Après (les excellents) CROWS ZERO 1 et 2, Wildside continue dans le film de Gangs avec SHANK, un métrage Britannique à connotation vaguement fantastique comme nous l'explique Arioch dans sa news (avec bande annonce) du jour :
Déjà que la chronique d'Arioch nous avait défloré tout le sujet … En effet rien d’autre à se mettre sous la dent que cette histoire linéaire de vengeance contre une bande qui a assassiné le frère du jeune héros. S’ensuivent donc diverses rencontres de personnages susceptibles de prêter main forte dans ce but. Une suite de scènes sans aucun intérêt, ni enjeux, autres que de présenter des clichés sur pattes, racailles à lunettes de soleil et autres blacks de service, vautrés dans leur canapé, entourés de leurs sbires et autres blondasses. Il faudra d’ailleurs faire un jour un inventaire de la représentation du pouvoir au cinéma : de l’heroic-fantasy à la sf, un type passant la plupart de son temps le cul sur un siège, pérorant sur le devenir du monde. Et ici, c’est flagrant, tant on y dénombre de chefaillons avec cette posture. Seul le frangin est présenté en échauffement dans une salle de boxe. Tout un symbole.
En terme d’action donc, hormis la longue poursuite du pré-générique et une ou deux courtes échauffourées, il faudra attendre la toute fin du métrage pour assister à un affrontement de bandes, aussi vite écourté (et illisible) qu’il était attendu.
Pour l’aspect anticipation, on est donc en 2015 et l’état a cessé tout versement d’aides aux plus démunis. C’est tout et il faudra se contenter d’un long travelling latéral sur une rue dans laquelle riverains et sdf se fichent sur la figure, et d’une scène de troc dans un minable marché au pied d’un immeuble, pour juger de la teneur de la situation sociale. Contrairement à ce que claironne l’accroche sur l’affiche, si les bandes ont pris le pouvoir, c’est uniquement au niveau de leur quartier. Un « simple » ghetto de plus, ne remettant aucunement en cause l’ordre social. Ce qui change vraiment, c’est qu’il n’y a plus rien à manger en ces lieux, les tractations, comme les braquages, ont donc la bouffe comme ultime finalité. Ceci dit, les gens ne portent pas vraiment les stigmates de la faim sur leur corps, problème d’illustration du sujet.
Dans ce scénario revanchard qui ne développe rien, les jeunes acteurs n’ont aucun personnage à défendre. On demande à chacun de présenter une seule et unique particularité, ce qu’ils se cantonnent à faire avec application. L’un est un dragueur gossebo, l’autre nettoie ses pompes avec une brosse à dent dès qu’il est assis, le troisième est énervé. Difficile dans ces conditions de dire qu’on a affaire à des figures attachantes.
Et niveau mise en scène, c’est comme si le Guy Ritchie des débuts avait pris des emphét’. C’est dire la succession vite insupportable de plans ultra-courts, d’arrêts sur image et de gimmicks datés. Ils illustrent à la moindre occasion l’intervention d’une voix off nous égrenant présentations des faits et personnages. On frôle la nausée. On aura ainsi droit aux noms et qualités des gens s’affichant à l’écran, quelques graphiques zébrant l’écran ça et là, une cinématique en fil de fer pour illustrer une prise de drogue ou un anime à la Tartakovsky en guise de rêve (seule séquence réussie du lot ?). Un pur cache-misère esthétique, tant les locations respirent la pauvreté de moyens.
Le sommet de l’imbécilité est quand même atteint lorsque, lors d’une scène de planque, chacun se lance dans une chorégraphie style breakdance ou tektonik, en slamant sur l’art et la manière de draguer, tout ça en ralenti syncopé. Surréaliste !
Et dire qu’il est encore possible aujourd’hui de faire une erreur de filmage, telle que la vue de la circulation automobile à l’arrière-plan d’une scène censée se dérouler dans un no man’s land urbain.
Je passe sur la bande musicale, à base de rap et autres musiques énervées. Ce n’est pas ma tasse de thé, et j’ai trouvé ça bien bruyant.
Et après un laïus désordonné sur la théorie du chaos, asséné par un gros black amateur de beans, on aura droit à un prêche sur la nécessité de voir la beauté derrière cette réalité définitivement bien triste (sic).
Je vais en terminer sur une comparaison, peut-être malvenue, mais je ne peux m’en empêcher. A l’orée des 80’s, le cinoche d’exploitation italien nous proposait sa vision kitch et bigarrée des ghettos new-yorkais, lors de bandes sf mal foutues, mais bien barrées. Aujourd’hui, en matière d’anticipation, prise de conscience suraigüe et crise semblent entraîner une illustration bien peu imaginative de la société du futur. On ne file même plus la métaphore. Il est aussi symptomatique de constater que les films d’aujourd’hui se contentent d’extrapoler à très court terme. En 1980, on situait l’action en 2019, pour ce film de 2010, on ne se projette qu’en 2015, soit même pas aussi loin qu’il y a 30 ans.
Désolé, mais je ne pense pas que la culture de l’imaginaire y ait gagné au change, surtout à la vue de ce Shank, peut-être ce qu’on peut produire de pire en terme de clichés communautaristes. Déjà dépassé et démodé avant même d’être diffusé. Et un gros caillou embarrassant dans la chaussure de Wild Side.
Un film assez médiocre en effet, au postulat fantastique très mal exploité, et à l'imagerie très pauvre. Comme l'a expliqué Savoy1, les héros ne sont que des silhouettes de personnages vaguement griffonnées (définir un mec par sa seule manie de nettoyer ses chassures, c'est du jamais vu !), le scénario linéaire au possible amène nos blaireaux de lieux en lieux, rencontrant à chaque fois un nouveau gang tristement fade.
En cela, le film adopte une approche "vidéo-ludique" faites de niveaux ou d'étapes qui se succèdent. Les clins d'oeil aux JV sont d'ailleurs nombreux (des barres de vie pour un combat de chiens tout pourri !) et renforcent l'aspect un peu geek-débile du métrage. Le ponpon sera atteint avec une séquence "virtuelle" dont on ne comprend ni le but, ni le sens. C'est laid, long et débile à souhait. Un peu comme ces métrages bis qui fantasmaient maladroitement la réalité virtuelle au début des années 90.
Ajoutons à ça que les acteurs ne jouent pas vraiment bien et qu'on s'emmerde assez vite, et on a un portrait sans appel de ce métrage que les dirigeants de WildSide n'ont pas du voir avant de le distribuer !
Ah oui, j'aime beaucoup le truc de la dette. Genre "OK, je t'aide mais après, tu auras une dette". "Oh, attention, on rigole pas, tu auras une dette". "Attention, tu t'apprêtes à avoir une dette !". "Bon ben voilà, maintenant t'as une dette". OK sauf que ça sert à rien puisque cette fameuse "dette" ne sera jamais réclamée dans le film. Super.
Dessin et sketching liés au cinéma, au voyage, etc. :