Jawan - Atlee (2023)

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savoy1
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Jawan - Atlee (2023)

Message par savoy1 » lun. sept. 11, 2023 9:12 pm

Attention, missile en approche ! Jawan, nouveau blockbuster indien, ne se contente pas de mettre en scène un homme venu réparer les torts de la société, comme cela est laconiquement présenté, dans l'Officiel des Spectacles par exemple. On resterait alors dans le cadre balisé de ces films de justicier tapant à droite à gauche sur quelque fonctionnaire corrompu. Non Jawan voit grand, très grand, et s'attaque via les actions de son personnage principal, bien accompagné pour le coup, à pas moins de quatre fléaux endémiques du sous-continent. C'est bien simple, Jawan (traduction : soldat) nous semble inventer le "social-terrorisme".
Alors oui, les différentes actions entreprises par notre "social-warrior" sont carrément agressives, même si présentées sous le jour du thriller high-tech. C'est-à-dire avec tout le suspense et les retournements de situation requis. Mais en contrepoint, pour bien enfoncer le clou et justifier ces actes, nous sont présentées en flash-backs d'impressionnantes scènes de détresse humaine et de dysfonctionnements du système social indien, qui pourraient faire l'objet d'un documentaire dépressif. Ça fait très très mal. Et l'imbrication de certaines de ces séquences pourraient tendre au malaise.
Mais bon voilà, on est bien dans le cadre d'un cinéma populaire revendicatif, décidé pour ce faire à interpeller le public auquel il est destiné, derrière les apparats du véhicule pour stars.

Alors, justement, rebondissons sur cette remarque de notre collègue :
Dragonball a écrit :
sam. sept. 09, 2023 11:53 pm
[...]
Je ne sais d'ailleurs même pas de quelle région est originaire le film ! (Chose qui a mine de rien son importance !)
Voilà, pour le coup, un sacré cas d'école. Nous avons affaire à une production du studio Red Chillies, boîte fondée par Shah Rukh Khan, star mondiale du bollywood romantique, présentée par Yash-Raj, studio symbole du grand Bollywood romantique des dernières décennies. A priori initié pour relancer la carrière du desi-lover, le projet s'avère en fait l'exact inverse de l'actionner hindi attendu. Pourquoi ?
Parce qu'aux manettes, on fait appel à Atlee Kumar, réalisateur tamoul versatile, responsable de quelques-uns des derniers succès de la star du Sud Vijay, Soit Theri (du vigilante), le fameux Mersal et son magicien vengeur aperçu en ces pages, ou Bigil (du sport larmoyant). Vijay qui, soit dit en passant, est habitué à glisser au cœur de ses films d'action de forts discours revendicatifs (on lui prêtait à un moment des intentions politiques). Pour accompagner au générique notre justicier SRK, on lui oppose une autre star du Sud : Vijay Sethupathi, acteur au charisme indomptable et au phrasé savoureux, dans un rôle d'ordure comme il est les affectionne. Entre ces deux monstres, Nayanthara, icône féminine en devenir, toujours originaire du Sud sauf erreur, ici en flic qui ne s'en laisse pas compter. Et même si Deepika Padukone vient apporter la touche glamour et bollywood attendue, on se retrouve bien devant une œuvre au ton résolument tamoul. Impression renforcée par la présence de l'idole Anirudh à la BO survoltée, digne successeur du grand A.R. Rahman.

Suspense tendu, violence, action à tous les étages, et improbables retournements de situation sont alors au programme. Toujours justifiés après coup, rassurez-vous, même si c'est aussi "hénaurme". Le tout assorti de fortes revendications sociales dont on se demande comment elles ont pu passer et arriver sur l'écran (que font les autorités ??).
Vous y verrez un super cast féminin (j'en dis pas plus), un hommage au Roi Lion, un train, des camions, un side-car et pleins d'explosions. Vous chanterez et danserez un peu, rirez et pleurerez aussi. Vous y croiserez des (vrais) gens du peuple.
Et Shah Rukh Khan de se retrouver en ersatz de Vijay lors d'une diatribe véhémente à destination du (de son) public, invité à se bouger. En pays tamil, le cinéma ne fait pas qu'inviter à la réflexion via la mise en scène d'une dystopie ou d'un évènement prescrit, mais provoque le spectateur à l'aide de faits et de chiffres d'une angoissante actualité. En réaction aux propres provocations des personnages fictifs représentant les élus du peuple, la catharsis de la violence filmique n'en est que plus efficace.

Voilà, après cette loooongue lecture, vous vous rendrez compte qu'en fait vous ne savez rien du film. C'est fait exprès. quand on rentre en salle voir un spectacle indien, et plus particulièrement tamil, on ne sait jamais vraiment à quoi s'attendre. On connaît les ingrédients, les épices ; mais quel goût aura le plat ?

Roderick Usher
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Re: Jawan - Atlee (2023)

Message par Roderick Usher » lun. sept. 11, 2023 11:40 pm

Le film de gauchiste ultime, c'est bien simple, on dirait une version revue au goût du jour de Coolie. En ces temps où les milliardaires et les industriels sont montrés comme des génies ou des philanthropes, ça fait bizarre de voir un film où le méchant, c'est directement le grand Kapital. Je me suis demandé au passage si les chiffres donnés dans le film sont vrais (taux de suicide chez les agriculteurs, taux d'intérêt sur l'achat d'un tracteur...) et puis je me suis laissé emporter. J'ai adoré
Spoiler : :
la base du gentil: une prison de femmes dont il est directeur, et qu'il a transformé en une sorte de communauté auto-gérée. Un rêve de zadiste.
. Quand au discours final, face à caméra, j'aurais jamais pensé voir ça un jour dans un film récent.

Alors certes, c'est hyper pompier (il y a presque autant de ralenti que le Zack Snyder's justice league), mais ça réussit à être à la fois joyeux, naïf et en même temps complètement radical. Le film va jusqu'au bout de son propos.

Réjouissant.

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