Tiens, je ne partage pas votre avis sur ce film qui est un de mes préférés des frères Coen. De fait, je trouve que leur film le plus abouti, le plus mature. Et puis, j'ai beaucoup aimé les nombreuses références au judaïsme, pas prétentieuses du tout, qui enrichissaient l'histoire, tout en ouvrant des pistes de réflexion. Les frères nous offre ici de l'humour noir juif, comme on appelle les films de ce genre où la noirceur de l'existence humaine force à sourire jaune devant tant de malheurs qui ne peuvent aboutir qu'à l'absurde, au sens existentialiste du terme. Ici, nous avons droit à une relecture du mythe de Job.
A serious man, le quatorzième film écrit et réalisé par les frères Coen, explore donc la notion de fatalité à travers le thème de la soumission au destin. En effet, ce récit montre que le sort s’acharne parfois sur certaines gens qui n’ont pourtant rien fait de mal. On ressent alors ici l'influence de l’histoire judaïque de Job.
Dès la première scène, le spectateur est confronté à cette fatalité injuste : un conte d’horreur en yiddish explique de façon métaphorique, à travers un fantôme qui vient hanter un couple dont l’homme lui a pourtant donné un coup de main sur le bord de la route enneigée, que l’on peut être maudit sans raison, et tout perdre.
Le personnage principal du film, Larry, comprend à force de souffrances que la vision qu’il avait des choses était fausse. Il se retrouve devant rien, ayant perdu ses certitudes. Il subit les malheurs qui lui tombent dessus sans jamais se révolter contre eux. Il ne contrôle rien de ce qui lui arrive. Il ne peut que pleurer, sans plus. Il ne parle pas lorsqu’il le peut. Pour la première fois dans leur filmographie, les frères Coen montrent un personnage vide, sans volonté, qui ne fait que subir les aléas du sort, et qui est pratiquement construit par eux. Ce personnage vit pleinement son destin, même si celui-ci est négatif. Il lui est totalement soumis. Son existence est absurde. Il y cherche néanmoins un sens, à travers la quête des trois rabbins. Cependant, la question de l’existence de Dieu n’est pas tant abordée dans ce film, probablement par pudeur de la part des frères Coen qui aborde aussi ouvertement leurs origines judaïques pour la première fois.
Larry ressemble à ce Job biblique dont la vie s’écroula entièrement tandis qu’il restait là, impassible, à prier.
Dans
A serious man, les frère Coen explorent un univers où la soumission du personnage aux malheurs de sa vie, son non-combat face au destin, sa quête dépourvue de sens, montrent une fatalité cruelle et inéluctable, mais surtout, injuste.
La fin tant énigmatique que frustrante le montre bien : on a le contrôle sur rien. La vie elle-même est pleine de mystère, incontrôlable et frustrante. Demandez à Job.
![Razz :P](./images/smilies/icon_razz.gif)