Gloire et décadence de Salo: Hommage à Caterina Boratto

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eric draven
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Gloire et décadence de Salo: Hommage à Caterina Boratto

Message par eric draven »

Chose peu banale car ce soir Eric vous propose une retrospective inhabituelle. Exit les jeunes bimbo boys le temps d'une escapade vers d'autres horizons plus glamour.
Si Proust aimait faire un tour du coté de chez Swan, Eric va de temps à autres visiter les Eternelles, ces déesses italiennes qui ont fait l'âge d'or du cinéma transalpin, ces grâces divines et inacessibles qui s'étalent en N/B en froides voluptés.

Pour ouvrir le bal, celle qui fut l'incarnation de la beauté mystère sous ce port altier, mélant la melancolie à la douceur apaisante de la glace, celle qui incarna la cruauté, personnalisa le fascisme dans tout ce qu'il a de plus innommable, ce fascisme qu'elle connut et qui brisa sa carrière..
Inoubliable dans SALO, le film UNIQUE et ULTIME, l'oeuvre culte d'Eric où elle brille dans la peau de la plus terribles des 4 narratrices: CATERINA BORATTO 8) 8)

Caterina est née à Turin le 15 mars 1915. Si elle suit des études musicales et de chant sous la direction de la célèbre actrice Evelina Paoli, sa vie va soudainement changer d'orientation lorsque le réalisateur Guido Brignone sur les conseils de Evelina la remarque et lui propose le rôle principal de son nouveau film MARCELLA.
Nous sommes en 1937 et les parents de la jeune Caterina agée alors de 22 ans sont réticents à ce projet, ne souhaitant aucunement que leur fille ne devienne actrice.

Nonobstant le refus parental, elle tournera le film malgré tout.

Aussitot remarquée par la Goldwyn Meyer, Caterina enchaine toujours pour Brignone avec VIVERE! aux cotés du tenor Tito Schiapi avec qui elle vivra une romance puis HANNO RAPITO UN UOMO aux cotés de Vittorio De Sica en 1938, film où elle interprète une élégante et frivole princesse russe.

Ebloui par son charme, l'Amérique acclame Caterina qui en fait une de ses nouvelles star hollywoodienne. Elle incarne la beauté altière avec grâce et majestuosité, empreinte de ce voile de détachement qui lui donne cet air de mystère, d'inaccessibilité cachant en fait une femme timide et rêveuse. Ses talents d'actrice n'ont d'égal que son élégance et sa radieuse beauté, sa maturité dissimulant une grande mélancolie que reflète ses yeux bleus pastel.

Caterina incarnera ce type de femmes, illuminant l'écran de cette beauté lumineuse presque froide. Elle signe avec enthousiasme un contrat de 7 ans avec la MGM. Malheureusement, elle ne pourra l'honorer, la guerre toute proche brisant les rêves de Caterina et son envolée vers la gloire.

Quand elle éclate, Caterina doit fuir l'Amérique et se voit contrainte de retourner à Turin. Sa vie va alors devenir un véritable roman prenant des airs de tragédie. Elle tombe eperdumment amoureuse du comte Guidi Di Romena, un heros de guerre qui mourra tragiquement en 1942 lors du bombardement de Turin.

Effondrée, elle va oublier ses souffrances grâce a l'amitié de Vittorio De Sica et en tournant quelques films, pour la plupart des melodrames dont I FIGLI DEL MARCHESE LUCERA, DENTE PER DENTE, ROMANZO DI UN GIOVANE POVERO ou
CAMPO DE FIORI ou elle a pour partenaire l'étoile naissante Anna Magnani.

Mais le destin va de nouveau frapper Caterina en 1944 puisque la guerre va détruire sa famille. Elle perd ses deux frères, un tué lors du massacre de Celofonia, l'autre, partisan, froidement exécuté.
Dans cette Italie fasciste, les Boratto sont dans la ligne de mire et Caterina va devoir fuir pour sauver sa vie. Elle se cache dans une clinique de Turin où elle se remettra lentement de ces drames.

C'est là qu'elle fera la connaissance de son futur mari Armando Ceratto mais leur mariage va vite s'averer être un enfer en ces temps de guerre. Armando et sa famille font en effet partie de la grande famille des partisans et la clinique dont il est le directeur sert de refuge à leurs compagnons de combat, noble choix mais qui met Caterina en danger et ruine surtout la famille Ceratto.

A la fin de la guerre, dans une Italie ravagée, Caterina ne retrouvera plus sa gloire d'antan mais exilée à Rome avec son mari et leur fille Martina, elle tente son retour au cinéma grâce à ses amis comédiens, la gloire hollywoodienne loin derrière elle.
C'est Fellini qui lui offre une 2eme chance en lui proposant deux roles emblematiques en 1963 dans 8 ½ puis en 1965 dans JULIETTE DES ESPRITS.

Caterina va par la suite continuer de tourner mais elle ne parviendra plus jamais à regagner ce que la guerre lui a pris, cette gloire qui lui ouvrait ses portes.

Elle se contente de seconds roles toujours trés distingués comme dans DIABOLIK de Bava où elle interpréte Lady Clark ou LE CHATEAU DU DIABLE de Pollak.

Les années 70 voient ses rôles s'effilocher. On l'apercoit entre autres dans LES RELIGIEUSES DU St ARCHANGE.

En 1975, Pasolini s'octroie les services de 4 grandes actrices des années 30 et 40, la majestueuse et regrettée Elsa De Giorgi, l'académicienne Hélène Surgère et Sonia Saviange, afin d'incarner les terribles narratrice de SALO ET LES 120 JOURS DE SODOME.
Il offre à Caterina l'opportunité d'incarner la plus abominable des 4, la Castelli, véritable ogresse ouvrant le cercle du sang.

Elle est une des narratrices les plus discrètes mais telle une statue de glace, elle veille telle un Cerbère sur les 24 adolescents, une voilette lui écrasant le visage, la rendant encore plus abominable sous ses cheveux blonds tirés.
Caterina y incarne la Peur avec un grand P. Elle est la monstruosité, la cruauté incarnée, se delectant des tortures raffinées qu'elle décrit et récite avec delectation, riant des souffrances endurées, souffrances qui ne sont plus que des murmures indisticts au loin car l'Innommable n'a pas de voix alors ques les jeunes condamnés sont attachés nus a un baquet de chiasse.

Si jadis, elle representa la femme mystère, la femme fière et altière dont la froideur n'avait d'égal que la beauté, la Castelli de Salo est l'extrême incarnation de cette austère froideur.

Par la suite, Caterina va se diriger vers l'operette, le théatre et la television italienne. On la verra encore au cinéma dans LA NUIT DE VARENNES ou LE TUEUR DE LA PLEINE LUNE de Deodato sans oublier son role de sorcière dans LA DIABLESSE de Castellari ou UN CAS D'INNOCENCE avec Brigitte Fossey, John Steiner.

Aujourd'hui agée de 93 ans, une des rares survivantes du casting de Salo, Caterina qui a su garder son coté mystère sous ses rides et ce regard trop bleu vit une retraite sereine à Rome, regardant loin derrière elle ce glorieux passé hollywoodien que la Guerre a trop tot abrégé, mettant fin à ses ambitions et ses espoirs pour surnager dans un cinéma qui ne lui a plus réellement tendu les bras.

Si pour nous elle restera l'implacable et cruelle Castelli dans Salo, n'oublions pas que Caterina fut dans les années 30 la fierté de l'Italie dans les lointaines Ameriques, digne represente glamour de la Femme mystère.

Caterina dans les années 30, froide et lumineuse, aux portes d'Hollywood

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Caterina dans les années 60

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Caterina, cruelle, incarnation de l'innommable dans Salo, MON Salo, la cruelle Castelli..

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La Femme tel que je la venere.. la beauté perverse, la beauté du mal

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Caterina, envoutante, toujours dans SALO, se nourissant de la souffrance humaine

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Meprisante diablesse...

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.. se riant de la mort et de la souffrance.. contant le supplice d'une jeune fille a qui on a cousu une souris vivante dans le vagin et narrant avec delectation le demembrement d'une jeune peronelle apres qu'elle ait déféqué dans la bouche de son bourreau..

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eric draven
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Re: Gloire et décadence de Salo: Hommage à Caterina Boratto

Message par eric draven »

Caterina en 1984 dans Un caso d'innocenza, film où elle cotoie toute une pleiade d'acteurs: Brigitte Fossey, Jonh Steiner, William Berger, Claudio cassinelli, Rada Rassimov ou encore Daniela Poggi!

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Trés dur de trouver les oeuvres que tourna Caterina dans les années 30 et 40..

De ce qu'elle fit par la suite si j'excepte les 2 Fellini 8 1/2 et sa version de Juliette des Esprits que, honte à moi, je n'ai point vu:

- DIABOLIK: ou James Bond vu par Bava, un petit trésor de film d'espionnage trés BD avec une toujours aussi élégante Caterina en Lady Clark divine.

- LE CHATEAU DU DIABLE: Un film que j'ai vu il y a fort longtemps et dont il ne me reste aucune trace.. malheureusement!!

-LES RELIGIEUSES DU ST ARCHANGE: Un des 1er nunsploitation transalpin où Caterina se tapit parmi les soeurs de ce couvent où est envoyée l'heroine prise entre l'autorité de sa mere superieure et le libertinage sexuel lesbien incarnée par sa compagne.. Sage mais beau..

-SALO: aucun commentaire.. mon amour pour salo est au déla des mots et c'est en pages que j'en parle, pas en 3 lignes! Caterina, la cruauté incarnée.

-LA DIABLESSE: Un Castellari que le réalisateur renie aujourd'hui.. une erreur de parcours où Caterina tient le role tres rapide d'une sorcière tandis que la fani ne peut connbaitre des oragsmes que sur une tombe.. Visuellement tres beau, trashy mais completement raté.

-LE TUEUR DE LA PLEINE LUNE: Un Deodato tourné pour la TV où caterina joue la mère de Michael York.. Souvent décrié, j'aime pourtant bien ce petit telefilm que je trouve assez réussi et parfois touchant.
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Re: Gloire et décadence de Salo: Hommage à Caterina Boratto

Message par Superwonderscope »

Si ReteItalia est co-producteur du Tueur de la Pleine Lune, le film n'est cependant pas un telefilm.
Oh really? Well then I'm sure you wouldn't mind giving us a detailed account of exactly how you concocted this miracle glue, would you ?
eric draven
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Re: Gloire et décadence de Salo: Hommage à Caterina Boratto

Message par eric draven »

MON DIEU :shock: !! J'oubliais de citer MON DERNIER AMOUR de Dino Risi en 1978 où Caterina, resplendissante et altière, vole la vedette à la Muti pourtant de 30 ans son ainée..

Elle y est la vieille amante d'un Ugo Tognazzi faraud, vieil acteur qui ne croit plus un jour pouvoir aimer mais s'amourache d'une jeune coquette frivole au detriment de Caterina.

Comedie aigre douce et pathetique sur l'amour, voila un film grincant et plein de tendresse sous ces airs de comedie légère. Caterina y est lumineuse, parvenant à faire de l'ombre a la Muti tant et si bien qu'elle en deviendrait presque la vedette du film.. comme toujours avec Caterina.. La plus fugace de ses apparitions a l'ecran se transformant en rai de lumière.

Et mon analyse abrégée de Salo c'est ici.. en attendant qu'elle ne soit remise en ligne:

viewtopic.php?f=1&t=5427&p=126503#p126503
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