
Le commissaire Vogel (Toni Servillo)l revient à Avenchot, petite bourgade montagnarde lieu de la disparition inexpliquée de la jeune Anna Lou, en plein brouillard. Avec des taches de sang sur sa chemise, hagard, sans voix et à la suite d'un accident de voiture, il est conduit par les flics locaux auprès du psychiatre du coin (Jean Reno) pour tenter de le faire parler... et il raconte finalement l'enquête qui s'est déroulée plusieurs mois auparavant et pourquoi il est revenu.
Adapté de son propre roman, Carrisi élabore un élégant suspense jusqu'au boutiste, puisque la solution (et l'explication) n'interviennent que dans les dernières secondes du film! Il s'agit d'un co-production italo-germano française qui est restée curieusement inédite chez nous (et après voir vu le film, c'est un scandale, vues le nombres de merdes au kilomètre qu'on s'enfile). Je ne connaissais pas le roman.
Cela faisant longtemps que je n'avais pas été autant happé par un récit de suspense!
Spoiler : :
A noter une apparition surprenant de Greta Scacchi, méconnaissable, qui va livrer un ressort inattendu de l'affaire.
Plus qu'un simple thriller, Carrisi prend la trajectoire d'un flic visiblement ordinaire, qui possède en fait des tactiques pour attirer l'attention sur des cas désespérés, au risque de compromettre son intégrité. En accord avec les journalistes, il joue sur la voracité des médias pour détourner l'attention et "attendre" que le bouc émissaire choisi craque - ou pas. D'autant que de cadavres, il n'y a pas.
Intervient un jeu sur les 15mn de célébrité, la société spectacle, la perméabilité de la vérité, l'interpénétration police/média et le jeu de ronds de jambes et d'échanges d'informations.
Ici, c'est un professeur de littérature muté 6 mois auparavant (Alessio Boni), coupable idéal , qui va se trouver dans la tourmente, jeté en pâture à la vindicte publique. une journaliste plus ou moins complice (Galatea Renzi) sait que ce n'est pas nouveau, puisque le cas précédent du "tueur-mutilateur" de Vogel s'est soldé par le même schéma: un innocent jeté en prison mais innocenté 4 ans après...
En fait, la complexité de l'intrigue révèle graduellement de nouvelles couches de mystères au gré des 128mn du film. Filant sur tous les indices, sujets à toute interprétation possibles et imaginables, une vérité multi-facettes. Complexe, riche et doté d'un visuel splendide dans un Scope majestueux, épuré... scrutant à la fois les grands espaces et revenant en gros plan sur une maquette du village gardée scrupuleusement dans la piscine vidée du coin., tourné dans le Haut Trentin (Sud Tirol) qui donne un aspect encore plus mystérieux. C'est rageant de ne pas pouvoir parler de ce qu'il se trame vers le derniers tiers du film, mais au risque de dévoiler trop d'éléments... je me tais et je ne mets même pas de spoilers...
Pas un chef d'oeuvre en soi, mais un premier film qui promet une belle suite pour le réalisateur. Les dernières images sont rivantes, retournement de situation à l'image du film : sans spectaculaire, tranquille, glaçant. Bref, très recommandé. (PS : je vous déconseille la vision du film annonce italien, qui en révèle un peu trop à mon gout...) le blu ray italien est à moins de 10€ et à ma connaissance (avec des st italiens et anglais, et de très belle qualité)°, il n'est pas du tout disponible sur le territoire français, avec des droits détenus par StudioCanal.
Fun fact :... et l'assistant réalisateur n'est autre que Roy Bava, petit fils de Mario et fils de Lamberto, devenu aujourd'hui l'un des premiers assistants les plus recherchés en Italie, ayant travaillé comme real seconde équipe dans Everest, American Assassin ou sur la série Le Nom de la Rose...