Après le suicide de son producteur, arrêt du tournage de "L'Homme de Londres"
LE MONDE | 15.03.05 | 17h38
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Malgré la disparition d'Humbert Balsan, le 10 février, la plupart des films en cours de production au sein de la société qu'il avait fondée, Ognon Pictures, devraient voir le jour.
La disparition d'un producteur français parmi les plus audacieux, Humbert Balsan, qui s'est suicidé le 10 février, aura des conséquences funestes au moins pour l'un des films qu'il avait mis en chantier. Aventurier, il savait miser sur le talent d'un réalisateur alors même que personne d'autre ne souhaitait investir dans un projet. "Humbert Balsan n'avait jamais tout le financement d'un film quand il s'engageait. Il essayait de régler les problèmes au fur et à mesure", déclarent ses avocats depuis quinze ans, Roland Rappaport et Claire Hocquet.
De manière souvent acrobatique, il a financé Intervention divine, d'Elia Suleiman, et parié pendant des années sur Youssef Chahine ou Sandrine Veysset. Son rôle d'homme-orchestre fait déjà défaut puisque le tournage d'un film qu'il a soutenu à bout de bras, L'Homme de Londres, a été arrêté jeudi 10 mars.
Au cours de la première réunion entre tous les partenaires audiovisuels et financiers des films en cours de réalisation, les représentants d'Ognon Pictures, la société de production de Balsan, ont indiqué qu'ils souhaitaient passer la main pour ce long métrage du Hongrois Béla Tarr, tourné à Bastia (Le Monde du 2 mars). Cette adaptation d'un roman de Simenon, au budget exceptionnellement élevé pour un film d'auteur (près de 5 millions d'euros), devait être financée par des partenaires hongrois, britannique, allemand et Arte France.
Plus que le montage financier compliqué, c'est, semble-t-il, l'intransigeance du réalisateur qui a aggravé l'affaire. Marin Karmitz a refusé de reprendre la production, qui a ensuite été proposée aux partenaires hongrois, dont l'équivalent du Centre national de la cinématographie a déjà investi 1 million d'euros dans ce projet. Jeudi 10 mars, le directeur de ce centre a indiqué par courrier qu'il préférait jeter l'éponge, parce que Béla Tarr n'envisageait aucune concession dans son tournage, commencé il y a trois semaines, mais déjà retardé par des intempéries et des coupures d'électricité. Le cinéaste a en outre refusé de signer tout engagement à ne pas dépasser l'enveloppe financière prévue. Si bien que depuis le 10 mars le film a été officiellement arrêté.
Dans la ville corse, les techniciens démontent rail après rail le chemin de fer posé sur la chaussée. Dans deux semaines, il ne devrait plus rien rester de la gare installée sur le vieux port. Les camions de matériel s'en vont, et déjà une partie des techniciens est rentrée en Hongrie. "Depuis quinze jours, le tournage était sous perfusion, explique Jean-Patrick Costantini, le producteur exécutif basé en Corse. La situation se dégradait, et chacun a plutôt essayé de sauver sa peau. Nous nous sommes battus, en hommage à Balsan, mais ce film est devenu un véritable gâchis financier et humain."
D'AUTRES PROJETS EN COURS
"C'est un suicide artistique de la part de Béla Tarr", déplore un coproducteur. Le Centre national du cinéma (CNC) tout comme la chaîne Arte (directement impliquée dans le financement de cinq films d'Ognon Pictures) ont tenté, en vain, de sauver ce film. A la mairie de Bastia, le principal souci est désormais "la remise en état du domaine public avant fin avril", conformément au contrat signé avec la production. Béla Tarr n'a pas souhaité s'exprimer.
En revanche, l'autre long métrage en cours de tournage chez Ognon Pictures, Un ami parfait, de Francis Girod, devrait voir le jour. Humbert Balsan était d'ailleurs passé voir l'équipe à Thonon (Haute-Savoie) quelques jours avant sa mort. Les prochains plans doivent être tournés prochainement à Annecy, Paris, puis Biarritz.
Les autres films seront bientôt terminés : Il sera une fois, de Sandrine Veysset, est en cours de montage ; Travaux, de Brigitte Rouan, en phase de mixage, tout comme Manderlay, de Lars von Trier, qui devrait être présenté au Festival de Cannes ; L'Intrus, de Claire Denis, déjà présenté à la Mostra de Venise, doit sortir en France le 4 mai.
D'autres longs métrages étaient en gestation. Par exemple un projet de Mia Hanse-Love, Je viendrai seul, pour lequel Humbert Balsan semblait très emballé, vient de recevoir l'avance sur recettes le 10 mars. Le producteur cherchait également à financer Territoire palestinien, grenades et myrrhes, de Najjar Najwa, Baumettes, de Gabriel Julien-Lafférière, ou Assieds-toi à ma table, de Stanislas Popovic.
L'hypothèse d'un dépôt de bilan d'Ognon Pictures, dont la gérante est Donna Balsan, l'épouse du producteur défunt, a été rapidement écartée. Les contrats avec les cinéastes et les financiers courent toujours. De même, la structure de distribution de films d'auteurs, créée avec Paulo Branco et Gilles Sandoz, Pirates, continue son activité. Selon Me Rappaport, Ognon Pictures doit exploiter davantage son catalogue, fort d'une quarantaine de titres, pour faire face à ses dettes et ses créances. Dans ce droit-fil, la diffusion du film de Yolande Moreau Quand la mer monte, récemment distingué par deux Césars, est envisagée sur France Télévisions.
Bella Tarr s'embourbe!
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Wouah c'est pas bon tout ca... Au'un film soit arrete au moment du debut du trournage ce doit etre excessivement difficile mais arreter un film en tournage doit etre affreusement difficile pour un cineaste (cf. recemment Terry Gilliam).
Bela Tarr a voulu jouer l'auteur integre jusau'au bout c'est louable mais en meme temps suicidaire. Dommage je l'attendais ce film...
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Mon avatar : Jacek Yerka, dessinateur de génie.
"Mais qu'importe, que le vent m'emporte, nourrir les bêtes et les cloportes. Ce sera bien là de toute une vie, le seul contrat bien rempli." Mano Solo
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