Celui par qui le scandale arrive, c'est Robert Mitchum, alias Wade Hunnicutt, riche propriétaire, craint de tous, chasseur émérite, et coureur de jupons notoire, figure centrale du récit. C'est autour de lui que va graviter tout un petit monde que Minnelli va s'attacher à nous décrire, sa femme, qui se refuse à lui, son fils, un adolescent encore un peu enfant attardé dont il désespère de faire un jour "un homme, un vrai", Raph, une sorte d'homme de main énigmatique, si loin si proche, et puis tous les habitants du coin, ceux qui le côtoient de près ou de loin, dans cette atmosphère rurale où la moindre rumeur prend vite des proportions qui dépassent tout le monde. Tout ce petit monde va servir de toile de fond à Minnelli pour nous servir un drame familial comme il en a le secret, qui marche clairement dans les pas de "Comme un torrent" réalisé deux ans auparavant. On aura donc droit à une valse des sentiments réglée comme du papier à musique, en mode opératique, destinée à finir dans un drame, mais non sans avoir traversé nombre d'épreuves passionnantes.
Si le film ne se hisse pas à la hauteur des plus grands Minnelli ("Comme un torrent" justement), il reste tout de même une solide pièce de choix. Les personnages sont complexes, ambigus. L'intrigue va nous dévoiler le passé de chacun par petits bouts, en laissant le temps à chaque personnage de vivre sa vie, de murir, de trouver sa place dans ce petit monde. Le cast fonctionne bien, Hamilton s'en sort bien en jeune un peu trop naïf, G.Peppard campe un Raph assez complexe, Eleanor Parker est formidable en femme délaissée, et surtout, Mitchum est grandiose dans un rôle qui semble taillé sur mesure pour lui et qu'on n'aurait voulu voir incarné par personne d'autre. Bref, un très solide classique hollywoodien, auquel il manque peut être un brin de folie pour venir tutoyer les sommets absolus, mais tout de même un vrai plaisir, brillant, adulte, fort. Un Minnelli de fort bonne tenue !
