Quai des orfèvres - H.G. Clouzot - 1947

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DPG
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Quai des orfèvres - H.G. Clouzot - 1947

Message par DPG »

Dans le Paris de l'après-guerre, la jeune chanteuse Jenny Lamour fait parfois usage de ses charmes, notamment auprès d'un vieillard libidineux influent, un certain Brignon, pour se faire une place dans le milieu du music-hall. Son mari, un brave type, Maurice Martineau, par jalousie, profère des menaces de mort envers le septuagénaire, qui est retrouvé assassiné peu après. L'inspecteur Antoine, un flic désabusé et humain du Quai des Orfèvres, est chargé de l'enquête.

Premier film après la guerre pour H.G. Clouzot. Ce dernier ayant connu quelques démêlés à la libération, à cause du "Corbeau", produit par la Continental. Il sera dans un premier temps interdit de travailler avant de pouvoir à nouveau exercer sa profession. Retour en force avec ce "Quai des orfèvres", nouveau joyau dans une filmo de haut vol, qui obtiendra notamment le prix de la mise en scène à Venise. (à noter pour l'anecdote que Clouzot est un des seuls réals à avoir obtenu le trophée suprême à la fois à Cannes, Berlin et Venise !).

Le pitch est simple, canevas très classique d'une enquête policière comme on en a vu des centaines. C'est adapté d'un roman de Steeman, comme "L'assassin habite au 21", mais Clouzot avoue lui même s'être très largement écarté du bouquin, comme souvent... Mais ce qui fait la force du film, c'est bien entendu dans le traitement des personnages et de leurs différents caractères par le maestro. Comme dans le reste de son œuvre, il s'applique à nous présenter des êtres humains sous toutes leurs facettes, aussi bien les faits de gloire que des trucs moins reluisants, des gens inégaux, imparfaits, capables du meilleur comme du pire, en bref, des humains (revoir la scène de la lampe ds "Le corbeau", elle vaut tous les discours et toutes les analyses du monde).
Mais clairement, tout n'est pas noir non plus ici. On a, au milieu de ces canailles, ces morts et ces mensonges des sursauts d'humanité qui arrivent à exister chez à peu près tous les personnages. De l'amour, du sacrifice, une certaine idée de "justice" qui surnage, tant bien que mal. A ce titre, le personnage du flic, interprété de main de maitre par Louis Jouvet est sans doute le coeur du film. C'est assez amusant d'ailleurs, de ne le voir apparait qu'après une demi heure de métrage, alors qu'il en est la "star", voilà typiquement le genre de choses qu'on aurait du mal à faire accepter aujourd'hui. Mais Clouzot n'en a cure, il pense au film avant tout, et il a bien raison.

Bref, superbe film, qui n'a pas pris une ride, aussi bien une étude de caractère tout en profondeur et en nuances qu'un très agréable petit polar. La reconstitution studio du Paris des années 40 est mortelle, les interprètes sont géniaux (même si je sais que Suzy Delair irrite pas mal de gens...), la mise en scène au cordeau. Une pierre de plus dans l'immense filmo de Clouzot, peut-être pas la plus emblématique ou la plus personnelle, mais tout de même dans le très haut du panier du cinéma français.

(Re)vu sur le DVD Studio Canal. Copie correcte, en bonus quelques extraits d'itv (une quinzaine de minutes) du real et des comédiens, sympathique.

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Manolito
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Re: Quai des orfèvres - H.G. Clouzot - 1947

Message par Manolito »

Un grand Clouzot, un grand Film Noir, un vrai classique du cinéma français, avec effectivement une belle galerie d'acteurs dans des rôles mémorables, Jouvet, Delair, Blier... Une histoire pathétique, humaine, qui a effectivement le mérite de ne pas sombrer dans un négatif systématique. Je ne l'ai pas vu depuis très longtemps, mais j'en ai gardé des souvenirs marquants : la tentative de suicide au palais de justice, le petit tralala de Suzy Delair, Jouvet aidant le petit garçon à faire ses devoirs... Mise en scène et ambiance Noire très réussie. Un grand film...
Superwonderscope
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Re: Quai des orfèvres - H.G. Clouzot - 1947

Message par Superwonderscope »

En effet, du grand Clouzot - parmi ce que je préfère de lui. L'intrigue/suspense l'intéresse relativement peu, le noeud de l'affaire reste ailleurs. Une galerie riche de personnages admirablement peints et joués. Des thèmes audacieux, sans voile moral : l'homosexualité à peine voilée de Dora, l'enfant de Jouvet, il me semble que pour deux sujets, c'est une première à l'écran.
Le milieu des petites frappes, Suzy Delair en bourrasque gouailleuse, Blier minable mais attachant et JOuvet impérial. Il y a une galerie de seconds rôles épatants, jusqu'à Annette Poivre en standardiste et Bussières, toujours éclatant, en petit malfrat avec le verbe haut. J'adore cette représentation du Paris d'après-guerre (comme si de rien n'était...) offrant quelque chose de vivace à l'écran. Un mélange de désir latent, de comédie épicée (on a meme encore une femme aux seins nus aux anges collés sur le téons, qui ouvre une porte de manière totalment grauite!), de photographie d'un temps passé, populaire dans le bon sens du terme. Un vrai film noir à la française, une réussite. Très supérieur à L'assassin habite au 21 pour ma part.
Le DVD Studio canal est un peu à la peine, quand même..
Oh really? Well then I'm sure you wouldn't mind giving us a detailed account of exactly how you concocted this miracle glue, would you ?
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