Allez, un thread sur ce film particulièrement baroque commencé par le grand Monte Hellman en 1974, le tournage s’interrompant suite à des desaccords profonds entre Hellman et son producteur Michael Carreras (« Shatter » étant une coproduction entre la Hammer et la Shaw Bros.). Hellman accuse son producteur de vouloir injecter des idées racistes dans le film et de tenter de prendre les rênes du tournage, tandis que Carreras pense son réalisateur trop lent. Hellman s’engueule aussi avec Don Houghton, le scénariste de la chose (on le comprend), et lui fait quitter la production. Le réalisateur est peu après licencié par Carreras, après 3 semaines de tournage sur les 5 prévus, Hellman ayant alors mis en boite la moitié du scenario d’Houghton.
Carreras prend les commandes du tournage, et finit le film en 6 mois, désespérant de pouvoir faire un film de ses rushes et de ceux d’Hellman, tandis qu’il pensait au départ tenir un futur hit (il envisagea même un temps d’écrire une série tv basée sur les personnages du film).
« Shatter » suit les agissements d’un agent double du même nom, incarné par le nonchalant Stuart Whitman. Paumé à Hong-Kong après avoir brillament zigouillé les dirigeants d’une dictature africaine, notre bon Shatter s’embarque dans une suite d’aventures incompréhensibles, avec documents secrets, magouilles avec Peter Cushing, dragouillage de petite masseuse chinoise. En cours de route Shatter se fait un pote fort utile, un maitre des arts martiaux joué par Lung Ti qui grosso modo va faire tout le boulot pour Shatter durant la seconde partie du film en dessoudant tous les méchants venant se mettre au milieu de sa route.
Bon alors attention « Shatter » c’est un trip, faut surtout pas s’attendre à un chef d’œuvre de dépouillement metaphysique à la « The Shooting » ou « Two-Lane Blacktop », c’est ringardos, la musique craint un max, le personnage principal est débile, mais par contre c’est assez drôle par moments, et ca se bat pas mal (enfin pour un non-amateur de film de kung-fu comme moi). Le petit chinois fait de sacrés dégâts, empalant ses adversaires sur des crochets de pécheurs, et Shatter dégomme des types avec un flingue caché dans un appareil photo. Comme le dit amèrement Monte Hellman : « ce film est une merde, ils ont massacrés mes rushes, qui étaient déjà pas glorieux ».A la recherche d’une vision d’auteur, on peut certes rester circonspect devant « Shatter »… Le film reste cependant agreable à regarder, malgré la lenteur de ses circonvolutions et l’absence totale d’enjeux dramatiques.
Vu sur un dvd allemand mixant maladroitement plusieurs copies (c’est particulièrement visible dans les inserts gores). Ca pique les yeux, tandis que sur la plupart du métrage la photo me parait plutôt bien rendue. Le dvd propose le film en vo, en vo sous-titrée allemand ou en version allemande. Il y a aussi dans les bonus un commentaire audio de Monte Hellman et Stuart Whitman, que je n’ai pas encore visionné.
