Deux gangsters se retrouvent au Golden Eagle, un hôtel de la banlieue de Los Angeles. Là, ils espèrent organiser un braquage avant de s'installer à Las Vegas. Mais ils ont mal choisi leur endroit : le Golden Eagle est en fait un repaire de voyous, de prostituées et de proxénètes...

D’Adam Rifkin je n’avais vu à ce jour que 2 films : The Chase et Detroit Rock city. Soit 2 comédies énergiques, au ton certes sympathiquement anticonformiste mais qui ne dégageaient pas une impressionnante personnalité. Autant dire que je n’étais pas préparé à la vision de ce Night at the golden eagle, qualitativement sans comparaison avec les deux titres pré-cités.
La courte mais déjà formidable séquence pré-générique (avec cameo de James Caan inside) ainsi que le générique lui-même annoncent d’emblée la couleur du spectacle à venir, à savoir jaunâtre et suintant, mélange d’humour rocailleux et de nostalgie très noire virant occasionnellement à la tragédie urbaine la plus désespérée. Le trip promet d’être sans concession et il le sera effectivemment jusqu'au bout. Le scénario, écrit par Rifkin, ne va pas chercher la complication au niveau de sa trame principale, sur les mésaventures de 2 vieux mafiosos se retrouvant avec un cadavre sur les bras quelques heures avant de quitter Los Angeles pour partir s’installer à Las Vegas. Il est avant tout à prétexte une série de vignettes présentant quelques beaux spécimens de losers / exclus / marginaux hantant un hôtel crasseux sorte de purgatoire / antichambre de la mort. Des personnages qu’on ne cherche pas impérativement à nous rendre attachant, présentés avec leurs forces et leurs faiblesses, pour certains en fin de parcours, pour d’autres rentrant tout juste dans le tunnel de la déchéance, mais qui, quelque soit leur temps de présence à l’écran, sont tous traité avec la même neutralité, la même impartialité et conservent – quasiment – tous une part d’humanité.
A ce bel accomplissement en termes d’écriture s’ajoute une forme tout aussi aboutie, avec une caméra mobile qui multiplie les cadres inventifs et un gros travail sur le visuel incluant une photo granuleuse aux teintes sepia du plus bel effet. Une forme peut-être pas d'une grande sobriété mais qui épouse parfaitement l’atmosphère poisseuse, de décrépitude du film. Enfin, Night at the Golden Eagle se distingue par son improbable cast rassemblant notamment un véritable mafioso, apparemment membre d’une célèbre famille mafieuse de la côte ouest (son influence au sein de celle-ci fait d’ailleurs l’objet d’une amusante engueulade sur l’une des discussions ouvertes via le lien IMDB du film), une vieille (mais vraiment vieille … les années 30/40, quoi) gloire de couleur du Music-Hall, une ex-icône de la scène underground new-yorkaise des années 80, une légende du porno US et une vedette teenager de la vague American Pie.
Un gros coup de cœur donc, que je vous invite chaleureusement à découvrir si l’occasion se présente à vous.