
En Bretagne, l'isolation solitaire d'Agnés, une jeune adolescente (Patricia Gozzi) se heurte à un père (Melvyn Douglas) reclus empli d'amertume. Son horizon se voit quelque bouleversé à l'arrivée d'un fugitif (Dean Stockwell) d'on elle s'imagine tomber amoureuse.
... comment dire, ça a été une petite claque que je me suis prise en visionnant le Blu Ray Twilight Time (US), tiré à 3 000 exemplaires. Tout d'abord, la copie est exmeplaire. un Scope noir et blanc sublime, bercé par une partition musicale qui l'est tout autant de la part de George Delerue (elle est disponible sur une piste isolée dans le BD)
Ne connaissant pas le film et partant avec la filmo de Guillermin en tête (La Tour Infernale, King Kong, tout ça...), rien ne prépare vraiment à la vision de Rapture (VF : La Fleur de l'âge). Le film est une sorte de drame à mi-chemin entre l'éveil à la sexualité et l'explosion d'une cellule familiale. Mais le ton utilisé, le choix du noir et blanc, cette espèce de valse tragique extrêmement touchante et en même temps transgressive a de quoi en faire un objet filmique non identifié. Et la production du film était sacrément osée pour 1965!
Le film commence par un mariage que l'on sent pas très heureux, un plan large en hélicoptère, pour se terminer par un plan séquence assez remarquable au milieu de la fete qui bat son plein. Le plan-séquence s'achève sur la fuite d'Agnès, qui refuse de se laisser embrasser par un garçon un peu trop excité. En l'espace de ce plan on aura compris plusieurs choses : le côté rebelle de la jeune fille, l'embarras qu'elle créé face à son refus de se confirmer à ce qu'on attend d'elle. Mais surtout l'éloignement de chacun, incapables de comprendre l'autre. J'apprécie beaucoup Guillermin comme metteur en scène d'action, il possède un sens du mouvement évident. mais je n'aurais honnêtement jamais imaginé qu'il puisse avoir une finesse psychologique (alliée à une technique irréprochable) pour manier avec délicatesse -et hardiesse- un sujet aussi problématique.
Le film repose essentiellement sur l'interprétation tout en finesse des 3 acteurs principaux. Mais surtout, surtout l'incroyable Patricia Gozzi. Héroïne des Dimanches de Ville d'Avray (qui obtint un Oscar en 1962, tout le monde l'aura oublié...), elle eut une fulgurance qui la transporta sur Rapture. Elley est tout bonnement incroyable. A la frontière de la fragilité, de l'enfance et de l'adolescente, en borderline permanent (est-elle dérangée ou non?), elle porte le personnage d'Agnès à bout de bras.
Et le sujet n'est pas simple; de montrer le passage à l'age de femme d'une jeune fille de presque 15 ans, qui compte son premier amour dans les bras d'un meurtrier, dont on voit l'accident de voiture et l'exaction dès les premières minutes du film. J'ai en fait un peu de mal à imaginer les réactions du public face au sujet et au traitement sensible qui lui est réservé, tant ce qui est dit est montré suggère l'impensable.
Le film fut un grave échec commercial et demeura invisible pendant pas mal de temps.
Rapture possède une beauté tragique qui m'a scotché pendant tout le long. une succession de scènes parfois muettes, ou transparaissent la force des regards. D'autres à la folie presque palpable (les scènes au bord de la falaise). En fait, le film m'a poursuivi pendant plusieurs jours. Je le considère comme inoubliable, et assez troublant.
=> Il FAUT le voir!