L'homme blessé - 1983 - Patrice Chéreau

[Manolito]

Henri, un adolescent, rencontre Jean dans les toilettes d'une gare. Jean embrasse Henri, qui s'éprend aussitôt de lui. Henri va alors se couper de son milieu famillial pour retrouver l'homme qu 'il aime. Mais celui-ci est un paumé qui l'entraîne dans des combines...

Avec "L'homme blessé", Patrice Chéreau trace le portrait d'une vie nocturne pour le moins interlope. Prostitution masculine dans les toilettes des gares, parking squattés par des couples échangistes, faux night club - vrais bordels, fête peuplée de forains ambigues...

Tout y passe dans un festival qui se complait totalement dans le glauque, le putride. Jean, plus ou moins flic de profession, se drogue, ne se lave pas, se prostitue et met sur le trottoir des jeunes gens qu'il séduit. Henri va le poursuivre, tenter de l'imiter, et ainsi provoquer sa propre perte...

L'ambiance "Film Noir" de "L'homme blessé" est pour le moins réussi. Je me demande d'ailleurs où il a été tourné ? Pas à Paris, il me semble, mais je n'en suis pas sur... Les acteurs sont assez formidables, particulièrement le très jeune Jean-Hugues Anglade et son amant Vittorio Mezzogiorno. On remarque une apparition de Claude Berri en homosexuel libidineux pour le moins inattendu !

Maintenant, le scénario manque un peu de rigueur. On met un certain temps à comprendre ou Chéreau aimerait en venir, tant il semble plus préoccupé de nous faire visiter les recoins urbains les plus sordides que de nous raconter son histoire qui s'arrête et reprend un peu dans tous les sens. Le film finit par paraître trop long. Mais attachant quand même...

Vu sur Ciné Cinéma Auteur dans une belle copie 1.66, vf mono d'origine. Signalétique "-12" mais hors de l'écran et du cadre 1.77. Sans doute le même télécinéma que le DVD Studiocanal disponible en France...

[Jeremie]

Très fort, très glauque. Chereau balotte son jeune homosexuel dans les lieux les plus sales et les plus sinistres qui soient, le faisait decouvrir un amour violent, passionel, teinté de frustration. Excellents acteurs (mention special à Vittorio Mezzogiorno en voyou viril et ambigu) et un fin assez osée pour l'époque. Grand film

[eric draven]

Selectionné à Cannes en 1983 où il recu l'oscar du meilleur scénario, L'homme blessé est un long et douloureux voyage au coeur de la nuit, celui d'un jeune homme de 18 ans qui se cherche, tente de trouver son identité sexuelle en plongeant dans l'enfer des nuits gays et des lieux de drague sordides homo.

Issu d'un milieu petit bourgeois, Henri, 18 ans, découvre dans une gare sa 1ere experience homosexuelle avec Jean, prince déchu et violent, à tarvers un viol symbolique, celui d'un baiser. Jean va de plus en plus hanter Henri qu'il cherche au coeur de la nuit, découvrant les lieux les plus sordides de drague: toilettes de gare- ah la gare de l'Est !!!!-, aire de drague... prostitution... Lorsqu'il le retrouve enfin, un jeu cruel va naitre entre eux, fait d'humiliations, de trahisons et de violence toujours empreint d'un nuage d'amour aussi illusoire soit il.

L'Homme blessé c'est le parcours de ce jeune garcon qui à travers Henri se cherche et se perd, courant aprés un rêve illusoire, un amour utopique jusqu'à s'identifier à cet amant violent et petite frappe déchue.
Henri devient Jean, endosse ses vetements et hante les lieux où il traine.

Chereau nous fait alors découvrir l'autre face de notre société si conventionnelle et rassurante, celle de la lumière et de l'Ordre. C'est l'ombre des souterrains glauques où on s'agglutine en masse pour quelques heures de sexe perdu et eperdu, les bordels homos, les toilettes publiques, véritables labyrinthes du sexe, les sous-sol, les baisodromes nocturnes gay.. C'est la violence, la brutalité des rapports et des sentiments, l'arnaque, la prostitution, la nuit...

A ce titre, L'homme blessé est un voyage sans retour au fond du desespoir, la vision brute et sans édulcorant d'un milieu individuel et desespéré.

L'Homme blessé est une quête, celle de l'amour mais un amour impossible dans un univers de permissivité sexuelle totale où tout se monnaye. Mais en dehors de quelques échanges furtifs et toujours menacés, ces moments de plaisirs sexuels jamais amoureux ne peuvent que trouver echo que dans la mort.
C'est l'annihilation de toute relation humaine et toute forme d'amour, l'échec des rapport humains quelqu'ils soient. Qu'on soit dans la lumière et le rassurant ou dans la nuit et la marginalité, l'amour est impossible voire totalement utopique. L'amour n'existe pas, n'existe que le sexe sale et la mort.

Sombre, pessimiste, glauque, violent, le film de Chereau est un constat tragique parsemé de scénes intenses et magnifiques: les scenes de sexe, de drague dans les toilettes de gares, veritable usine où on passe à la chaine, pissotières... jusqu'a la violente altercation entre Henri et un vieux medecin homo qui fera comprendre à Henri lors d'une hallucinante scene de fellation ses sentiments face à Jean et l'univers dans lequel il evolue.

Mais qui pourra ou pourait contrebalancer la fascination du jeune homme pour ce voyou... le destin est ineluctable et trouvera fin dans ce qu'il y a de plus désolant au monde, un Eros center gay du sexe et de la perversion, pitoyable où une fois de plus Eros s'allie à Thanatos.

Jean Hughes Anglade pour son premier grand role est stupéfiant de credibilté, un role fort et intense qu'il endosse etonnament, un Jean Hughes dont on peut admirer le kiki sous toutes les coutures .. entourés d'une nuée de mignons desespérés.. OUIIIIIIIIIIIIIIIIIII!!

Un film intense que j'aime tout aussi intensement.. un vrai chef d'oeuvre du film gay et du sexe comme j'aime.

Le corbeau blessé!

[Maxcrom]

Vu à l'occasion sur le beau Zone 2 fr, 2 disques , film VF mono & 5.1 , avec une palanquée d'interviews de 2004 et 1983 trés interessantes.

Le meilleur Chéreau qu'il m'ait été donné de voir. Une histoire brûlante de désir qui raconte avant tout la passion dévorante d'amour d'un homme. Un Paris en nocturne , insalubre , pouilleux qui grouille d'ambiguité et suinte le malsain dans chaque interstice du cadre. Il se dégage une atmosphére délétére , poisseuse, peu coutumiére dans le ciné francais. La photo est à ce titre trés belle, nimbée de glauque et travaillée avec soin, apportant un cachet indéniable aux déambulation pulsionnelles de Anglades. Chéreau, homme de théatre , s'en sort trés bien avec le registre du cinéma, même si parfois on voit clairement des réminescences génantes, de sa premiére passion, dans le traitement de plusieurs scénes.

Les acteurs sont à l'avenant , avec un Anglade possédé par son rôle, completement assujeti à son désir, perdu dans ses sentiments dont il ne ressortira pas indemne .

Voila, une oeuvre forte, brutale, jamais vulgaire ou bassement complaisante qui traite avant tout de passion.