A Berlin Ouest, une bande de terroristes d'extrême gauche se terre dans un appartement et se prépare à frapper un "grand coup"...

Si, en 1979, "Le mariage de Maria Braun" de Fassbinder est délibérément une oeuvre mélo relativement grand public - et deviendra peut-être son film le plus connu, en tous cas en France -, "La troisième génération" s'inscrit totalement dans la veine de ses films expérimentaux, post-Godard, du côté de "L'année des treize lunes".
Avec "La troisième génération", Fassbinder se penche de façon très critique sur le terrorisme d'extrême gauche allemand, avec sa lucidité aiguisée et son bon sens qui en ont toujours fait un réalisateur "de gauche" à part dans le cinéma européen d'après-guerre : un cinéaste ayant toujours été très méfiant quant aux naïvetés idéologiques.
La révolte des enfants de la seconde guerre mondiale contre l'ordre établi par leurs parents est légitime. Mais les actions terroristes ne sont ici que des gesticulations gratuites et sans but, stimulées par l'ennui et le goût de l'action ; des "clowneries", littéralement, consistant, au mieux, à mordre la main qui les nourrit... et à justifier l'instauration d'un ordre encore plus réactionnaire sur l'Allemagne, les forces aux pouvoirs s'affranchissant de la légalité traditionnel au prétexte d'une situation exceptionnelle.
Les acteurs traditionnels de Fassbinder sont présents (Harry Baer, Udo Kier, Margit Carstensen, Hanna Schygulla, Eddie Constantine, etc.) avec ici en plus la présence de Bulle Ogier. La forme est parfois difficile (bande-son faisant se chevaucher de multiples sons et dialogues en allemand), les références culturelles et politiques à l'allemagne des années 70 s'avèrent souvent opaques. Ce n'est pas un film touchant et direct comme peuvent l'être des oeuvres plus mélo de fassbinder. Mais on y retrouve intacte la virtuosité de la forme, la pertinence de la réflexion, et le radicalisme inconditionnel du cinéaste, ne faisant de cadeau à personne : la citation d'un chancelier de la RFA excusant l'emploi de méthodes anti-constitutionnels pour régler une affaire terroriste est mise au même niveau que des graffitis obscènes et racistes recueillies dans les toilettes de Berlin, citations grotesques à travers lesquelles Fassbinder dégagent l'état de la société allemande d'alors.
Vu sur ciné cinéma club où il passe en vostf dans une très belle copie 1.33 d'origine.