Angleterre, 1645. Le pays est dechire par la guerre que se menent les parlementaires et les royalistes. Profitant du chaos dans lequel sombre le pays, Matthew Hopkins, chasseur de sorcieres auto-proclame, parcourt le pays en quete de victimes. Son chemin croisera celui d’un jeune couple sur le point de se marier. Le drame prend son cours…
Production britannique de la Tigon, a l’epoque avec l’Amicus et la Hammer, une des trois grandes compagnies dediees aux films fantastiques en Angleterre, le metrage se depareille des productions “rivales” par de nombreux details.
Par rapport aux films de la Hammer, WG effectue un superbe travail sur l’espace et la profondeur et dans les scenes en exterieurs en general. Des les premieres scenes, Reeves (La Sorella di Satana (1966), The Sorcerers (1967) ) utilisant une approche naturaliste et tout en energie cynetique (les courses et poursuite a chevaux), mettant en scene une nature “pure” par opposition a la sauvagerie “humaine” ambiante. Ceci tranche d’office avec les production Hammer, qui malgre leurs magnifiques decors, se limitent souvent a des jeux “en chambres” ou studios.
Par rapport au “tic victorien” de la Hammer, la Tigon utilise egalement la premiere des trois guerres civiles ayant ravage l’Angleterre du 17eme siecle et le chaos qu’elle genera comme decors, apportant de par son arriere-fond historique et ses allusions aux debordements resultants de la chasse aux sorcieres qui s’est dechainee sur le continent europeen un cadre des plus interessants.
Insistant toujours sur son cote “naturaliste”, Reeves, aussi a l’origine du scenario, decide de se centrer sur la “petite histoire” que sur la grande, et evite donc tout affrontement “direct” avec des adversaires tous trouves, tels les royalistes, les republicains ou encore l’eglise. A l’arrivee, et meme si son recit est complement “apolitique”, indirectement et via l’accusation d’heresie du pretre, il renvoit, non peut-etre pas l’active folie purificatrice des hommees d’eglise, mais a leur impuissance a l’enrayer ou a meme a s’y essayer.
Il est interessant de noter, que meme si au courant de la fievre “inquisitrice” qui s’abattit sur l’Europe, le spectateur pourrait etre surprit d’apprendre que Matthew Hopkins a reellement(!) existe et a effectivement ecume les regions de Essex, Sussex et Norfolk. Si la rumeur publique (et historique) affirme qu’il aurait ete lynche par la populace, il semblerait que malheureusement, il soit mort dans sont lit de tubercculose a l'age de 27 ans, une fin tres douce pour un homme aussi violent.
Le veritable “Mal”, en fait de sorciere et contrairement a ce que pourrait peut-etre laisser sous-entendre le titre, reside dans le coeur des hommes, et que justement, ceux qui se proposent de defendre celui-ci, en vantant parfois leur purete, sont les plus a craindre. “Mefiez-vous des faux prophetes”, pourrait en filigrane etre le message du film.
A ce titre, le duo de monstres du film, entre la brutalite et le sadisme de John Stearne (Robert Russell en veritable “barbare”, fort lorsqu’il a la loi derriere lui et lache, une fois seul) et le machiavelisme opportuniste, teinte de religieux et de mysoginie de Matthew Hopkins (un splendide Vincent Price tout en froide retenue) restent impressionant encore presque quarante annees plus tard.
Si le film, malgre les nombreuses horreurs montrees a l’ecran depuis, a perdu au niveau du cote “choc”, reste neanmoins marquant, grace justement a l’approche sans fard de Reeves, qui n’hesite pas a soumettre des corps deja ensanglantes a la torture et a la potence, suggerant une campagne anglaise ravage par la folie, et ce, malgre un budget qui ne rivalisait certainement pas avec une grosse production “historique” l’epoque.
Neanmoins, a l’epoque, le film eu beaucoup maille a partir avec la censure pour qui le film etait “extreme” et demanda des coupures sur le produit fini (en fait, de telles demandes avaient deja ete faites par le comite de censure au moment ou le scenario lui a ete soumis—donc, AVANT le tournage(!) ). Meme mutile en phases pre- et post-productions, le film genera a sa sortie, et malgre son succes public, des critiques generalement negatives. Un tord qui a ete corrige depuis.
Il est a noter, qu’indirectement, le succes du metrage lanca une petite mode (surtout en Allemagne) ou Hexen bis aufs Blut gequaelt (1970), Hexen geschaendet und zu Tode gequaelt (1970) et Night of the Blood Monster (1970), lui succederent sur le creneau du “Witch-finding” sanglant.
Au niveau de l’interpretation, le casting est tres bon, et ce, des voyeurs ou participants “passifs”, aux exactions du chasseur de sorcieres, au duo de predateurs sadiques et sexuels, en passant par le couple qu’ils laisseront brise sur leur chemin. A ce titre, Ian Ogilvy (future Simon Templar a la television dans Return of the Saint (1979) ) en homme brise en quete de vengeance livre egalement une excellente prestation.
A noter que tout au long du tournage des tensions entre Reeves et Price continuerent, le premier detestant cordialement le second qui lui avait ete impose en remplacement de Donald Pleasance par l’A.I.P. de Samuel Z. Arkoff qui avait investi dans le film. Mais a l’arrivee, Price considere que WG est l’un de ses meilleurs metrages, et regrette juste que Reeves n’ait pas reellement trouve le moyen de “communiquer” la performance qu’il voulait obtenir de Price. (A vrai dire, il semble que Reeves ait laisse tout le casting dans le doute de ce qu’il attendait d’eux d’ailleurs.).
A noter au passage, la tentative bassement mercantile de l'A.I.P. de distribuer dans certains pays le film sous le titre Conqueror Worm, ce dans le but de le lier (tres artificiellement) a leur cycle sur Poe (deja en partie avec Price).
A mi-chemin entre la petite histoire, le “rape and revenge” en “costumes (historiques)”, et le recit d’exploitation, le film se forge neanmoins une identite propre (ceci n’etait pas donne au depart!), car proposant des personnages epais, une realisation “serieuse” et “honnete” dans son propos, le tout au service de cette chronique apres et violente qui rappelle parfois The Last Valley (1970) de James Clavell, ou des hommes de raison essaient de creer et maintenir une oasis, un paradis en plein milieu de la folie medievale…
A voir, pour l’interpretation, et surtout pour l’approche sans fard—aucun!
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Witchfinder General / Le grand Inquisiteur de Michael Reeves (1969)
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Re: "Witchfinder General" de Michael Reeves (1969), zo
En direct du Japon. Bonsoir. A vous, Cognac-Jay.
Re: "Witchfinder General" de Michael Reeves (1969), zo
Vu sur le forum dvdclassik, annoncé en bluray anglais chez odeon pour 2011 !


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Re: "Witchfinder General" de Michael Reeves (1969), zo
Sa place est dans un Blu-Ray !
Re: "Witchfinder General" de Michael Reeves (1969)

Revu Le grand inquisiteur sur le blu ray de BQHL.
La réalisation de Michael Reeves est solide. Le film contient à la fois de belles images, comme les paysages, et des scènes plus violentes, mais c'est toujours bien filmé. C'est son film le plus abouti. Il est facile de constater sa progression (entre The she beast, La créature invisible et celui-ci) et cela nous fait regretter sa mort prématuré.
Vincent Price, bien dirigé par Michael Reeves, a une interprétation plus sobre et dur, c'est très judicieux.
Il est bien entouré par les autres acteurs. Robert Russell, son assistant, est excellent, Ian Ogilvy convaincant et Hilary Dwyer également.
Le grand inquisiteur reste un très bon film.
Le scenario, même s'il n'évite pas certaines répétitions, est efficace.
Le final est très réussi, marquant.
Le film a néanmoins un défaut, c'est au niveau de l'unité militaire, qui parait insuffisamment étoffée en figurants.
Cela a beau être une histoire clairement au second plan, cela nuit un peu à la crédibilité.
Image satisfaisante, malgré quelques fourmillements et autres légères imperfections.
Son (en VO) convenable.
Dans les suppléments, un début et une fin alternatifs (d'une version américaine sans intérêt), ainsi que des scènes de nudité dans la taverne (initialement pour une version d'export).
Il y a un intéressant entretien avec Bruno Terrier sur le film.
Un autre bonus évoque, avec plusieurs intervenants, la courte carrière de Michael Reeves, c'est également intéressant, émouvant aussi.
Enfin, un doc sur la sorcellerie en Angleterre, un peu curieux sur la forme mais qui reste un assez bon complément.
Il y a aussi un petit livret.
Modifié en dernier par japi le lun. févr. 01, 2021 7:23 pm, modifié 2 fois.
Re: Witchfinder General / Le grand Inquisiteur de Michael Reeves (1969)
Un film dont j'avais chroniqué une édition dvd anglaise il y a longtemps. Le texte est ci-dessous :
http://www.devildead.com/review/1098/wi ... nquisiteur
C'est un film à petit budget par cerrtains côtés, et c'est vrai que c'est un peu dommage. Mais dans la série des films à base d'inquisiteur de l'époque, s'il va moins loin que "La marque du diable" (qui lui est postérieur) dans les délires de torture. Mais il y a dans "Le grand inquisiteur" une ambiance sérieuse, historique, qui ne prête pas à la rigolade, avec effectivement un Vincent Price à contre-emploi dans un rôle de salaud joué au premier degré, sans humour. Ce n'est pas un classique immortele du cinéma fantastique anglais, j'avoue que j'en attendais plus lorsque je l'ai découvert, mais il s'agit tout de même d'un métrage particulier, avec sa propre personnalité et sa tonalité vraiment sombre.
http://www.devildead.com/review/1098/wi ... nquisiteur
C'est un film à petit budget par cerrtains côtés, et c'est vrai que c'est un peu dommage. Mais dans la série des films à base d'inquisiteur de l'époque, s'il va moins loin que "La marque du diable" (qui lui est postérieur) dans les délires de torture. Mais il y a dans "Le grand inquisiteur" une ambiance sérieuse, historique, qui ne prête pas à la rigolade, avec effectivement un Vincent Price à contre-emploi dans un rôle de salaud joué au premier degré, sans humour. Ce n'est pas un classique immortele du cinéma fantastique anglais, j'avoue que j'en attendais plus lorsque je l'ai découvert, mais il s'agit tout de même d'un métrage particulier, avec sa propre personnalité et sa tonalité vraiment sombre.