Valerio Zurlini est un realisateur italien un peu oublié en France. La ressortie de "La fille à la valise" cet été avait permis de sortir son nom des livres, en attendant un DVD à venir, on peut combler son attente en decouvrant ce film sorti dans la collection Delon.
Delon producteur a plutot choisi des projets viables commercialement, polars en tête, ce qui lui laissait le champ libre pour tourner des films plus orientés "auteurs" à côté de ça. Mais qd un film lui tenait à coeur, il savait s'investir et se lancer même si rien n'assurait la réussite. C'est le cas de ce drame de 1972. Initialement prévu pr Mastroianni, ce dernier etant indisponible Zurlini a contacté Delon, qui, entousiaste, décida donc de co-produire le film. Les deux ne se quittèrent cependant pas ds les meilleurs termes, Zurlini contestant notamment le montage français imposé par Delon, de 20 mn plus court au sien (invisible à l'heure actuelle).
L'histoire : Un nouvel instituteur est nommé à Rimini. A peine arrivé, il ne tarde pas à mener une vie dissolue. Vivant encore avec sa femme, bien qu'ils soient séparés, il est immediatement attiré par une de ses élèves.
Rimini est une belle ville de la côte Nord italienne, à mi chemin entre Ancone et Venise. C'est la ville où Fellini a trainé sa flemme durant des années, et à laquelle il rendra hommage à travers ses "Vitelloni". C'est le cadre atypique de ce "Professeur". Nos personnages sont des trentenaires oisifs, la plupart dans une reussite materielle, qui camoufle tant bien que mal un vide affectif. C'est aussi le cas de ce Daniele Dominici, professeur qui debarque en ville. Immediatement attiré par la tristesse mélancolique de la jeune Vanina, il va tout faire pr la seduire, même si elle est déjà avec Gerardo, compagnon de pocker de Daniele.
"Le professeur" est avant tout un film de personnages, un portrait croisé d'ames à la dérive, un peu à la manière d'un "L'important c'est d'aimer" de Zulawski, j'ai aussi pensé à "Comme un torrent" pour certains thèmes et rapports humains. Heureusement, pour camper toute cette armada de personnages, Zurlini a su reunir un casting exceptionnel.
Delon bien sur en tête, dans un rôle qui rendra perplexe ses détracteurs, il livre ici une superbe composition, tout en non dit, en retenue, genial en homme perdu avec sa barbe de trois jours. On aurait pu craindre que la jeune fille qui lui tient tête se fasse "bouffer" mais ce n'est nullement le cas et la magnifique Sonia Petrovna s'en sort avec les honneurs en plus d'être divinement belle.
Etre belle n'est pas valable que pour elle car on retrouve la grande Lea Massari dans le role de la femme de Delon et la star Alida Valli dans un rôle cependant mineur.
Le casting masculin n'est pas en reste, on retrouve ainsi Renato Salvatori, qui jouera de nombreuses fois avec Delon tt au long de sa vie, leur collaboration la plus marquante restant "Rocco et ses frères". Giancarlo Giannini est un interessant Giorgio (en plus d'être le sosie du joueur de foot Alberto Gilardino !

Ce qui frappe dans la mise en images de Zurlini, c'est qu'elle semble brasser de multiples influences, mais tout en etant toute personelle. Certaines scènes rappellent du Fellini, d'autres des films américains, parfois français, mais le tout forme un ensemble très coherent, envoutant, qui plus est porté par une jolie partition musicale. On se laisse donc porter, bercer par la profonde mélancolie que dégage le film. On sait pas trop où vont atterir ces personnages, mais on a envie d'y aller avec eux. Une oeuvre à part en tt cas, une petite rareté que l'on a la chance de trouver à 5€ en DVD sur Cdiscount, si ça vous tente de voir un Delon atypique, je ne peux que vous le conseiller.

