Une haine féroce oppose les Feather et les Gutshall, à propos d'une prairie. Survient une jeune fille qui est prise pour la fiancée d'un Gutshall et enlevée par les Feather. La querelle s'envenime et devient sanglante.

Ne serait-ce qu’à cause de son casting de dingue, réunissant Rod Steiger, Robert Ryan, Jeff Bridges, Gary Busey, Ed Lauter, Scott Wilson, Randy Quaid, Paul Koslo et la craquante Season Hubley dans l’un de ses premiers rôles, Lolly-Madonna XXX est un film que j’avais envie de voir depuis fort longtemps. Le fait qu’il soit réalisé par Richard C. Sarafian, auteur d’au moins 2 petits classiques du cinéma US des seventies, Point limite zero et Man in the wilderness, n’était pas fait pour me déplaire non plus et si son sujet – une guerre entre 2 familles de paysans au fin fond du Tennessee - pouvait paraître rebattu, j’avoue que j’étais relativement confiant dans la qualité du traitement que le cinéma américain de cette époque était susceptible de lui apporter.
L’attente était donc forte chez moi, et le film s’avère largement à la hauteur de celle-ci. Déjà, afin de situer un peu l’ambiance dans laquelle nous plonge cette Fille nommée Lolly Madonna, j’évoquerai Le Pays de la violence de Frankenheimer et The Migrants de Tom Gries, d'après Tennessee Williams, saupoudré d’un zeste de Délivrance, pour la brutalité de certaines séquences et le cadre, éloigné de toute civilisation, dans lequel se déroule 90 % du récit, et qui nous rappelle par moment Man in the wilderness, film dans lequel la nature joue également un rôle prépondérant. Sordide, cruelle, mais jamais racoleuse, l’intrigue est a contrario empreinte d’un lyrisme bucolique, d’une douceur tragique diffusant admirablement bien une tension constante. Car évidemment, dès le départ, on sait que cette affaire va mal tourner (la voix-off du personnage de Season Hubley nous l’annonce d’ailleurs plus ou moins). Sarafian ne brusque pas les choses, prend son temps – peut-être un peu trop – mais l’histoire y gagne en épaisseur, les personnages – qui pouvaient apparaître dans un premier temps comme de simples péquenots à moitié abrutis – en complexité. L’ensemble prend au final l’allure d’une sorte de réflexion / portrait de l'Amérique en mutation du début des années 70, comme l’était d’ailleurs déjà Vanishing Point. Les 2 films partagent également une fin typiquement seventies, totalement nihiliste, que certains jugeront frustrante, d’autres audacieuse.
Pas de surprise concernant l’interprétation : c’est du tout bon (même si Rod Steiger en fait, comme d’habitude, toujours un peu trop). Le film se distingue également par la qualité de sa sobre partition musicale, signée Fred Myrow, utilisée avec parcimonie par Sarafian, ainsi que par une photo qui m’a semblé plutôt inspirée. Je dis « qui m’a semblé » par ce qu’en fait le film est en scope, mais la copie fatiguée présentée récemment sur TCM (en VOST cependant) plein cadre.