Les moissons du ciel - 1978 - Terrence Malick

[Manolito]

Titre US : Days of Heaven

Durant la grande dépression américaine, Bill et sa compagne Abby (qui se font passer pour frère et soeur) trouvent du travail comme ouvriers agricoles. Le propriétaire de la ferme, un homme solitaire et malade, s'éprend d'Abby. Bill l'encourage à l'épouser afin de pouvoir lui soutirer de l'argent...

Après "La ballade sauvage", Terrence Malick se voit offrir un budget confortable et une grande liberté artistique par la major paramount afin de réaliser "Les moissons du ciel". Ce projet connaîtra une gestation très longue et assez incertaine (improvisation, reshoot, montage étalé sur deux années...).

Ce film semble a priori un grand spectacle rétro, s'inscrivant dans un premier temps dans une tradition américaine de romans comme "Des souris et des hommes", "Les raisins de la colère" ou, en terme de cinéma "On achève bien les chevaux" par exemple. Reconstutution hollywoodienne et fastueuse d'une période sociale difficile, donc...

Mais Malick s'écarte rapidement d'un propos social pour se laisser porter par la description d'un trio amoureux à la fois intéressant, car peu caricatural, mais aussi prévisible et narré de façon terne. Car si Terrence Malick n'a peut-être jamais autant soigné ses images et son son (superbe piste dolby stéréo et magnifique musique de Morricone), il semble laisser ses personnages un peu sur la touche. L'interprétation est terne, certains dialogues inaudibles (la voix off de la petite fille !), l'action se déploie lentement, et on a l'impression de se tenir trop à distance de cette histoire au déroulement irrégulier. Le spectateur ne se sent guère considéré...

Projet à la conduite incertaine, "Les moissons du ciel" n'en est pas moins un spectacle d'une beauté visuelle époustouflante, une reconstitution historique hyper-soignée mis en scène avec une intuition de l'image et du cinéma jamais prise en défaut. C'est déjà beaucoup, mais ça ne suffit pas à en faire le chef-d'oeuvre qui ne semblait pourtant pas loin... Ce film serab un échec public qui écartera Terrence Malick du cinéma pour presque 20 ans !

"Les moissons du ciel" existe en France sur un dvd catalogue paramount. Aux usa, par contre, il a droit à une édition criterion. Le film passe en ce moment sur ciné cinéma culte dans une très belle copie 1.85 et VM stéréo.

[Maxcrom]

Je ne vais pas faire dans l'originalité, mais pour moi ce Malick vaut essentiellement pour sa photo d'une beauté qui nous happes corps et âmes. La palette et les dégradés de couleurs sont superbes, et on croirait parfois que les immenses champs de blés sont filmés tel un océan déchainée pris dans le tumulte d'une tempête, tant c'est beau. L'orfévrerie plastique supplante donc largement pour moi une narration enquilosée et elliptique qui ne m'a guère passionné.

PS : Voilà un film dont l'apport de la HD devrait être vraiment exceptionnelle.

[Jeremie]

Vu hier soir tiens
Et ça doit faire le troisième Malick que je découvre en un mois

Dans la forme, c'est grandiose (une seule envie après la vision du film : se rouler dans les champs de blés ! ), dans le fond j'ai trouvé ça quand même beaucoup moins intéressant...
OST de Moriconne forcément

[Machet]

Le film s'est essentiellement tourné à l'aube et au couché de soleil afin de profiter d'une lumière frontale - toujours magique.
Du grand Malick, plus intéressant que son dernier (New World) qui présente d'ailleurs de nombreuses similitudes (triangle amoureux). Son chef d'oeuvre ultime reste à mon sens The thin red line, film somme, où tout est dit, où tout est posé, où tout est en évolution constante, dans une poésie... un chant unique. Qui aurait cru que le cinéma puisse nous offrir un tel film ?
Pas de The thin red line sans Days of Heaven. Une pierre indispensable à son oeuvre écolo et transcendantale, tendance Thoreau.

[comte vonkrolock]

Du même avis que Maxcrom un film bien joli au niveau de l'image, mais bien peu passionnant (limite soporifique ), j'aurais peut-être du le voir avant la Ligne Rouge

[haxandreyer]

Vu 3 fois. Sur la forme, no comment. Mais je dois avouer que je ne comprends pas ce qui manque dans "le fond".

C'est une belle histoire d'amour, avec son lot de tragédies. Le film est raffiné, dans le sens où il n'est pas lourd en dialogues et scènes tire-jus. Il laisse une grande place aux corps et aux visages, qui expriment bien mieux les choses.

Enfin on n'a pas un film qui parle de bourgeois qui s'emmerdent, ni un film avec des pauvres en pleine réclamation sociale. C'est assez rare pour être souligné.

Je suis trés enthousiaste pour ce film, je pense que c'est un chef d'oeuvre absolu de cinéma, pas clinquant et pourtant éminemment esthétique, contemplatif et bien rythmé... bref ce genre de films qui ne laisse pas de doute sur la question du cinéma en tant qu'art.

[DPG]

Découvert hier en salles, il est ressorti la semaine dernière, notamment au Max Linder pr les parisiens. Superbe copie, projo numerique si je ne m'abuse, et toujours cool de découvrir un film comme celui là sur un GRAND écran. Pr ce qui est du film, je rejoins les partagés. On a des qualités plastiques bien au delà de la moyenne, des bonnes idées, dans la construction des personnages, leurs rapports troubles, dans la mise en scène aérienne de tout cela, mais on reste un peu trop loin du récit. On a un peu l'impression que les protagonistes sont eux aussi spectateurs du film... Mais j'ai quand même passé un plutôt bon moment, à me laisser bercer par tout cela, à penser à d'autres trucs, à écouter la partition impeccable de Morricone. Je suis pas sur de vouloir le revoir un jour, encore moins sur un écran de télé, mais je suis content de l'avoir découvert tt de même !

[Shinji]

on n'a pas un film qui parle de bourgeois qui s'emmerdent, ni un film avec des pauvres en pleine réclamation sociale

Je ne sais pas ce qu'il te faut, car nous sommes quand même en présence d'un riche fermier solitaire et malade, face à un ouvrier qui n'en peut plus de sa condition et est prêt à tout pour que cela change, les deux s'affrontant pour la même femme.

[haxandreyer]

Avec le recul, je dois bien avouer que tu as raison
Je crois que ce que je voulais dire, c'est qu'en France, on a aussi des champs de blé, mais on n'a jamais eu ce cinéma là. On peut pas dire que nous ayons eu beaucoup de cinéastes évoquant cette proximité entre les hommes et la nature.

Soit dit passant, si je me trompe, je veux bien des références. Et merci de ne pas me sortir La Guerre des Boutons parce qu'ils sont tout nus dans les bois ou Partie de Chasse en Sologne