
Passée la polémique sur l'interdiction de l'affiche dans les villes comme Saint Cloud et Versailles, je suis allé voir le dernier film d'Alain Guiraudie (dont pour mémoire sur le site il y a la critique du DVD Z1 de Pas de repos pour les Braves :
http://www.devildead.com/indexfilm.php3 ... es-braves- ).
Je suis assez perplexe au final après quatre jours car je ne sais pas si j'ai aimé ou pas

Et curieusement, le film flirte quelque peu avec le film de genre.
Sur un lieu de drague au bord d'un lac, Franck (Pierre Deladonchamps) est fasciné par Michel (Christophe Paou). Il se lie d'amitié avec Henri, un quarantenaire isolé (Patrick d'Assumçao), qu vient passer ses journées seul, à regarder le lac. Un homme est retrouvé noyé; Chacun pense à un silure géant qui sillonnerait le lac et dont la légende perdure. Mais Franck a été cependant témoin du meurtre d'un homme par Michel. Bizarrement, il n'en souffle mot à personne.
Guiraudie a abandnné quelque peu sa narration télescopée de Pas de repos pour les braves, entre autres, pour un récit plus linéaire, moins surréaliste.
Autant le dire de suite, l'interdiction aux moins de 16 ans est justifiée. Des scènes assez graphiques parsèment le film, et finalement assez justifiées quant au propos libertaire. Il s'agit avant tout d'une équation sur l'attrait du danger. Franck est une jeune homme équilibré, beau et qui s'éprend d'un homme dangereux. Il le sait dangereux mais il est irrésistiblement attiré par le beauté et l'instinct de mort.
Il y a une scène où Franck se fait reprocher par un mec de ne pas utiliser de capote pour une pipe, car "il fait trop confiance". ET le type refuse tout rapport. Ce qui sera l'inverse avec michel, puisque la totalité de leurs rapports sexuels se feront sans capote. Inimaginable aux vues des risques encourus - mais cela va avec le sujet du film : franck désire un meurtrier pour lui seul, connait les risques mais ne peut s'empecher d'aller au-delà de son désir. La "petite mort" qui devient grande mort.
Basiquement, la caméra (en Scope magnifique!) se concentre uniquement sur cette unité de lieu. Parking en bord de foret, clairières, plage, lac. M^me l'enquête du commissaire s’effectue sur le lieu de drague plutot que dans un commissariat (ça n'aide pas vraiment à la crédibilité de l'ensemble, c'est une des choses les moins réussies du film).
Il y a toujours cette veine prolétarienne du cinéma de Guiraudie. les héros sont des monsieurs tout-le-monde. Pas de volonté de gravure de mode partout. les deux héros sont certes des bombes (faut dire ce qui est) car le propos du film est également ici - mais le reste du casting porte sur le quidam. Des vieilles bagnoles R25 péraves viennent se garer, , des clios, des vieiles 4L... pas de bobos parisien ou de jeune cadre UMP dans le placard. Du quidam.
Les allers-venues dans les bosquets sont rythmées par des journées au soleil et les discussions avec Henri. Pas de désir ici, mais le seul être qui est raccroché à la réalité. Il se rapproche des personnages de Roger Guidone dans Pas de repos pour les braves, ou Ludovic Berthillot dans le Roi de l'Evasion. Hétéro perdu car séparé de sa femme, il dit peu de choses mais voit beaucoup. Il subit beaucoup, aussi. est considéré comme un intrus et quelque peu bizarre par al population du lac car il vient dans un lieu de drague gay - mais ne fait rien et regarde au loin. Les dialogues avec Franck sont magnifiques, reposants, lointains et emprunts d'une poésie de l'ordinaire qui tranchent avec le reste.
C'est un cinéma toujours contestataire, indéniablement rentre-dedans. Sur lé désir et la Mort, beaucoup plus qu'un simple film sur la drague et le cul. Qui sont de simples vecteurs vers quelque chose de plus universel. Énormément de plans-séquences qui s'en remettent au travail des comédiens. Une photographie lumineuse qui magnifie les corps et les corps-à-corps. Et qui débouche sur une brutalité inattendue. L'Inconnu du lac aurait pu être un film d'exploitation tant il épouse les thématiques : une intrigue policière, des scènes de cul et des meurtres (dont un graphique) mais
Spoiler : :
Des scories : des plans pas très heureux du commissaire enquêtant sur place, le jeu de certains acteurs plaqué et pas très naturel, les derniers dialogues de Michel sont clamés et pas crédibles du tout, ça tue le climax. Et une longueur pas franchement nécessaire.
Indéniablement, un film autre, qui refuse toute concession. Ce n'est pas difficile d'imaginer que le budget (1.5 millions d'euros) a été ultra-difficile à monter par Sylvie Pialat. Mais c'est surtout le 1e succès de Guiraudie depuis 15 ans qu'il tourne, le film devant faire ses 100 000 entrées en fin de carrière.