Identificazione di una donna / Identification d'une femme - Michelangelo Antonioni (1982)

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manuma
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Identificazione di una donna / Identification d'une femme - Michelangelo Antonioni (1982)

Message par manuma »

Niccolo Farra, cinéaste, travaille a un projet de film ou scénario et personnages ne sont pas encore définis. La liaison fugitive qu'il noue avec Mavi, une belle et énigmatique aristocrate, ne sera pas sans conséquences sur sa future création.

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Je suis peu familier du cinéma d’Antonioni, ni trop tenté par celui-ci d’ailleurs (même si Profession : reporter, découvert récemment, m’a bien botté), mais son Identification d’une femme, avec son casting bien bis – Lara Wendel, Marcel Bozzuffi, Stefania D’Amario et Veronica Lazar entourant un Tomas Milian d’une impressionnante sobriété (prestation, il va sans dire, à des années lumière de celle d’Escroc, macho et gigolo de Bruno Corbucci, livrée par l’acteur la même année) – m’a toujours attiré. Je lui ai donc donné sa chance à l’occasion d’une diffusion sur Ciné Cinéma Club en VM.

Sur le fond j’avoue n’être pas intégralement convaincu et trouver l’ensemble légèrement nébuleux dans ses intentions, son discours. J’imagine qu’il y a un petit côté autobiographique à tout ça et qu’il faut voir le personnage de Niccolo Farra, cinéaste en panne d’inspiration, à la recherche de la femme qui l’inspirera, comme un double fictionnel d’Antonioni. Mais sorti de ça j’avoue avoir l’impression d’être en partie passé à côté de la réflexion Antonionienne sur la création artistique, réflexion relayée pourtant par quelques chouettes trouvailles narratives (les flash-back sur le personnage de Mavi, que l’on ressent un peu comme la construction mentale d’un film dans la tête de Niccolo). Antonioni agrémente son sujet de quelques considérations socio-politiques sur l’Italie, sa bourgeoisie, sa corruption, son cinéma, sans que cela n'apporte grand-chose à son histoire et sa thématique première ... ou alors je n’ai pas saisi la finalité de ces digressions. En revanche la conclusion m’a vraiment séduit, à la fois joliment ouverte et énigmatique (à la Profession : reporter) et plus limpide dans son discours métaphorique sur la femme vue comme le soleil du créateur (enfin, c’est ce que j’ai cru comprendre).

Dans la forme je suis en revanche totalement conquis. La photo de Carlo Di Palma, les éclairages et cadres (dont un très beau plan d’ouverture en trompe l’œil), comme plus généralement le rythme du film : C’est à tous les niveaux du travail particulièrement soigné mené de main de maître, qui intrigue et envoute sans tomber dans l’esbroufe.

Voilà, sans doute pas le film le plus limpide et le plus absorbant que j’aie vu récemment, mais l’un des plus travaillé visuellement. Et puis pour les fans de Tomas Milian c’est quand même une curiosité. A noter enfin que pour un film seulement déconseillé au moins de 10 ans, Identification d’une femme comporte plusieurs séquences d’accouplement pour le moins explicites.
eric draven
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Re: Identificazione di una donna - Michelangelo Antonioni (1982)

Message par eric draven »

Difficile de parler d'un film tel que Identification d'une femme voire de le résumer.

Un cineaste, Nicolo, cherche la femme qui sera le personnage de son prochain scénario. Il s'eprend de Mavi, une aristocrate qui peu a peu lui échappe. Mavi malgré son détachement pour son milieu social semble y etre attaché tout comme elle semble aimer les femmes. Elle est egalement troublée de decouvrir l'identité de son père, l'amant de sa mère. Mavi un jour disparait dans le brouillard. Nicolo rencontre Ida qui aide a la retrouver mais Mavi disparait à nouveau.
Nicolo se rapproche d'Ida, leur solitude les reunissant mais Ida est enceinte d'un autre. Elle disparait tandis que Nicolo se plonge dans un nouveau scénario qui l'amène a rejoindre le soleil dans un vaisseau spatial...

Ce résumé n'est qu'un apercu de cette histoire nebuleuse a plus d'un titre... nebuleuse car tres complexe, sorte de longue reflexion, quete psychologique et personnel d'etres perdus, égarés qui se cherchent pour mieux se perdre, le tout dans un climat etrange, de violence sourde et latente et de sexualité exacerbée.
Nebuleuse car on plonge dans une Venise perdue dans le brouillard, ce même brouillard qui absorbe Mavi.
Irrationnelle, déraisonnée, cette quête qui se termine sur une fin ouverte nous place en tant qu'observateur comme peut l'être Nicolo, y compris lorsqu'il fait l'amour, nous entraine dans des errances qui parfois mettent mal à l'aise, effraient ou étonnent, on se fond dans le personnage de Nicolo pour mieux nous perdre a notre tour dans une quête impossible.

Le temps et l'espace semblent ici figés, impression de gel renforcée par ce brouillard épais à travers lequel Nicolo tente en vain de trouver une femme avec qui il pourra vivre une relation semblable à celle qu'il pourrait vivre avec la Nature, sorte de communion impossible sur cette Terre qui le conduira à franchir les limites de l'univers.

Identification.., film difficile à aborder, est en fait une reflexion sur les peurs, les paradoxes et les exigences des hommes et des femmes dans leurs relations.

Antonioni signe ici un film d'une beauté magistrale. Outre les plans de brouillards, la maison de campagne batie dans le vide, Venise et sa lagune, scènes d'un symbolisme evident, on remarquera la précision des décors notamment l'utilisation des fenetres, vitres et escaliers, créant un sentiment intense, une expressivité etonnante.

Profondement sensuel, Antonioni distille également un erotisme torride à travers ses personnages et leurs ébats. Il maitise l'espace et chacun des gestes de ses protagonistes. On s'y croise, on s'y touche, on s'y separe, on s'y perd, on en sort on y rentre..

Ces silhouettes evanescentes, leurs incessants mouvements refletent tout le propos du film, oeuvre nebuleuse et presque psychanalitique, superbe et difficile d'accés, dominée par Tomas Milian dans le role de Nicolo.

A ses cotés un casting etonnant et parfait: Marcel Bozzuffi en tête mais également la Boisson, irradiant d'erotisme bouillant, la Boisson revelée par Emmanuelle. De la vraie garce nubile, la Wendel, la petite fille a scandale du cinéma trash italien, heroine de la Maladolescenza sans oublier une grande dame de theatre, Veronica Lazar qui pour le bissophile restera Mater Tenebrarum du defunt Argento...

Magistral pour tout ceux qui aiment un cinéma cerebral, hermetique au symbolisme exacerbé. A eviter pour les autres.
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eric draven
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Re: Identificazione di una donna - Michelangelo Antonioni (1982)

Message par eric draven »

L'affiche francaise

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Quelques photos:

La Boisson se donnant a un Tomas Milian en pleine quete d'un amour humainement impossible

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Toujours la Boisson

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Tout ca pour dire qu'un DVD serait le bienvenu.. afin qu'Eric oublie sa vieille copie TV F2 dont il manque le générique final! :? :?
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manuma
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Re: Identificazione di una donna - Michelangelo Antonioni (1982)

Message par manuma »

Merci Eric d'avoir éclairé un peu ma lanterne sur la signification de cette histoire. Curieux film en tout cas, souvent envoûtant dans la forme (tous ces plans hyper travaillés, la fin, le passage dans le brouillard, que tu cites, et qui est vraiment étonnant) mais parfois un rien agaçant dans sa posture ouvertement arty, son côté mystère et boule de gomme.
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Re: Identificazione di una donna - Michelangelo Antonioni (1982)

Message par eric draven »

En fait, c'est le style Antonioni poussé a son extreme ici.. Son film à mon avis du moins le plus difficile.
Je te conseille donc de decouvrir un peu plus ce cinéaste si tu en as l'occasion et si tu aimes un tant soit peu ce type d'oeuvre. :wink:
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Re: Identificazione di una donna - Michelangelo Antonioni (1982)

Message par Manolito »

"Identification d'une femme" était un come back pour Antonioni après la sortie difficile de "Profession reporter" et le remise en jambes plus ou moins télévisuelle du "Mystère d'Oberwald". Il revient donc à des motifs assez classique de son cinéma, dans une co-production franco-italienne.

Je lis ici qu'on trouve ce travail nébuleux, mais j'ai pourtant trouvé que c'était un de ses films les plus limpides, aux problématiques bien plus claires et aux personnages bien mieux dessinés que dans des titres comme "L'aventurra" ou "Le désert rouge". Antonioni évite presque toujours ici le piège du "nébuleux pour le nébuleux" dans lequel il tombait pourtant facilement dans les années 60. C'est aussi le seul de ces films dans lequel je trouve les personnages réellement attachants, recherchant quelque chose de plus ou moins clair, se parlant, etc... Ce ne sont pas des mondains antipathiques et creux de "la nuit" ou "L'aventura".

Maintenant, ce n'est pas l'Antonioni le plus réussi formellement, les moments de virtuosité sont rares (les deux scène à Venise essentiellement), Antonioni ressort parfois habilement certains de ses outils (ellipse brutale, allongement artificiels de scènes, disparition brutale d'un personnage central...) pour désorienter le spectateur et surprendre. Mais c'est quand même un film qui a du mal à accrocher, provoque l'ennui, et parait par certains choix visuels et musicaux datés. Certains éléments sont superflus (les types qui surveillent Niccolo). Il n'en reste pas moins un film assez attachant dans la filmo d'Antonioni, car un film à visage humain, ouvert sur les autres et sur le public (relativement, pour un film d'Antonioni en tous cas !).

Vu sur ciné cinéma club, dans une copie VM 1.85, correct pour un film relativement rare et diffusé sur le câble, mais vraiment sans plus. Il n'y a pas de dvd en France, mais il en existe un en Angleterre :

http://www.dvdbeaver.com/film2/DVDRevie ... _woman.htm
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