
Robert Siodmak n'est pas loin du chef d'oeuvre du thriller gothique avec cette adaptation du roman Some Must Watch d'Ethel Lina White. C'est tout simplement un des meilleurs thrillers jamais réalisés. On pourra le rapprocher des meilleurs Hitchcock, en tous cas, un excellent compagnon avec, par exemple, le Sorry, Wrong Number d'Anatole Litvak en 1948.
Il s'agit d'une production RKO (initiée par David O. Selznick et produit par Dore Schary)
Cette histoire de jeune fille muette habitant dans une sinistre maison où se cache (peut être?) un tueur qui s'attaque aux femmes avec des infirmités a tout pour plaire!
La mise en place de la demeure victorienne, où se concentrera la majeure partie du film, va de pair avec la présentation de chaque protagoniste. L'aieule de la famille (jouée par Ethel Barrymore, nominée aux oscars pour la peine), aigrie et coincée au lit par la maladie, ordonne à son aide muette (DorothyMcGuire, impressionnante) de quitter la maison car elle sent un danger se profiler. Son premier fils (George Brent) semble contrôler la maisonnée, mais c'est san compter sans son autre fils, collectionneur de femmes dont la dernière en date est la secrétaire de Brent (Rhonda Fleming). D'autres pistes du tueur éventuel sont semées ici et là : le gardien(sinistre), l'infirmière (altière)...tous semblent avoir un comportement étrange autour de la jeune fille apeurée! Un seul personnage échappe au climat ambiant, c'est Elsa Lanchester, dans le rôle de la cuisinière portée sur la bouteille : elle y est savoureuse.
Bien plus qu'un thriller noir, Spiral Staircase se permet des débordements expressionnistes du meilleur effet, ajoutant le bizarre au suspense. Une caméra fluide, mobile, rasant le sol comme le mal qui épie et attend son heure. Comme à son habitude ( comme pour The Killers, Phantom Lady ou Criss Cross), Siodmak agrémente sa mise en scène de tensions psychologiques propres au lieu dud rame, problèmes de couple ou de complexe d'Oedipe.
Le jeu des ombres se confond avec le jeu de miroirs qui se répondent le long du film. la photographie combine les effets étranges (comme la vision de Dorothy McGuire privée de bouche), les travellings avant sur l'oeil du tueur jusqu'à plonger dans les tréfonds de son iris contracté.
Référentiel et visuel, Spiral Staircase s'ouvre sur une assemblée qui regarde la projection d'un film... muet (Le Baiser).
A voir la mise en scène des meurtres où l'on voit à travers l"oeil du tueur, déformant sa vision des victimes et celles-ci terrifiées, mourant le visage couvert, avec seulement les mains crispées de douleur. Une vraie réussite.

Le magnifique transfert présent sur l'éditon MGM semble provenir de l'édition précdente de chez Anchor bay (?). Côté bonus, une bande annonce de Secret Window (???) s'est perdue sur la galette. N'importe quoi.
Le film sera refait en 1975 par Peter Collinson, avec Jacqueline Bisset et Christopher Plummer, John Philip Law. Tape à l'oeil et inutile, c'est pratiquement une copie conforme (sorti en VHS Warner il me semble sous le titre La Nuit de la Peur?).
Grand Xerox devant l'éternel, Umberto Lenzi repiquera les 2/3 de l'intrigue (pour en changer le final) de Spiral Staircase et pondra Il Coltello di Ghiaccio/Dagger of Ice en 1974 avec Carroll Baker et Evelyn Stewart, un giallo hitchockien sage.
1H24. 1.33:1, VO anglaise avec st français et anglais.
Un must, absolument.