On retrouve un collège dans les années 60 et sa discipline stricte, un univers de garçons où la virilité est de mise.
Kees a 15 ans, garçon solitaire et secret dont la passion est la lecture et les barres asymetriques sur lesquelles il aime passer son temps, suspendu tel un oiseau. Il s'y repose comme cet oiseau qu'il aimerait être, voltigeant, image d'une liberté qu'il aimerait, celle de s'envoler et d'être libre d'aimer Charel, son viril camarade de classe orgueilleux, fier et arrogant.
Il existe entre eux l'ambiguité d'une relation claire-obscure, cette notion d'amour/haine. Il doit en effet subir les humiliations de Charel, incapable d'exprimer ses sentiments et d'interpreter ceux de Kees mais le trouble est présent des deux cotés, surnois, celui qu'on tente de dissimuler mais qu'un rien semble trahir.
Si pour ses sentiments sont réels, ne s'agit il pas d'un cruel et dangereux jeu pervers quant à Charel. Krom joue sans cesse sur cette ambiguité alors que Charell devient une véritable obsession pour Kees, une obsession qu'il controle de moins en moins.
Outre les humiliations de Charel, Kees doit également subir celles de ses camarades de classe jouant de sa difference. Surpris entrain de se masturber dans les toilettes, il y est enfermé avant d'être entièrement déshabillé


Humilié à son tour par le prof pour avoir declenché un tel jeu, Charel finira par accepter l'invitation de Kees à passer chez lui un soir sous pretexte de faire ses devoirs.
Invité dans sa chambre, Charel semble enfin laisser parler ses sentiments, s'interesser à l'univers de Kees et sa passion pour les barres pour mieux retourner la situation à son avantage et humilier une dernière fois le garçon.
Est ce par peur de franchir enfin la barrière, peur de la soudaine clareté des sentiments ou tout n'était il qu'un terrible jeu?
C'est alors toute la violence de Charel qui explose. Il frappe et frappe encore, le sang coule, la brutalité pour la virilité, la boxe sport d'homme contre les barres sport de femmelette, le rejet amer de la difference dans ce qu'il a de plus abject, laissant giser Kees sur le sol avant de claquer la porte. To play or to die.. On a joué, creve maintenant!
Des lors, Kees va lentement sombrer dans la folie, obsédé par Charel, replié sur lui même tel l'oiseau blessé. Au paroxysme de l'alienation, il se masturbera frenetiquement au milieu du salon

Alors qu'il éjacule, des rires résonnent, la fenetre explose, un ballon rebondit dans la pièce, un ballon qui n'est autre que la tête de Charel qui rit et le nargue, réalité et cauchemar se confondent dans une horreur sans nom.
Kees a atteint le point de non retour basculant dans une autre dimension, celle du suicide interieur, de l'auto-destruction. Quelques tours de barre et l'oiseau s'envole, le corps vole enfin mais il ne fait pourtant que dégringoler l'escalier...
Au delà de l'amour et de la difference, To play or to die est avant tout un film sur le suicide interieur et l'auto-destruction d'un être different et fragile que la vie désagrège petit à petit.
Krom met savamment en place les regles d'un jeu pervers où l'ambiguité des rôles est le maître mot, ces règles qui nous font encore plus nous perdre au jeu cruel de l'amour et de la haine.
Kees, déchiré par son amour pour Charel ne cesse de lui envoyer des signaux de detresse, parfois si anodins, qu'il ne sait déchiffrer ou ne veut dechiffrer ce qui le destabilise et le rend incontrolable dans ses réactions, passant de la gentillesse à la cruauté, la honte et l'humiliation, sans cesse partagé entre compassion et defiance.
To play or to die c'est aussi ca, l'incomprehension du coeur et de ses pulsions. Par peur, lacheté ou tout simplement par cette incomprehension Charel a pris tout ca pour un jeu dont il a cru sortir vainqueur.
Krom parvient à balayer ici toute une palette d'emotions et de contraste faisant de son film un réel drame psychologique aux limites du fantastique.
A l'image de son héros, Krom fait en effet sombrer son film dans le plus pur fantastique, symbole de la perte de conscience de Kees d'avec la réalité, image de sa lente folie et toute l'horreur qui l'accompagne. L'escalier final n'est jamais que l'escalier de sa vie qu'il déboule, qui s'effondre et se brise avant de le conduire vers la mort.
Magnifié par un beau N/B, To play or to die, outre ses quelques scenes plutot osées et ses plans de nudité frontale



Frank Rom en quelques 50mn a signé là un petit chef d'oeuvre du film gay fantastique, sombre, cruel, un drame psychologique tragique qui ne laissera pas indifferent, certaines séquences comme l'humiliation de Kees dans les vestiaires, le violent et déchirant affrontement final entre les deux garçons et l'auto-destruction de Kees possedant un pouvoir emotionnel etonnant.
Le corbeau qui adore jouer avec de gros oiseaux!

