Et des adaptations il y en eut.. et c'est cette fois Andrea Bianchi, artisan tacheron specialiste de l'erotisme trashos et de l'horreur transalpine qui s'y colle en cette année 72 aidé en cela par l'anglais John Hough.
De Bianchi on pouvait s'attendre au pire, au vu du résultat on est un peu rassuré voire surpris, la présence de Hough semblant avoir porté ses fruits du moins quelque peu...
Le tandem nous livre une version assez fidèle du roman, version portée par la présence du pachydermique Orson Welles dans le rôle du pirate Long John Silver, Welles qui a co-ecrit le scénario aux cotés de 4 autres compères... au vu du résultat on se demande si une seule personne n'aurait pas suffit!
Il est assez surprenant donc que 5 personnes aient pu pondre ce scénario si peu original. On s'en tient au roman de base certes mais en l'edulcorant un maximum, le tout devant tenir dans les 90 mn reglementaires.
C'est là un des défauts majeurs du film. Tout va très vite, tout s'enchaine à la vitesse grand V et le coté épique de l'aventure en souffre enormément.
Ce souffle de l'aventure manque cruellement et les vents marins ne gonflent guère les voiles du beau bateau mais gonflent plutot le spectateur assez rapidement.
On ne s'ennuie pas vraiment mais on aurait aimé, on espère au détour de nombreuses séquences que le film décolle enfin. Que nenni! C'est donc totalement passif qu'on vit les aventures du jeune Jim Hawkins embarqué dans cette aventure marine où malgré son charisme Orson Welles n'arrive pas réellement à épicer.
On est ici loin du méchant pirate terrifiant qu'était Silver même si Welles semble écraser de par sa présence un bien beau casting international – co-prod oblige- puisqu'on retrouve à ses cotés Rik Battaglia, Lionel Stander, la Franco-iste Maria Rhom, Paul Muller qui eux paraissent donner le minimum syndical, peut être endormis par l'air ocean.
Quant au jeune Kim Burfield il n'a pas l'étoffe du jeune héros qu'on pouvait esperer, penchant plus vers l'insupportable gosse que vers le valeureux jeune homme du roman.
Filmé le long des cotes espagnoles, Bianchi ne met guère en valeur la beauté des paysages, se contentant de filmer platement son histoire sans jamais tenter de créer cette atmosphère si propre aux films de pirates, ce mystère enveloppant ces récits aux parfums d'embrun.
On ne se rattrape guère sur les scénes d'action ou de bataille encore moins sur la violence fortement édulcorée.
L'île au trésor réserve cependant quelques beaux moments particulièrement soignés notamment la très belle séquence où dans la nuit bleutée enveloppée d'un épais brouillard, semble errer le fantome du terrible pirate aveugle alors que surgissent du néant une horde de cavaliers s'appretant à attaquer la petite auberge de Jim.
Cette scéne a quelque chose de magique, d'envoutant d'où émane une terreur sourde. On reconnaît là la patte de Hough, on songe même à un certain cinéma fantastique anglais so british. C'est alors qu'on regrette que tout le film ne soit malheureusement pas à l'avenant.
La petite curiosité de cette co-prod italo-hispano-germano-anglo francaise est la présence fugace de Jean Lebfevre dans la peau de Ben Gunn. Fugace car Lebfevre n'apparait réellement que lors du final, son visage d'ahuri faisant beaucoup perdre de crédibilité à son personnage de pirate. Lefebvre s'étant lui même doublé pour la VF, cela aggrave un tantinet plus le manque de sérieux de son rôle mais fera néanmoins sourire ses fans car oui.. aussi étrange que cela puisse paraitre, comme Martyrs il a des fans!!

On pourra faire le même reproche aux autres protagonistes, chacun des personnages manquant cruellement d'épaisseur, n'étant le plus souvent que des esquisses.
Bien vite oubliée, cette Ile au trésor mettra tout juste un rayon de soleil dans la grisaille d'un dimanche aprés midi mais la faiblesse des vents marins cette fois ne décoifferont guère le gentil spectateur, L'ile au trésor version Bianchi / Hough trouvant son public auprés des plus jeunes.
Cette version demeure une anecdote dans le genre dit de pirates mais un des meilleurs films de Bianchi tout relativement parlant puisque le plus gros travail en revient à Hough qu'on a connu également connu plus en forme.
Ce n'est guère pire que la version avec notre Sheila Nationale signée de l'espagnol Raoul Ruiz quelques années plus tard.

Le corbeau qui gonfle ses plumes aux vents marins..
