Silvio et les autres - Paolo Sorrentino - 2018

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DPG
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Silvio et les autres - Paolo Sorrentino - 2018

Message par DPG »

Personne a vu le dernier Sorrentino ?

Il est en effet passé tristement inaperçu dans les salles françaises :( j'ai même du aller au Brady pour le voir vu qu'il ne passait déjà plus ds aucun UGC ou MK2 trois semaines après sa sortie !

Sorti en deux parties en Italie (1h40 chacune) sous le titre de "Loro", il a été un peu coupé et remonté pour une version unique de 2h38 chez nous. Je serais curieux de voir le montage italien mais je ne peux pour l'instant juger que celui que j'ai vu : le français.

Et bien j'ai beaucoup aimé ! :-D C'est du pur Sorrentino, dans le fond comme dans la forme, qui continue d'explorer l'Italie à sa façon, dans la pleine continuité de "Il Divo" ou "La grande bellezza". On prend ici la figure centrale de Berlusconi, qui incarne de près ou de loin, qu'on l'aime ou le déteste pas mal de choses sur le dernier quart de siècle de l'Italie. Mais ce n'est pas un biopic pour autant. On ne revient pas spécialement sur le passé de Berlusconi, et même ses liens avec le présent, on parle vite fait de politique, mais ce n'est pas le cœur du film. Le coeur du film, ce sont ses relations, avec les femmes bien sur, mais avec tout le petit monde qui gravite autour de lui, toute cette cour, allant des chefs de partis à des petits macs, des vieux amis à tous les gens qui lui sont redevables, mi-craintifs, mi-fascinés, en tout cas tous sous la coupe de la superpuissance berlusconienne et toutes les tentacules de son petit monde (immobilier, médias, sport...).

Toni Servillo, acteur fétiche de Sorrentino est une fois de plus absolument par-fait ! Il a saisi à merveille toutes les facettes du personnage, et livre une composition incroyable, avec ce qu'il faut de majesté et de pathétique, mélange bancal d'élégance et de vulgarité, de culture et de bêtise. Le film est globalement assez tendre avec Berlusconi, empreint d'une réelle fascination pour cet homme, sans cacher ses zones d'ombre (corruption, misogynie, magouilles persos en tous genres, solitude exacerbée), mais sans en faire trop là dessus. Ça a du déplaire à Cannes, nul doute que si le film avait été à charge, il aurait été sélectionné et applaudi !
Sur la forme, c'est du Sorrentino pur jus. Les scènes de fête sont incroyables, les ambiances nocturnes sont dingues, les dorures des palais tout autant, c'est beau, clinquant juste ce qu'il faut, ça flatte l'oeil, sans être jamais dupe de son sujet, dans la lignée de ses travaux précédents comme je disais plus haut, mais avec toujours le même degré d'exigence !

J'avoue que je partais un peu conquis d'avance, le sujet, les forces en présence, tout semblait fait pour moi, mais je ne suis pas déçu, le film tient pleinement la route, à tous points de vue. Les 2h38 passent comme une lettre à la Poste, les thèmes abordés sont denses, riches, ça mêle tellement de choses qu'on pourra y revenir sans problème, et même qd Sorrentino se plait à filmer la vacuité de ce monde, son vide (idéologique, culturel), il le fait avec tellement d'élégance, qu'il sublime le médiocre et le rend fascinant ! Brillant !

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"J'ai essayé de me suicider en sautant du haut de mon égo. J'ai pas encore atteri... "
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