The Birth of a Nation (2016) Nate Parker

[MadXav]

Porté pendant 7 ans par un seul homme, je serai tenté de dire que THE BIRTH OF A NATION est à Nate Parker ce que ROCKY est à Stallone. Et je pèse mes mots. Parker produit, réalise, interprète et scénarise un premier long métrage qui restera clairement comme l'un des meilleurs de 2016-2017. Une perle sans compromis, dégagée des effluves hollywoodiennes douteuses qui ont permis à TWELVE YEAR A SLAVE d'être multi-récompensé, ou le MAJORDOME de briller plus que de raison.

Non, THE BIRTH OF A NATION n'a rien à voir avec ces films usurpateurs exhibant de « gentils noirs » qui sont soit spectateurs, soit injustement maltraités. Des films dont l'hypocrisie me gène davantage encore que la réalité fantasmée d'un Tarantino dans DJANGO UNCHAINED...

THE BIRTH OF NATION nous conte l'histoire de Nat Turner. Un esclave et fils d'esclave qui jouit d'une chance incroyable : L'apprentissage à la lecture. Alors qu'il est encore enfant, sa « Maîtresse » lui confie une Bible qu'il lit et relit. Les années passent et il prêche la bonne parole au sein des esclaves de sa Maison. Ses Maîtres sont « permissifs » et bientôt, l'équilibre relatif de la plantation incite les Maisons voisines à avoir recours au prêcheur noir. Le but est d’apaiser les tensions mais Nat Turner découvre alors la condition atroce des esclaves au sein des autres plantations. Ces pratiques finissent par gangrener la Maison de Nat, et par toucher sa femme et ses proches dans leur chair. Profitant de sa position, Nat déclenche alors une sanglante révolte qui marquera l'histoire...

Visuellement magnifique, interprété avec talent et émotion, THE BIRTH OF A NATION est un film qui ose. Déjà par son titre qui fut, il y a 100 ans, celui d'un (très) long métrage incroyablement raciste et pro-Ku Klux Klan. La version de Nate Parker décide donc d'en prendre le contre-pied et d'effacer l'affront. Mais THE BIRTH OF A NATION est également un titre qui étonne lorsqu'arrive la fin du film et sa violente conclusion. Les Etats-Unis sont nés dans la sang, on le sait, et en voilà une illustration...

Le film de Nate Parker a également la correction de nous épargner comme je le disais le cliché du héros noir « lissé » par le politiquement correct. Car sa révolte est violente et c'est bien dans cette rage qu'elle puise tout son sens. THE BIRTH OF A NATION nous fait grâce également le « gentil blanc » qui nous mènerait à un dénouement heureux. Pas de Brad Pitt salvateur ici, comme ce fut le cas dans TWELVE YEARS A SLAVE. Le film nous dévoile une page d'histoire sans ce manichéisme puant qui pollue la plupart des Prod' Hollywoodiennes...

On notera pour finir que le héros est doublé en français par le slameur au propos engagé Abd al Malik...

Bref, vous l'aurez compris, THE BIRTH OF A NATION est un film à voir et à faire découvrir. Un film donc la conclusion amer ouvrira toutefois la voie à une succession de faits historiques qui mèneront à l'abolition de l'esclavage.

Bref, courez en salle, ça sort maintenant et ça passe en avant-première dans pas mal de salles !

[Manolito]

Je ne suis pas aussi enthousiaste que Madxav sur ce film, qui a quand même pour moi des limites, notamment celles d'un premier film fait avec des moyens limités, comme une photo un peu terne, des maladresses, un casting inégal (même si les principaux rôles sont bons).

Mais c'est tout de même un bon film, un film fort qui présente une image crédible du temps de l'esclavage - et une description sans doute très comparable à ce qu'on devait trouver dans nos Antilles françaises... Un esclavage qui avilit l'esclave bien sûr, au mieux traité comme un aimable enfant, au pire comme du bétail - mais aussi le maître, comme le montre le portrait du personnage de Samuel, coupable de marcher dans toutes les combines des autres esclavagistes, comme si il n'avait "pas le choix".

Il y a des scènes fortes (comme le moment où les esclaves savourent leurs premières heures de liberté en évoquant ce qu'ils faisaient habituellement à ce moment de la journée), et effectivement un film qui évite habilement le piège du paternalisme. La révolte de Nat Turner n'est pas accompagné ou encouragé par un blanc bienveillant, c'est une révolte qui va dès le départ à la catastrophe, mais elle vient de Nat et des autres esclaves, de leur humanité et de leur indignation.

Le film édulcore un peu la violence de cette révolte (les familles entières d'esclavagistes étaient tuées), mais en rend quand même la brutalité avec franchise, laissant le spectateur assez libre de son ressenti au moment du dénouement de l'histoire. Avec des scènes assez fortes en ce sens

Spoiler : :

le meurtre de Samuel par exemple...

Passé un peu inaperçu, "The Birth of a Nation" est un bon film, réussi, intéressant, et évitant effectivement le lissage et la bonne conscience sur son sujet...

Vu sur mycanal/ciné + copie HD 2.35 VM anglaise stéréo PCM