Le notti bianche / Les nuits blanches (Luchino Visconti 1957)

Modérateurs : Karen, savoy1, DeVilDead Team

Répondre
romain2
Messages : 484
Enregistré le : ven. avr. 30, 2004 12:33 pm
Contact :

Le notti bianche / Les nuits blanches (Luchino Visconti 1957)

Message par romain2 »

Vient de sortir chez criterion, cela a l'ai bien.

http://www.criterionco.com/asp/release. ... on=feature

Manolito toi le spécialiste de visconti tu en penses quoi?
Manolito
Site Admin
Messages : 21654
Enregistré le : ven. avr. 30, 2004 2:17 am

Message par Manolito »

Un Visconti assez à part. Pas le meilleur, mais tout de même un bon Visconti. Celui-ci venait de connaître son premier gros succès commercial avec "Senso" (oeuvre de commande) et, pour son film suivant, il choisit une nouvelle de Dostoievski et décide que il sera produit en "coopérative" par les créateurs du film (scénariste, acteurx...). Superbe décor, magnifique photo, séquences inoubliables (la fin...) pour un drame à l'ambiance intimiste qui mérite largement le coup d'oeil... même si ce n'est ni Le guépard, ni Mort à Venise.

Il raconte l'histoire d'un jeune employé (Marcello Mastroianni) qui s'éprend de sa voisine (Maria Schell), mais celle-ci est amoureuse d'un homme qui est parti il y a plusieurs années et a promis qu'il reviendrait la chercher (Jean Marais). L'employé veut prouver à la jeune femme que son attente est irréaliste...
romain2
Messages : 484
Enregistré le : ven. avr. 30, 2004 12:33 pm
Contact :

Message par romain2 »

Merci, je savais que tu répondrais prestement :wink:
cela confirme ma première impression, ce film a l'air bien.
Manolito
Site Admin
Messages : 21654
Enregistré le : ven. avr. 30, 2004 2:17 am

Re: le notti bianche (visconti 1957)

Message par Manolito »

Vu sur le forum dvdclassik : annoncé en dvd français chez Carlotta dans une belle édition :

Image
Manolito
Site Admin
Messages : 21654
Enregistré le : ven. avr. 30, 2004 2:17 am

Re: Le notti bianche / Les nuits blanches (Luchino Visconti 1957)

Message par Manolito »

Après le gros succès de "Senso", Visconti a les mains libres et produit en coopérative avec ses collaborateurs un projet totalement de son choix, qu'il maîtrise totalement - par opposition à une commande comme "Bellissima" ou un film de gros studio comme "Senso".

Ce sera "Nuits blanches", adaptation de la nouvelle du même nom de Dostoievski (nouvelle qui sera ensuite adaptée au cinéma par Bresson, puis récemment par James Gray avec "Two Lovers" - la jaquette du dvd français met ainsi en exergue une phrase de James Gray déclarant son admiration du métrage de Visconti...).

A partir des années 50, Visconti va s'illustrer comme un maître multi-champs, qui lance les carrières non seulement d'acteurs, mais aussi de techniciens majeurs du cinéma italien. Ici, il retrouve certains de ses collaborateurs déjà habituels, comme le costumier Piero Tosi, le monteur Mario Serandrei, la scénariste Suso Cecchi D'Amico.

Mais il travaille aussi pour la première fois avec le jeune chef-opérateur Giuseppe Rotunno qui après ce relativement petit film, va être entraîner par Visconti sur des projets beaucoup plus ambitieux et devenir le chef-opérateur le plus prestigieux du cinéma italien dans les années 60-70.

Autre jeune talent qui travaille ici pour la première fois avec Visconti, le décorateur Mario Garbuglia, qui va devenir un pilier artistique fondamental de son équipe dans tous ses projets à venir.

C'est aussi la première des quelques collaborations de Visconti avec le compositeur Nino Rota, qui travaille alors déjà avec Fellini. En 1957, Rota est un compositeur bien installé, faisant des musiques de films régulièrement depuis la fin des années 30.

Pour tenir le rôle principal, celui du "rêveur" des nuits blanches, Visconti recrute Marcello Mastrioanni. Ce dernier, alors jeune trentenaire, n'est pas encore LE visage du cinéma italien qu'il deviendra avec "La Dolce Vita" ; mais il a déjà une petite carrière de cinéma assez variée. Visconti l'a formé dans une école de théâtre où il enseigne (comme il le fera pour d'autres comédiens de cette génération, comme Vittorio Gassman) ; et il lui offre son premier grand rôle avec "Nuits blanches", lançant la carrière de cette figure majeure du cinéma italien de l'après-guerre. Nous verrons que ce n'est pas le premier des jeunes acteurs européens à être propulser par Visconti, en particulier dans les années 60...

Pour le rôle principal féminin, il recrute Maria Schell, jeune actrice autrichienne dont la douce beauté en fait déjà une vedette du cinéma européen, en particulier en France. Dans les années qui suivent, elle aura même une petite carrière à Hollywood, avant de connaître une filmographie en dents de scie, où elle joue aussi bien chez Franco que dans le "Superman" de Donner. Une certaine idée du grand écart !

La troisième vedette du métrage est Jean Marais, ami de Visconti depuis ses années françaises au tournant des années 40.

On retrouve aussi Clara Caramai, quinze ans après "Les amants diaboliques", dans le rôle d'une prostituée pathétique.

Dans une ville portuaire anonyme, un jeune employé croise le soir une fille étrangère. Ils se revoient le lendemain, et alors qu'il s'éprend d'elle, celle-ci lui révèle que son coeur est pris. Elle est amoureuse d'un homme qui est parti il y a un an et il lui a juré un amour fidèle, la suppliant de patienter jusqu'à son retour. Elle attend depuis son retour au même endroit, tous les soirs...

Film plutôt court pour du Visconti (1h44), "Les nuits blanches" traite donc un sujet intimiste, un conte d'éducation sentimentale à l'ambiance de rêve nocturne, entretenue par le fait que tout est tourné en studio, dans un décor complètement fabriqué, reconstituant un quartier de ville imaginaire. La magie du temps de la nuit est rendu avec délicatesse par Visconti et ses collaborateurs, avec des personnages opposés aux habituels caractères extrême qu'on croise dans son cinéma.

Natalia et Mario ne sont pas des hypersensibles hurlants, mais des discrets, des fragiles, des personnages doux et attachants, et "Nuits blanches" réussit parfaitement à tracer leurs portraits tout en finesse, porté par une musique superbe de Rota. Si "Nuits blanches" est un film plus discret, plus "mineur" dans sa forme qu'un 'Senso" éclatant, si il est inhabituel dans la filmographie viscontienne, il est pourtant totalement maîtrisé et réussi, avec une direction artistique et une photographie époustouflantes, et deux excellents jeunes comédiens dont nous suivons la douce errance nocturne.

Si il n'a pas autant marqué la critique et les générations de cinéastes à venir que "Senso" par exemple, "Les nuits blanches" a pourtant ses admirateurs. Outre James Gray, il faut citer Jacques Demy qui mentionne "Nuits blanches" dans "Les parapluies de Cherbourg", dont le dénouement lui aussi cruel se déroule dans le décor d'une station essence Esso sous la neige, très nettement inspiré de "Nuits Blanches", film dont Demy a totalement reconnu l'influence sur son travail.

"Nuits blanches" existe en bluray en Italie et en Espagne, mais sans options françaises ou anglaises.

Je me suis donc rabattu sur le DVD français carlotta qu'on trouve à des prix dérisoires. Joli petit dvd au digipack conçu avec goût et, on le sent, un réel respect de l'oeuvre. La copie 1.66 16/9 noir et blanc est tout simplement magnifique, de la SD irréprochable rendant totalement justice au travail artistique ultra soigné effectué sur ce métrage. La bande son italienne mono est un peu plus inégale, mais bon, pour un film des années 50, c'est tout de même excellent...

Image
Répondre