
Chef d'oeuvre absolu de Douglas Sirk, maître du mélodrame flamboyant made in Hollywood.
Lora Meredith (Lana Turner) veut devenir comédienne. Sa fille se lie d'amitié avec sarah jane, une femme fille à la peau presque blanche. Elle est la fille d'Annie Johnson (Juanita Moore, bouleversante!), une femme noire sans abri. Toutes les quatre, elle vont affronter 10 ans de bas et de hauts. de l'ascencion de Lora jusqu'aux tourments de sarah Jane (Susan Kohner) qui va tout faire pour dissimuler ses origines.
Que dire, si ce n'est qu'on a à faire à un film absolument sublime. La mise en scène transcende un scénario qui tend au larmoyant facile. Des variations sur les décors, des costumes qui sont en accord avec chaque période de la vie des protagonistes. Des tonalités de gris au début, des explosions de couleurs au milieu, avec un retour au gris final. Des éclairages travaillés au millimètre : sur les visages, sur les décors... les pointes de couleurs placées aux endroits stratégiques afin de prolonger le regard, d'approfondir le champ de vision. Des rappels de couleurs d'un époque à l'autre ( par exemple : le canapé du premier appartement avec quatre coussins dont un rouge - correspond celui de la seconde époque, avec également quatre coussins - dont un rouge).
Idem pour les études de caractère : Lana Turner est une veuve volontaire, indépendante, qui d-fera tout pour réussir, oubliant sa vie et sa fille au passage. Quintessence des héroïnes de chez Sirk (Jane Wyman dans Le Secret magnifique ou Tout ce que le ciel permet), elle donne une vision moins manichéenne de l'Amerique de la fin des années 40 et début des années 50. le plus audacieux demeure le ortrazit déchiré d'une femme noire ayant une enfant métisse. Qui tackle les différences raciales bien présentes dans les années 50 dans le cinéma & la société américaine. le discours de Sarah Jane est sans concession : puisque sa peau est blanche ou presque, elle ira jusqu'à renier ses origines pour vivre. renier sa mère, sa peau, sa chair. Malgré ce que sa mère endure pour lui transmettre sa vérité ("comment expliquer à son enfant qu'elle est née pour souffir?"), elle apprendra que se mentir à soi tout comme aux autres ne la mènera qu'à la solitude de l'existence.
Hymne à l'indépendance féminine sur 4 femmes, quatre visions de la vie, le film n'accorde que peu d'importance aux hommes. John Gavin traverse la vie de Lana/Lora. l'amour est là mais il passera après bien des projets. Jusqu'à opposer une mère et sa fille.
Le final (avec entre autres Mahalia Jackson qui interprète "trouble of the world") est d'un souffle dramatique impressionant, l'un des plus beaux jamais réalisés. Emouvant jusqu'aux larmes.
(PS: Pedro Almodovar va se servir de ce matériau et s'en inspirer plusou moins ouvertement pour son Talons Aiguilles.)
Au risque de me répéter : c'est un pur chef d'oeuvre!
Dans le coffret Douglas Sirk sorti par Carlotta Films, la copie est superbe (peut etre un chouia trop lumineuse par moments?). Bonii en rafale sur le second disque, mais d'un intérêt que j'ai trouvé très en deça. Christophe Honoré revient sur l'influence du film, Une analyse de jean Louis Bourget en comparaison avec la version de John Stahl et celle de Sirk.
les deux bonii les plus intéressants :
la première version du bouquin de Fannie Hurst, tourné par John Stahl en 1934 avec Claudette Colbert et la vision de Sam Staggs, essayiste, qui revient sur la génèse du film.
Piste sonore : mono sur un canal (un peu étouffé par endroits) , avec st français.
Je préfère la version sortie en Z1 (sans bonus, sauf la bande annonce), qui offre un mono sur deux canaux, bien meilleur qu'ici.