Rois et Reines - Arnaud Desplechin (2004)

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Battosai
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Rois et Reines - Arnaud Desplechin (2004)

Message par Battosai »

Résumé allociné : Deux histoires disjointes : d'une part le couronnement de Nora Cotterelle, qui s'apprête à se marier, et d'autre part la déchéance d'Ismaël Vuillard, interné par erreur dans un asile psychiatrique et sur le point d'en sortir en piètre état. Ces deux intrigues se rejoignent quand Nora propose à Ismaël l'adoption de son fils Elias...


Avec rois et reines, Desplechin dépoussière, d’un revers salutaire, toute une frange du cinéma français d’auteur qui n’a pas les audaces de leur sujet. Desplechin est de ceux qui ont compris que la subtilité n’est pas seulement une affaire de tempérance. Le drame y est mélodramatique, et le comique, burlesque, le réalisateur assumant totalement ses excès, s’en servant pour donner vie au film, et réussissant ainsi le difficile pari de livrer a la fois un film divertissant, profond, déroutant.
Depuis la compagnie des hommes, le vocabulaire filmique du cinéaste s’est enrichi . Les jump cuts lors de certaines scènes de dialogues leur donne une force, une intensité rare. De même que, derrière la belle image (toujours signée Eric Gautier), il parvient a introduire une tension souterraine et secrète.
La partie comique est assurée par Matthieu Almaric (épaulé par un Hypollite Girardot totalement survolté), pierrot plus lucide qu’il en a l’air, fabuleusement drôle. Emanuelle Devos est quant à elle émouvante dans un rôle d’une rare compléxité.
Un film drole, triste, beau et intelligent, qui désamorce la réputation "d'auteur" élitiste de Desplechin, ou tout le monde y trouvera son compte.
Assurément une des grandes réussite de cette année (ou, décidemment, tout les grands films sont sortis dans les 3 derniers mois)
xxxx
DPG
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Message par DPG »

J'avoue que j'ai bp de mal qd meme avec le choix de Despleschin de piller la vie de son ex... :roll:
"J'ai essayé de me suicider en sautant du haut de mon égo. J'ai pas encore atteri... "
Battosai
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Message par Battosai »

:?: . La, j'avoue que je ne comprends pas ce que tu veux dire...
DPG
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Message par DPG »

Ben, il y a eu un gros brouhaha autour de ce film car le personnage de Emmanuelle Devos est entièrement repompée de la vie de l'ex de Desplechin, Marianna Denicourt. C'est pr cela que plusieurs actrices (Beart, Binoche,...) ont refusé ce rôle et Denicourt a écrit un livre pr balancer à son tour sur Despleschin.

Je sais bien que tout les auteurs puisent ds leur vie privée pr leurs créations, mais à ce point, sans accord, et ds la vie privée de QUELQU'UN D'AUTRE, et sur des sujets comme la mort d'un proche etc... si j'ai bien compris, je suis pas trop trop d'accord. Voilà.
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nick
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Message par nick »

Le père de l'enfant de Marianne Denicourt est mort accidentellement. Son père à elle est mort d'un cancer. On comprend qu'elle n'ait pas envie que quelqu'un s'inspire sans son accord de ces aspects de sa vie.
Battosai
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Message par Battosai »

C'est sur que c'est discutable, mais ce serait franchement ridicule que ca empêche des gens d'aller voir le fillm.

Ca ressemble d'avantage a ces réglements de comptes médiatiques qu'on voit si souvent (d'un coté il y a une action pas très nette, de l'autre un bouquin pour dénoncer le tout - tout en se faisant de l'argent au passage-). Rien de bien nouveau....

Sinon je viens de voir que le film a remporté le prestigieux prix louis delluc.
DPG
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Message par DPG »

Honnetement, pour moi c'est une raison suffisante de ne pas aller voir le film. Et Dieu sait que generalement je suis pas le genre de gars à me priver parce que je cautionne pas les auteurs ds leur vie privée ou quoique ce soit; mais là ça me gène.
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Battosai
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Message par Battosai »

Oui, bon, ca me parait tout de même assez stérile comme débat...
Sinon, personne n'a vu le film ? (manolito ? hrundi ?)
infernalia
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Message par infernalia »

RISQUE DE SPOILERS ?
Vu hier. Dans "Rois et Reine" on retrouve le ton unique qui fait la singularité du cinéma de Depleschin et cet impressionnant dosage du mélange des genres, entre la tragédie et le grotesque, la dissection des sentiments humains et l'espace fictionnel. Il arrive merveilleusement à saisir les différentes directions de l'existence entre son absurdité, ses moments désespérants, et ses instants burlesques. Son sens de la rupture et de la rupture à l'intérieur même de la rupture atteint son apogée dans Rois et Reine. Je m'explique avec un exemple : la scène de braquage casse le ton, dans une forme de scène de "genre - film de banlieue", puis se fait elle-même totalement briser dans son déroulement et son issue. De plus, une des plus belles idées du film est de centrer l'intrigue autour du personnage de Nora, d'adopter son point de vue comme celui d'un très beau personnage presque exemplaire ce qui tient lieu de repère-guide au spectateur qui voit avec ses yeux, puis à nouveau de casser (en partie) l'icône par l'intervention d'un flash back et du témoignage d'un mort (deux apparitions de fantômes, fantômes de la culpabilité). Cette idée merveilleuse du témoignage post-mortem d'un père est l'occasion d'un des moments les plus forts du film, terrifiant, presque sadique, et l'on sent le sol se défouler sous nos pieds en même temps qu'elle... Cet instant où le personnage perd l'image d'elle même à l'instar de l'image que le spectateur a d'elle est à la fois d'une beauté rare et d'une cruauté étonnante. Il a pour conséquence un déroutant changement de point de vue - autant vis à vis de l'héroïne que de son entourage puisque l'on sait désormais que son jugement peut être tronqué - et une ouverture sur le gouffre de l'âme humaine. "Et si je m'étais trompé sur moi-même", "Et si je m'étais trompé sur eux", "Et si je m'étais trompé sur elle", le regard du spectateur se mêle à celui de l'héroïne, et c'est un peu toute la hantise de l'existence qui nous étreint ... Là, j'ai vraiment pensé au Bergman de "Cris et chuchotements".
Autre rupture : l'impression initiale que laisse le personnage d'Ismaël, au delà des situations burlesques, est presque désagréable, celui d'un misanthrope égocentrique et égoïste... puis, peu à peu, Ismaël s'ouvre à nous dans son mécanisme de pensée, pour devenir l'un des plus émouvants du film... Le film accuse malgré tout quelques passages à vide et quelques maladresses démonstratives. Je pense en particulier au flash back un peu artificiel et laborieux tournant autour de la mort du mari et de sa pseudo révélation. Mais "Rois et reine" contient des scènes d'une émotion inouïe qui rachètent tout - comme la visite finale dans le musée.
En ce qui concerne la polémique avec M. Denicourt, j'avoue que je suis assez perplexe, car même si le personnage joué par E. Devos n'est pas manichéen et donc ne ressort pas indemne, cela reste un magnifique portrait de femme, dans sa dualité et son déchirement. Malgré la tonalité critique, cette source d'inspiration reste un très bel hommage ; de plus la perte de plusieurs êtres chers au sein d'une même famille n'est hélas pas l'apanage d'une seule personne. l'inspiration n'est pas forcément un pillage de vie privée et elle aurait peut-être du en tirer une certaine fierté...
Les personnages sont complexes, difficiles à cerner et c'est ce qui fait la force de l'oeuvre de Depleschin un des cinéastes français les plus précieux qui soient.
Vive le fantastique italien....
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kalingo
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Message par kalingo »

DPG a écrit :J'avoue que j'ai bp de mal qd meme avec le choix de Despleschin de piller la vie de son ex... :roll:
cette polémique est tout de même un grand moment de n'importe quoi en plastique, un échauffement du microcosme parisien qui aimerait devenir gros comme un scandale mais qui devrait dégonfler assez vite.

comme l'a expliqué technikart qui a fait un papier là-dessus, sans l'écho des médias l'allusion serait passée inaperçue pour tout le monde tant elle ne concerne que le petit cercle des proches. et après quoi ? pour un Despleschin voué aux gémonies, combien d'autres s'inspirant de leurs proches ? il faudrait breveter l'inspiration maintenant ?
DPG
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Message par DPG »

En mm tps pour etre honnete, je ne serais pas plus allé voir ce film sans cette histoire si ça peut te / vous rassurer :wink:
"J'ai essayé de me suicider en sautant du haut de mon égo. J'ai pas encore atteri... "
Superfly
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Message par Superfly »

Battosai a écrit :Sinon je viens de voir que le film a remporté le prestigieux prix louis delluc.
T'es plus cédible là .. prestigieux... allons allons :D
diesel
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Message par diesel »

Et Denicourt n'est surement pas la seule femme au monde dont le compagnon est mort et dont le père est mort d'un cancer. Et franchement, au vu du grand film livré par Desplechin, je m'en fous que Denicourt soit pas contente.
Desplechin arrive en un film à réconcilier cinéma d'auteur et cinéma grand public. Balèse. A voir absolument.
nick
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Message par nick »

Bon, comme j'ai un vague lien de parenté avec Marianne Denicourt, je manque un peu de distance. :?
xymox
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Message par xymox »

Ce dernier film de Desplechin est très intéressant -tout a été dit dans les nombreux articles de presse, on a même pu lire des journalistes le comparant à Hitchcock ou Bergman-, mais on reste très loin du niveau de ses premiers films. Cet auteur voudrait-il s'ouvrir à un plus large public ? Esther Kahn a été un premier tournant dans cette démocratisation, j'espérais que c'était une parenthèse.
Les critiques sont dithyrambiques, certes, mais la bande à Desplechin n'a plus la même fraîcheur qu'à ses débuts en 1991 avec la Vie des Morts. Dommage qu'Emmanuel Salinger ne fasse plus partie de la famille.
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