Le feu follet - Louis Malle - 1963

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DPG
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Le feu follet - Louis Malle - 1963

Message par DPG »

Alain Leroy a quitté New York pour subir une cure de désintoxication alcoolique dans une clinique de Versailles. Sa femme, Dorothy, est restée aux États-Unis. Son traitement vient de s'achever. Il est "guéri" mais éprouve un profond dégoût face à la vie qui ne lui procure plus aucun des plaisirs d'antan.

J'étais assez curieux de voir ce film qui a plutôt jolie réputation. On en parle souvent dans les grands films de Malle, on le cite régulièrement comme le plus grand rôle de Maurice Ronet, j'ai donc profité d'une projo à la Cinémathèque pour me faire mon idée. On suit donc le désespoir d'un homme tout au long du film, entre errance, mélancolie, perte du gout de la vie. Ronet est effectivement assez bluffant, toujours sur le fil entre ironie, tristesse et désillusion. Le film a un rythme assez particulier, la progression est assez bizarre. On prend son temps, ce qui dans un premier temps peut laisser dubitatif, mais qui finit par permettre au récit de trouver son style, de poser un univers et la relative lenteur du tout participe finalement de la réussite artistique. On finit par faire corps avec ce perso totalement paumé, qui recroise tout un tas d'amis et de lieu de son passé, mais sans jamais parvenir à y retrouver la joie qu'il a pu y connaitre. Ses amis ont changé, se sont rangés, ont fondé des foyers, boivent moins, ne sortent plus. Lui n'a pas voulu "murir", et il va petit à petit se faire à l'idée que ce monde n'a plus grand chose à lui apporter. Ce personnage qui ne veut pas grandir, pas vieillir est finalement assez touchant, très juste et attachant. Le film est à son image finalement. On en sort déboussolé. Un beau film.

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Manolito
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Re: Le feu follet - Louis Malle - 1963

Message par Manolito »

Un film vraiment magnifique, très émouvant, un superbe long métrage sur le dégout de soi, de la vacuité de la vie, sur la mélancolie à l'état pur, un usage magnifique de la musique de Satie, Ronnet bouleversant... Un voyage au bout du désespoir. Une merveille à voir absolument !
mallox
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Re: Le feu follet - Louis Malle - 1963

Message par mallox »

Ah oui ! C'est un film dont ne se défait pas comme ça. Magnifique utilisation de la musique de Satie, plongée vertigineuse dans les tréfonds de la mélancolie, aux confins d'une désillusion sans retour face à ce qu'on ne retrouvera plus jamais ; la plus belle prestation de Maurice Ronet qui, avec un rôle intérieur, explose littéralement l'écran. Le meilleur film de Louis Malle et accessoirement un très grand film. De ceux qui hantent longtemps, très longtemps les mémoires, tant et si bien, et ce, malgré que ce soit un film d'une tristesse infinie, qu'on aime à s'y replonger de tant à autre avec toujours le même subjuguement.
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mercredi
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Re: Le feu follet - Louis Malle - 1963

Message par mercredi »

Une peinture cinématographique d’un nihilisme désespéré, à mon avis inégalée. Comme le signalent Manolito et Mallox, “Le Feu Follet” aborde le vide de l’existence avec humanité, tonalité d’autant tragique qu’a priori paradoxale (un film moyen aurait opté pour l’humour noir et / ou le cynisme attendus au regard du sujet).
À noter qu’il reste difficile d’évoquer l’oeuvre sans mentionner l’influence de Pierre Drieu La Rochelle, immense génie littéraire, selon moi, malheureusement (encore peu ou prou) rejeté par l’université en raison de ses prises de position politiques (fascistes, nazies; tandis que la Norvège s’apprête à célébrer fort justement le 150 anniversaire de la naissance d’un autre sympathisant nazie, Knut Hamsun, prix nobel de littérature à l’origine du sublime “La Faim”) ).
Sous l’influence de Nietzsche, l’artiste névrosé passa sa vie à renvoyer notre société et en particulier la bourgeoisie, à ses propres démons / faiblesses en ne s’épargnant pas d’ailleurs (d’où le caractères quelque peu masochiste de ses écrits). Le dégoût de soi et des autres inspire ainsi maints chefs d’oeuvre dont “L’Homme couvert de femmes” (1925), “Rêveuse bourgeoisie” (1937), “Gilles” ( 1939).
Ayant tenté de mettre fin à ses jours dès l’âge de sept ans, Drieu La Rochelle y parviendra finalement en 1945.
Le “Feu Follet” est paru en Poche, coll. Folio et coûte moins de cinq euros...
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