'est justement l'histoire de la rédemption d'un vieux soldat sudiste, aigri par la haine et le racisme au contact de son neveu métis... L'anti-racisme est tout simplement le sujet du film !

Rédemption très progressive (l'histoire s'étale sur cinq ans). Certes, le chef comanche Scar est une brute, mais il n'est que le pendant indien de Ethan puisque lui aussi justifie ses actes par la vengeance (les blancs ont massacré ses enfants). Et le comportement d'Ethan qui veut buter sa nièce parce qu'elle a vécu avec des indiens ou qui saccage une sépulture indienne gratuitement, n'est guère appétissant... Il est étonnant de voir que dans un commentaire ci-dessus, il est écrit en substance que Ford considérerait exacte la réplique d'Ethan disant que des blanches ayant été enlevées par des indiens ne sont "plus des blanches". Alors que tout le sens du film et de sa conclusion est l'exact contraire !!!

Bref, on remet un peu les mêmes questions sur la table, mais j'ai l'impression que certains pardonnent beaucoup plus difficilement américain qu'au cinéma italien (avec ses brigands mexicains sadiques, comme Gianmaria Volonte - "l'indien" (!) dans "Pour quelques dollars de plus" - dans les Leone)...

Certes, on se serait passé de certains gags lourdauds avec la squaw du neveu (qui sera elle-aussi au fond décrite comme une alliée, puis victime innocente)... Mais de là à faire dire à "La prisonnière du désert" le contraire ce qu'il signifie...

Le film est évidemment toujours un grand spectacle, avec ses vues hallucinées de Monument Valley, sa mise en place époustouflante en quelques plans et quelques lignes de dialogue, du grand art ! Mais, pour du Ford, sans doute sous l'influence de son personnage principal, c'est aussi un film vraiment sombre, assez sec, presque funèbre, où l'on passe des déserts arides à des forêts enneigées et glacées. Beaucoup de violence et de cruauté, dans cette histoire, entre massacre de camps indien, de fermes, visites de morgues... Mais finalement, doucement, difficilement, l'ambiance se réchauffe (avec la séquence du mariage), la carapace d'Ethan se fissure et cède la place à l'humanité, l'ouverture sur les autres et sur l'avenir pacifiée du pays (avenir incarné par un couple racialement mixte et une jeune fille élevée par les comanches).

Revu aujourd'hui, "La prisonnière du désert" n'est pas mon Ford préféré, je lui préfère certains films plus chaleureux et rigoureux. Mais c'est certainement un beau film, de très fort caractère, et un modèle de mise en scène, proposant souvent des plans d'une beauté à couper le souffle !

Je l'ai donc vu sur le hddvd. Sa sortie avait été un évènement car c'était le premier titre aussi ancien à être publié en disque HD. Le film a été tourné en Vistavision et warner ne déçoit pas en proposant une copie à la définition excellente, respectant la fluidité, la précision, le piqué étourdissant et la profondeur de champs inhérents à ce format de luxe.

C'est aussi un des films tourné en eastmancolor monopack dans les premières années de ce procédé et le résultat est parfois étrange : les arrières-plans peuvent pomper, fourmiller, il y a un grain, très fin certes, mais plus facile à déceler que sur des transferts HD pris sur du 70mm plus tardifs comme "2001" ou "Grand Prix". L'étalonnage de certaines scènes donnent des tons de chairs étranges (jaunâtres, grisâtres) : cela avait fait pas mal jaser à l'époque de la sortie de ce disque et de son équivalent dvd. Mais un responsable de warner s'en était expliqué dans un long entretien très technique chez digital bits, certifiant qu'il s'agissait là du film tel qu'il avait été tourné en son temps, sans aucun traficotage.

Même en terme de vidéo, ce n'est pas totalement parfait : certains détails (chemise à carreaux par exemple) peuvent être un peu instables, il y a parfois de très, très légers halo lumineux. Rien de tragique, c'est certainement un très beau transfert, je ne placerais pas ce transfert au top commen un "2001" ou un "Robin des bois".

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