Il s'agit de l'adaptation du roman homonyme d'Alfred Doblin, une des oeuvres littéraires les plus importantes de la littérature allemande qui a toujours été une influence souterraine des films de Fassbinder - par exemple le personnage que Fassbinder joue lui-même dans "Le droit du plus fort" porte le même nom que le personnage principal du roman.
Le film a été tourné en 16mm à 25 images par seconde pour être parfaitement en conformité avec le défilement du PAL 50hz. Une restauration récente a été effectué par la fondation fassbinder et sortie en dvd dans plusieurs pays, notamment aux USA chez Criterion et en France chez carlotta.
J'ai regardé les deux premiers épisodes sur le coffret carlotta, et la restauration est vraiment très belle. Certains plans en extérieur sont très naturels, le grain est bien respecté, les contrastes et les couleurs sont au poil ! Certaines scènes d'intérieur sont plus difficiles (sombres, filtres lourds : les spectateurs de l'époque en allemagne s'était plaint que l'image était quasi irregardable !), mais le dvd les restitue avec naturel et honnêteté, dans une copie très propre. Que dire de la bande son mono en allemand seulement (avec stf), on dirait qu'elle a été enregistré hier tant elle est propre et naturelle !

Le premier épisode raconte la sortie de prison de Franz Biberkopf, un homme qui a passé 4 ans enfermé pour avoir tué sa compagne dans un accès de colère. L'action se déroule au début des années 30, dans une Berlin miné par la crise économique, alors que l'Allemagne bouillonne de tension politique entre nazis et communistes... La sortie de Franz est vécue comme une seconde naissance, traumatisante pour Biberkopf qui doit se confronter à la réalité et à la dureté sociale d'une époque qu'il redoute. Il rencontre d'abord une prostituée, puis couche avec la soeur de sa compagne défunte et finit par devenir le petit ami d'une jeune femme rencontrée dans un bar.
Dans le second épisode, Franz doit trouver du travail et est tenté par diverses carrières hasardeuses comme vendeur de fixe-cravate, de livres cochons et, finalement, un vétéran de la première guerre mondiale le convainc de vendre à la criée un journal nazi. Il se confronte alors à un ancien ami, communiste, qu'il rencontre par hasard dans le métro.
Nous n'avons clairement pas affaire à du Fassbinder au rabais, bien au contraire, la diversité des décors, le soin apporté à une reconstitution historique très soignée (la rue, le métro, le cabaret) en font dès les deux premiers épisodes une production très oppulente pour le réalisateur. Artistiquement, Fassbinder ne donne pas non plus dans le dilué, nous retrouvons la qualité des dialogues et de l'interprétation typique de son cinéma, sa pertinence et son intelligence critique, ainsi qu'un excellent équilibre entre fresque historique relativement populaire et expérimentations (sur le son, la voix off, notamment) d'un niveau très ambitieux. Le premier épisode est assez lent, mais le second épisode impose d'emblée un rythme plus convaincant, donnant clairement envie de voir la suite !