Sur les écrans en ce moment, “Le Chaos” du grand Youssef Chahine devrait combler les fans de l’artiste. Amoureuse d’un jeune procureur, une demoiselle doit faire face aux avances de plus en plus pressantes d’un fonctionnaire de police tout à la fois violent et libidineux. Explicite ici, le contenu social cristallisé par une romance somme toute convenue explique l’intensité avec laquelle le cinéaste aborde son sujet. Révolte du petit peuple contre un pouvoir autoritaire et corrompu, des femmes contre la primauté du masculin, du réalisateur contre l’extrême timidité de productions locales encore trop sages pour lui; Chahine ne s’attarde pas vraiment sur la peinture traditionnelle d’une société sclérosée mais il préfère s’intéresser directement à l’exacerbation des tensions et passions. D’où la violence et l’érotisme sulfureux d’images aussi troublantes qu’une danse lascive effectuée par des prostitués, de tortures naturellement fort éprouvantes, de déhanchements, ½illades, sourires et nudités époustouflants d’ambiguité et de beauté.
SPOILER, SPOILER
Point d’orgue du métrage, une séquence de viol dont la perversité originelle se trouve amplifiée par l’appartenance du bourreau aux grandes figures tragiques des amoureux transis.
Monstre d’amour et ogre sexuel, le policier confirme le caractère sublime d’un sentiment qui, de l’Orient à l’Occident et de tout temps, ne peut se vivre, voire aboutir, que par et dans la mort. Du grand art.
Le Chaos, Youssef Chahine, 2007
Modérateurs : Karen, savoy1, DeVilDead Team