Au detour d'une conversation, j'avais totalement oublie le film. Il faut dire qu'il a quelque peu disparu de la circulation, Gaumont ayant à mon sens discrètement enterré le film.
Et mes souvenirs sont comme tels:
Sur ce maigre canevas, et en sortant de 37 2 le matin, Beineix a convaincu la Gaumont de lui confier un budget maousse (pris de 40 millions de francs, si je me souviens bien, énorme pour l'époque.), avec un lancement marketing et communication hors norme.
Je m'en souviens particulièrement bien car je travaillais à ce moment au cinema Max Linder, qui avait été choisi comme lieu de l'avant premiere nationale. On avait été tous déguisés en Monsieur Loyal (costumes conçus par Stephane Plassier spécialement pour le coup. On avait tous l'air constipés a un point
Et là, le desastre. En plein milieu du film, Claude-Marie Trémois (de telerama, pour les petits jeunes) sort en furie de la porte
de droite de l'orchestre en hurlant que c'était de la merde, qu'il n'était pas possible que Beineix ait fait un truc pareil. J'étais en face d'elle a ce moment et honnêtement, je ne savais pas qui elle était jusqu'a ce qu'on me dise son nom. Là, je me suis dit que Telerama allais avoiner le film. Bon, pas grave, c'est pas ma came. Et de toute façon, j'avais envie d'aimer le film.
Mais.
Les spectateurs sortent les uns après les autres, la gueule de travers. A la fin, les 2/3 du buffet ont été jetés. Le directeur/programmateur de l'époque (jean-Jacques Zilbermann) croyait dur comme fer au projet et avait signé une exclusivité de 3 semaines. Il avait la gueule des mauvais jours . Bon, en étant honnête, il l'avait souvent.
Grosse campagne dans le metro et sur des 4 x 3 extérieurs.
Febrilement, on attend la premiere seance du 12 avril - parce que dans l'équipe, dans mon souvenir, on avait tous envie que ca marche et surtout , d'aimer le film.
Tout de suite, on sait que ca ne marchera pas. Il n'y a quasiment personne (j'ai en memoire un chiffre de 13 spectateurs, mais bon, c'était il y a 36 ans). Zilbermann sort la tete renfrognée du cinema. et surtout, certains membres de l'équipe voit le film et les premiers retours sont mauvais.
Je le vois deux jours après. C'est vraiment pas bon. Gros moments de gene, Mais surtout, ca fait cheap a l'écran. Le choix du 1.85:1 me parait incompréhensible pour un grand spectacle. C'est tout étrique et surtout, pas tres excitant. J'adore Isabelle Pasco mais meme la, elle ne peut sauver le film. Et c'est tres long. Des scenes ahurissantes s'empilent, genre la danse des petits chats juste avant le final. L'hallu totale, des rires genés dans la salle. Et le final arrive. Magnifique musique de Reihardt Wagner. On attend que ca envoie du steak, ca sauve juste le film pour ceux qui sont arrives au bout. Il n'y a pas de final grandiose. Ca me parait tout petit. Je sors dépité du film et qu'au final, l'échec me parait justifié. J'avais acheté la cassette audio de la musique de film que j'ai écouté tres, tres longtemps. Mais c'est bien tout.
je me souviens que les jours suivants, on se relayait dans le cinema pour s'avertir mutuellement de l'arrivée de la scene finale. Quelquefois, on fermait les portes d'entree pour assister au dernier quart d'heure. Et on repartait travailler... ou presque , car de toute façon, il n'y avait personne aux seances. C'était assez triste d'assister a cela. D'une part parce qu'on se faisait chier, et d'autres, on sentait que les choix de programmation étaient en dépit du bon sens.
Le film a rapidement disparu des écrans, sauf du réseau Gaumont pour tenter de porter le film un maximum. Il cumulera 413 338 entrees (dont un peu plus de 123 000 sur Paris au cumul, soit une misère et un mauvais bouche a oreille), tres loin des 3 630 510 tickets vendus de son precedent long métrage. Et surtout, une perte sèche pour la firme a la marguerite.
La carriere de Gerard Sandoz ne s'en est jamais remise. isabelle Pasco a enchaine ensuite les roles de Prospero's Book et Celine, mais surtout les bides, hélas (dont l'épouvantable A Quoi tu pense-tu? ou le sympa Les Couleurs du Diable). Je l'avais vue passer devant le vidéoclub ou j'allais dans le 15e, un oeil au beurre noir et le visage en pleurs. Probablement une beigne collée par Tcheky Karyo, qui passait toujours halluciné et en colère. Ca m'a rendu encore plus triste.
Il y a eu un DVD, et puis plus rien. J'ai cherche pour savoir s'il n'y avait pas une edition quelconque ailleurs. Rien de marquant. Ou presque.
Je viens d'apprendre qu'il existait une version longue (wtf?) de 176 minutes, exploitée a la television française il y a 24 ans. La vache. Je ne sais pas si j'ai envie.
En tous cas, elle est sur YouTube.
Voila pour mes souvenirs. Ca m'a donne encore moins envie de revoir le film, en fait.
PS: on avait surnommé le film Rosepine dans le fion, tant Gaumont l'avait eu profond.


