Maigret tend un Piège - Jean Delannoy (1957)

[Superwonderscope]

Plusieurs jeunes femmes sont retrouvées assassinées à coup de couteaux en pleine poitrine et leurs vêtements lacérés. le commissaire Maigret (Jean Gabin) décide de tendre un piège au tueur en envoyant une jeune policière en guise d'appat. Le boucher du coin (Alfred Adam) est suspecté. La jeune fille réchappe d'une agression mais l'un des inspecteurs (Olivier Hussenot) remarque une jeune femme (Annie Girardot) qui assiste à l'attroupement suite à l'événement et quitte les lieux de manière suspecte. Elle n'est autre que la bru de la propriétaire de l'immeuble où se trouve l'atelier du boucher.

Excellente surprise que cette adaptation de Simenon. Gabin est... ben, Gabin quoi. IL fait du Gabin (mimiques, ronchonnades, coups de colère) on a donc une interprétation relativment calibrée. Mais Delannoy réussit à faire passer quelques ambiguités, quelques hésitations et une certaine amertume du personnage qui font mouche (voir la toute dernière scène lorsque la pluie se met à tomber).

L'histoire assez tortueuse de psychopathe assassinant de jeunes femmes préfigure quelque peu l'imagerie reprise du Giallo quelque temps plus tard - tout en empruntant quelques codes de quelques krimi allemands sortis juste avant-. Jeunes femmes tuées, frustration sexuelle, armes blanches, lacérations... avec une intrigue en forme de whodunit, révélation du coupable en fin de métrage et cogitations du commissaire.

C'est bien troussé, avec ce qui faisait aussi le charme du cinéma français des 50's. Seconds rôles savoureux bien écrits (Alfred Adam, Gérard Séty en gigolo, Lino Ventura en flic qui fait déjà du Ventura sauce Audiard..) des dialogues d'Audiard qui n'ont pas encore toute la brillance de la période Lautner mais qui ont déjà un aspect bien tranchant.

Une intrigue assez solide, tenue à bout de bras par un quatuor de haute volée : Girardot/Desailly/Gabin/Bogaert et qui se permet un twist final malgré que l'intrigue soit pliée. Bien vu.

Très beaux plans extérieurs/décors, largement mis en valeur par une photographie en cloiar/obscur de Louis Page assez inspiré pour faire passer ce petit goût amer et nonchalant (à mon sens bien mieux que dans l'Affaire st Fiacre ou que Maigret voit rouge) de l'ensemble; un gout de Paris-poulbot très sympathique sans jamais se moquer des personnages. Et surtout une partition excellente de Paul Misraki!

Au final, malgré tout, le film est terriblement misogyne et un brin réac -mais les années 50 étaient loin d'etre progressistes et le cinéma français loin de ça aussi... -. les femmes sont invariablement : des castratrices, des salopes, des manipulatrices. il n'y a guère que la femme de Maigret qui échappe au massacre mais elle est tellement translucide que bon, le message est clair : pour que les hommes soient des vrais hommes, les femmes doivent rester à leur place (fourneau, gamins, tout ça)

Vu sur le dvd de chez rené Chateau/TF1 Video. Belle copie 1.33:1 avec quelques saletés ici et là et des contrastes parfois mal maitrisés. Mais il y a une assez jolie définition qui laisse une impression de qualité au finish. pour un dvd rené Chateau (avec menus animés et film annonce), c'est une bonne surprise.

1H50
NB
1.33:1
mono français sur un canal central.

(Merci à Saturn : 1.99 € à Aubergenville.)

[Manolito]

De la solide ouvrage bien de chez nous, pour film policier robuste, mené par un Gabin dans son interprétation classique de Maigret. Le "Monster Bis" spécial cinéma fantastique français qualifiait ce film de giallo français. C'est certes aller un peu loin. Mais il y a certainement une ambiance particulière, héritée du cinéma américain par exemple, louchant vers l'étrange et un chouia d'expressionnisme. Cela l'éloigne un peu de la veine plus réaliste du Film Noir français.

L'exploitation du quartier de la place des Vosges est en ce sens intéressante et donne sa personnalité à ce métrage. Pour l'enquête, c'est plus classique, mais agréable à suivre, avec un dénouement nous renvoyant aux films de psychopathes hollywoodiens (Les mains qui tuent, Deux mains la nuit) qui sont eux-mêmes des sources du Giallo. Enfin, la misogynie du métrage peut aussi découler de l'oeuvre de Simenon, assez renommée en la matière !

[DPG]

Un bon moment. Polar français classique, mais efficace. La mise en place fonctionne bien, les personnages ont de l'épaisseur, et l'utilisation du quartier de la place des Vosges est très réussie. Belle ambiance d'un Paris populaire lointain, joli N&B, Gabin qui fait le job, des seconds rôles soignés, bref, tout un savoir faire du cinéma français de l'époque qui tourne à plein régime. Il y a bien quelques petites longueurs ou trucs un peu datés, mais ça fait aussi partie du charme du film. Un bon Maigret, carré, prenant.

Vu sur Paris Première, copie HD de toute beauté !

[comte vonkrolock]

Pour rappel le film est trouvable du coté de l'Allemagne dans une excellente copie HD, il y a même l'affaire Saint Fiacre a un prix donné (6€).





Alors que chez nous faut se contenté de DVD et à un prix excessif parfois