
"Velvet Goldmine" est le film qui a vraiment révélé le réalisateur Tood Haynes, et il s'agit d'une version très (ou peu ?) romancée de la carrière glam de David Bowie (entre "Space Oddity" et le concert final de "Ziggy Stardust"), revue à une sauce extrêmement extravagante. Ce qui est la moindre des choses pour un film concernant, justement, le glam rock et mettant en scène des personnages inspirées de figures aussi hautes en couleurs (surtout durant cette période) que Bowie, son épouse Angelica, Iggy Pop et Lou Reed (ces deux là étant plus ou moins synthétisés en un seul personnage, Curt Wild). Il ne s'agit en fait pas tant d'un portrait de Bowie à proprement parler, que d'un portrait mêlé de Bowie, de ses personnages alter ego Ziggy Stardust et Aladdin Sane, et de la version dont Todd Haynes les fantasme.
Le résultat grouille de clins d'oeil et de références à cette période de la musique anglaise, que le fan identifie sans peine : le concert d'adieu de l'Hammersmith Odeon, la photo scandale du baiser androgyne entre Lou Reed et Bowie, la photo du solo-guitare/simulation de fellation avec Mick Ronson, le passage à la BBC de "Starman", la mention "To be played at maximum volume" de l'album "Ziggy Stardust", la pochette de Diamond dogs, le CBGB de New York avec les New York Dolls, la maison de management Mainman, la robe de "The Man Who Sold The World", les électrochocs de Lou Reed durant son adolescence, etc... Le film reprend aussi des anecdotes/rumeurs plus ou moins célèbres, comme Angelica Bowie surprenant Mick Jagger et David Bowie au lit ; ou la romance entre Bowie et Iggy Pop... Le film ne contient bizarrement aucune chanson de Bowie, semble-t-il car celui-ci avait un projet du même genre à la fin des années 90. Mais on a tout de même de nombreuses chansons d'autres artistes d'époque : Lou Reed, les Stooges, T-Rex (pauvre Marc Bolan, qui n'apparaît pas vraiment dans le film, alors que c'est lui, l'incarnation la plus pure Glam Rock), Roxy Music, beaucoup de Brian Eno solo...
Il y a aussi des références très nombreuses au cinéma de l'époque, au film-concert "Ziggy Stardust" bien sûr, mais aussi à des classiques Glam comme le "Rocky horror Picture Show" ou "Cabaret". A force de cultiver le fantasme et la projection, le film se permet parfois des libertés peu convaincantes, comme cet espèce de personnage surnaturel associé à Oscar Wilde, manière pataude et envahissante de rattacher le glam au dandysme.
Certains éléments de Bowie et du glam sont très bien compris : une rencontre entre un music hall excentrique typiquement british (qui inspirait déjà les Kinks ou les Beatles) et les nouvelles musiques avant-gardistes américaines de la fin des années 60. Ainsi que l'influence de certains artistes excentriques du rock'n roll comme Little Richards et son maquillage, sa bisexualité affichée. Haynes comprend aussi que Bowie est avant tout un grand fan de musique, une éponge à influence, abordant les musiciens qu'il adore comme un fan enamouré et intimidé.
Par contre, à force de ne se braquer que sur l'aspect glam de son personnage, il verse aussi dans la caricature (le Slade des 80s assassin du Slade des 70s). A force de mêler aussi fortement Slade et sa créature, il en fait un personnage qui semble ne s'être jamais renouvelé après le concert assassinat. Ce qui ne correspond, heureusement pas à la carrière de Bowie...
Un film de fan, avec un point de vue personnel que les amateurs de Bowie apprécieront plus ou moins... Mais un film qui a le mérite d'une certaine audace et de mettre en avant une grande période de la musique anglaise souvent dénigrée et ridiculisée...
Vu sur ciné cinéma club où il passe en ce moment, copie et diffusion correcte en 1.85, son VM stéréo.