Un sénateur est assassiné sur le pas de sa porte. La police arrête sur les lieux un certain Carlos Valdez. Le jeune homme est bientôt jugé puis condamné à mort. Persuadé de son innocence malgré le témoignage accablant d'une strip-teaseuse présente au moment du drame, le journaliste Eddie Mills décide de reprendre l'affaire.

Pour une fois, je le reconnais, il m'a un peu surpris le père De Martino. En attaquant son Uomo dagli occhi di ghiaccio, je m'attendais à savourer un petit produit giallesque calibré sur mesure pour le spectateur, avec ses meurtres de jolie donzelles à l’arme blanche, son tueur ganté en imper noir et sa charrette de suspects. Et bien non, L'Uomo dagli occhi di ghiaccio est un suspense relativement classique plutôt tourné vers le film noir, fonctionnant sur une trame toujours porteuse, celle de l’enquête contre la montre visant à innocenter un pauvre bougre condamné à mort (cf. Someone has to shoot the picture me de Frank Pierson, True crime d'Eastwood et The Life of David Gale d’Alan Parker).
Bon, le film ayant été réalisé en pleine vague giallesque et De Martino étant quand même un réalisateur toujours soucieux de ne pas trop s’éloigner de ce qui fonctionne sur le moment, certains aspects de l’intrigue tirent le film vers le giallo. L’identité du tueur demeure ainsi une énigme jusqu’à la toute fin et le film flirte un peu avec le fantastique via l’incorporation dans l’histoire d’un personnage d’astrologue annonçant au héros la mort prochaine de deux personnes de son entourage (lui-même étant déjà menacé de mort par lettre anonyme). Tous ces apports, liés à une enfilade de rebondissements un peu trop soutenue pour être honnête, ancre donc fortement l’ensemble dans l’univers du bon bis rital et, pour le vibrant plaidoyer contre la peine de mort, il faudra donc repasser. Mais, à défaut d’être crédible et d'instaurer une réelle tension dramatique à l'écran, L’Uomo dagli occhi di ghiaccio possède un charme fou lié en grande partie à sa double nationalité. Filmé à Albuquerque, au Nouveau-Mexique (comme une petite partie du futur Consigliori du même Martino), le film multiplie les séquences en extérieurs – sans doute sous la contrainte d'un budget serré – lui conférant une saveur unique : celle d’un film de genre italien coloré à la sauce B movie US. Allant dans le même sens, la distribution est un séduisant mélange de vedettes et troisièmes couteaux du bis transalpin (Antonio Sabato, Barbara Bouchet, Nello Pazzafini) et de solides seconds rôles américains de l’époque (Keenan Wynn, Victor Buono). Même la partition musicale jazz pop de Peppino De Luca possède une couleur particulière, tout autant américaine qu’italienne.
Une excellente petite bande en résumé, et, je me répète un peu, l'un des films les plus originaux de De Martino.