Présenté au festival d'Avoriaz 89, Parents s'inscrit parfaitement dans la droite lignée de films tels que Paperhouse et Society auquels il... s'apparentent beaucoup.

Si Brian Yuzna nous présentait dans Society une critique acerbe de la bourgeoisie à travers son jeune héros perdu entre rêves et réalité trop atroce pour y croire alors que Bernard Rose dans Paperhouse nous invitait à entrer dans l'univers tortueux et torturé d'une adolescente prise elle aussi entre ses cauchemars et une dure réalité, Parents nous convie dans le monde d'un jeune garçon introverti soupçonnant ses parents d'être cannibales sans jamais que le spectateur puisse savoir s'il s'agit d'une projection de l'esprit instable d'un garçonnet mal dans sa peau ou de l'atroce vérité.
Parents est une critique acerbe et vitriolée de la société des années 50. C'est un univers de pacotille où seule l'apparence compte. Il faut briller, être le meilleur en tout aux yeux des voisins. La plus belle maison, la plus belle voiture la meilleure éducation... c'est une époque de bonheur, les golden fifties, où tout se basait sur les à priori et les conventions, où on se devait d'afficher un beau sourire en toutes circonstances, être correct et sans cesse à la mode. Peu importe le reste. Mais voilà, Balaban va justement avec Parents aller voir ce fameux reste et gratter sous la couche de vernis pour mieux égratigner ces couples trop parfaits.
Un peu à la manière de Lynch dans Blue velvet, il va prendre un plaisir vicieux et macabre à prouver que derrière cette joliesse se cache des choses peu honorables et tout à fait horribles.
Toute la force de Parents réside dans le fait que Balaban ne montre jamais rien mais suggère les pires atrocités entrainant le spectateur dans un tourbillon glauque et malsain qui longtemps va se demander si tout cela n'est pas le fruit de l'esprit malade d'une jeune garçon introverti, imaginant les pires choses sur ses parents.
Balaban prend alors un plaisir malin à enchainer rêves et réalité, nous faisant par la même partager les cauchemars de Michael. Cela nous vaut quelques scénes parfois surréalistes et viscéralementt effroyables comme celles où il s'imagine plonger dans son lit se transformant en une mer de sang dans laquelle il se noit ou celle où il surprend ses parents entrain de faire l'amour recouverts de sang.
Mais la peur dans Parents provient aussi du quotidien le plus banal ne serait ce que dans le portrait à la limite caricatural des parents de Danny. Le père au visage débonnaire à la fois drôle et terrifiant se complait à raconter des histoires horribles à son fils avant de se transformer en véritable papa gâteau. La mère est un véritable cordon bleu enjouée et douce à l'excés, virevoltant dans ses robes à fleurs. Chaque repas devient un rituel où les parents décident de ce qu'il y a de meilleur pour leur fils, choisisse sa nourriture, mijotent d'excellentes viandes qu'il refuse à chaque fois soupçonnant l'inimaginable.
Balaban parvient par le biais d'une réalisation imaginative et efficace accompagnée d'une BO angoissante à rendre terrifiante la seule image d'un steack ou d'une saucisse, à provoquer chez le spectateur un profond dégout. De la simple image d'un morceau de viande nait alors une peur quasi viscérale.
Toute l'horreur surgira dans la séquence finale qui vient contre-balancer le coté plutôt calme du reste du film où Balaban s'est surtout concentré à construire une atmosphère de malaise dense.
C'est donc dans une effusion de sang et de folie que se terminera ce voyage au coeur de l'horreur où la vérité éclatera, voyage dont la seule issue sera la mort jusqu'au final ouvert sur une terrible question en suspens...
Une fois de plus, Balaban prouve que sous l'aspect noble et bien sous toute couture se cache en fait bien souvent des monstres bien plus pire encore que ceux de nos contes.
Parents en cela pourrait être vu comme un conte horrifique qui pourrait débuter par "Il était une fois un jeune garçon...".
Balaban a réalisé un film étrange, qui derrière son aspect rutilant cache un film réellement effrayant magnifiquement bien interprété par un Randy Quaid patibulaire et inquiètant à souhait, une Mary Beth Hurt excellente en femme rétro bonne sous tout rapport et surtout le jeune Bryan Madorsky dont le visage si particulier épouse à merveille le rôle de Danny. Une merveille d'humour décapant et horrifiant à découvrir d'urgence.
On est jamais assez raffiné ni assez bien habillé pour cuisiner de la chair humaine.


Le corbeau carnivore!