Chien de la casse - Jean-Baptiste Durant - 2023

Modérateurs : Karen, savoy1, DeVilDead Team

Répondre
Avatar de l’utilisateur
DPG
Messages : 5335
Inscription : ven. avr. 30, 2004 1:03 pm
Localisation : Higher, toujours ailleurs

Chien de la casse - Jean-Baptiste Durant - 2023

Message par DPG » ven. mars 08, 2024 11:54 am

Dans un petit village du sud de la France, Dog et Miralès vivent une amitié forte mais conflictuelle. Le fonctionnement du duo est bouleversé par l'arrivée d'Elsa, une jeune femme dont Dog tombe amoureux. Jaloux de cette dernière, Mirales va tenter, tant bien que mal, de grandir et de prendre son indépendance.

Le film vient de rafler deux Césars (meilleur premier film et meilleur espoir), et a permis de voir éclore au grand jour (après quelques seconds rôles déjà notables) le phénomène du moment du cinéma français, Raphael Quenard. Au delà de cette présence écrasante sur laquelle nous reviendrons, le film offre de jolis moments. Une sorte de triangle amoureux dans la France rurale, la fameuse diagonale du vide, chère aux sociologues et laissée pour compte depuis des décennies. Ces jeunes qui trompent l'ennui entre fumette, parties de Fifa, bières et rap français. Qui passent leur journées en jogging, à tromper l'ennui comme ils peuvent, sans trop d'horizon, sans trop de rêve, ni vraiment coupé du monde moderne, ni vraiment intégré, toujours dans l'entre deux autant que dans l'entre-soi. Le personnage de Bajon subit un peu tout, sa vie, ses relations avec son pote, celles avec sa meuf. Il ne dit pas grand chose, registre semi-mutique ds lequel on voit très (trop ?) souvent le comédien évoluer. A côté de ça, Quenard impose une présence qui écrase tout et tout le monde. Il parle fort, pas comme tout le monde, passe d'une citation de Montaigne à une de Jul, se montre aussi charmeur qu'agaçant. Il a vraiment quelque chose, à voir sur la durée ce que ça donnera, s'il élargira son registre, si les gens se lasseront ou non, si on va en bouffer jusqu'à loverdose, mais pour le moment, il amène quand même un brin de fraicheur indéniable dans un cinéma français aux acteurs trop souvent formatés et interchangeables. Je lui trouve parfois un petit truc de Dewaere, et d'ailleurs, "Chien de la casse" a une certaine filiation avec un film comme "La meilleure façon de marcher" de Claude Miller, et son mémorable duo Dewaere / Bouchitey. Bref, pas le film du siècle non plus, ne survendons pas le truc, mais une petite oeuvre fréquentable, attachante, inégale mais tremplin idéal pour assister en direct à l'éclosion d'un talent.

Image
"J'ai essayé de me suicider en sautant du haut de mon égo. J'ai pas encore atteri... "

Avatar de l’utilisateur
Machet
Messages : 3688
Inscription : ven. févr. 24, 2006 6:34 am
Localisation : Annecy

Re: Chien de la casse - Jean-Baptiste Durant - 2023

Message par Machet » ven. mars 08, 2024 1:24 pm

Déçu pour ma part. Je m'attendais à un peu plus. Après la scène du restaurant (la meilleure, la plus intéressante psychologiquement), tout est dit, et le film végète (probablement volontairement). Mais même cette scène aurait pu aller plus loin, on a une ellipse suite au moment tendu, alors que j'aurai voulu voir par quelle astuce l'ambiance s'apaise ensuite.

J'ai trouvé aussi qu'il y avait un décalage entre la manière d'être et de s'exprimer de la fille et son parcours scolaire. Peut-être une manière d'abattre les faux semblants (par le même biais, Miralès démontre ainsi qu'il est plus cultivé qu'il en a l'air - mais on aimerait savoir pourquoi et le film n'apporte pas de réponse).

On a dû mal à comprendre le lien indéfectible de Dog à Miralès. L'un manipule l'autre, mais quel est l'intérêt de Dog, si ce n'est peut-être de se sentir vaguement protégé (mais à quel prix ?). Qu'est-ce qui les a uni autant par le passé ? J'aurai aimé sentir une trace de cette amitié (avant qu'elle ne soit pervertie par le caractère toxique de Miralès).

Enfin, je trouve que l'absence de figuration et de "vie" tire le film vers le court-métrage "augmenté". Les rues sont désertes, et à part une voisine, une mère (dont on ne saura quasi rien) et un groupe de gros bras vaguement gitans, on a l'impression d'une France du dimanche, totalement vide. Aucun tracteur, vélo ou que sais-je... Rien.

J'ai trouvé le film un peu austère, gris. C'était très certainement voulu. On ne sait pas grand chose des personnages. Je vois tout à fait le portait de cette jeunesse que Jean-Baptiste Durant a voulu dépeindre, mais quelque chose me manque.

J'ai tout de même aimé une proposition qui rachète tout ce petit monde, lorsque la baston générale s'arrête net suite à un événement qui les touche tous. Les masques tombent et soudainement l'humanité surgit.

Jean-Baptiste Durant fut très sobre et très bien lors de la cérémonie des César, quand tous les autres font des déclarations d'amour à leurs familles (comme si il fallait passer à la télé pour ça). Malgré mes réserves, clairement un réalisateur à suivre !
Il y a un p'tit détail qui me chiffonne

Répondre