Tiré du célèbre fait divers qui défraya la chronique en février 72, Survivre! fut à sa sortie en 77 tout auréolé d'un vent de scandale du fait de ses séquences de cannibalisme.
René Cardona, grand spécialiste de l'exploitation mexicaine des 60s/70s, tire de cette tragédie son coté le plus morbide et tape-à-l'oeil pour en faire une petite série fleurant bon le sordide.
Contrairement à des oeuvres semblables telles que Cyclone ou Tintorera signées par son fils, Cardona va ici droit au sujet en évitant les interminables introductions et bavardages inutiles. On embarque dans l'avion, on survole la cordillère des Andes et c'est le terrible crash au milieu des montagnes enneigées.
En 10 minutes, nous voilà au coeur de l'action et de ce que Cardona voulait nous montrer: toute l'horreur d'une situation dont seule la mort semble être l'issue après que les survivants de l'accident aient appris que les secours ont abandonné les recherches. Reste donc tout le métrage pour nous plonger au coeur de leur désespoir et leur résignation à se nourrir des cadavres de leurs compagnons.
On pourra reprocher au réalisateur et la critique ne s'en priva pas alors d'avoir tiré une bande morbide et voyeuriste d'un drame qui aurait nécessiter plus de dignité et surtout d'humilité. Cardona avec une extraordinaire légéreté traite avec une toute aussi extraordinaire complaisance de ce sujet si intime afin de n'en retenir que les aspects les plus sordides et nourrir ainsi les instincts voyeuristes du spectateur.

Dans sa soif de montrer, il en arrive à survoler son sujet comme ce pauvre avion survolait les Andes et réduit à son plus strict minimum autrement dit des dialogues d'écolier une des plus déchirantes décisions qu'un homme doit prendre: survivre en se nourrissant de chair humaine.
Afin de justifier cette décision, il s'en remet même à Dieu et cite la Bible où les Evangiles disent que l'Homme se nourrira de la chair de son fils et de sa fille.


On sourit devant une telle désinvolture et une telle facilité d'autant plus que tout va très vite. On ne s'attarde pas, on ne discute pas et les mois passent à la vitesse supersonique.
Nous sommes ici dans du pur cinéma d'exploitation dans ce que tout cela sous-entend. Faire fi de tout sentiment, toute réflexion, toute finesse ou décence et ne garder d'un drame que toute son horreur et en faire un spectacle voyeuriste dans le plus total irrespect et contre toute morale.. ce que nous adorons donc, flatter nos instincts pervers..


Le crash est assez spectaculaire malgré le budget microscopique dont a bénéficié Cardona, les corps sont éjectés de la carlingue, les estomacs sont percés de pieux, tout explose, on hurle et la caméra s'attarde sur les corps ensanglantés s'entassant l'un sur l'autre dans l'épave.
Cardona se permet quelques séquences gore dont ces boyaux sortant d'un abdomen qu'on recoud comme on peut ou cette jambe blessée et bleuie. Et arrivent ce qu'on attend du film: ses séquences de cannibalisme.
A l'aide d'un couteau, on découpe en tranche fines les corps pour les faire sécher au soleil sur la carlingue et les manger petit à petit au fil des jours. Rien de très spectaculaire en fait et aujourd'hui cela paraitra bien fade si on compare ces repas aux débordements sanglants des années 80. Mais le dégout provient plus du geste que de l'acte lui même et Cardona semble avoir préféré l'horreur plus viscérale que visuelle pour ces instants.
Tourné en grande partie en studio, on sourira face à cette fausse neige, en fait des boulettes de polystirène que souffle un ventilateur, se collant sur le visage des acteurs, tranchant nettement avec les rares séquences tournées en extérieur dans des montagnes et forets d'une laideur sidérante, semblables aux vieilles montagnes de notre cher Hexagone

Aucun génie de réalisation, une interprétation des plus statiques, des personnages qui ne sont que des silhouettes mais il émane pourtant de Survivre! quelque chose de sympathique et d'attrayant, peut être cet étalage de désespoir si joliment peu creusé et la désinvolture de Cardona, caractérisant ce type de cinéma.
Au générique on retrouve l'acteur fétiche du réalisateur, la barbe du toujours monolithique Ugo Stiglitz et une ribambelle de jeune acteurs mexicains tous plus mignons les uns que les autres.. latinos, normal!!

Exploitant dans son fond l'horreur de ce crash, flattant nos instincts de petits voyeurs aimant exploiter les drames humains, Survivre! a son charme Bis même s'il est plus ennuyeux dans sa forme... et bien peu gore, ne valant certainement pas la réputation qu'on lui fit il y a 30 ans!
Les bonnes âmes et puritains lui préféreront bien sur Les survivants tourné en 92 avec un tout jeune Ethan Hawke qu'on aurait bien mangé LUI

Le corbeau qui adore dévorer ses amants.