"Vivre sa vie" est tourné au coeur de la période la plus populaire de la carrière de Godard, entre "A bout de souffle" et "Pierrot le fou". C'est aussi un de ses films les plus appréciés par la critique ou les autres cinéastes - Fassbinder en parlait comme de son film préféré et il a certainement influencé la première partie de sa carrière, avant sa période "Sirkienne".
Le film est décomposé en douze tableaux, comme autant d'étapes du calvaire d'une jeune femme isolée tombant banalement dans la prostitution, un milieu professionnel au premier abord "comme les autres", avec ses collègues plutôt sympathiques, ses clients... Mais qui finit par révéler ses ignominies particulières assez rapidement. Godard trouve un ton très particulier qui donne tout son équilibre à "Vivre sa vie", entre un propos documentaire sec et sobre d'une part, et des expérimentations extrêmement créatives, très en avance sur son époque - et encore en avance sur le cinéma actuel - exécutés avec une parfaite virtuosité d'autre part.
Un équilibre entre neutralité du ton et artificialité de la forme qui donne des scènes assez superbes, typiquement Godard, quelques plans séquences époustouflants de trouvailles (le premier tableau, le disquaire, le club de billard). Certaines choses sont un peu plaquées (la fusillade "politique" - associée à l'Algérie), le film est peut-être un peu sec, parfois inutilement prétentieux, mais on y retrouve quand même de larges bouffées du meilleur Godard... Un de ses meilleurs films assurément...
Vus sur le dvd opening qui propose une jolie copie 1.33 (4/3) format d'origine, avec quelques légers moirages et autres très légers halos numériques, mais au final, on a quand même une copie très, très propre et un noir et blanc d'une grande finesse. La VF mono est un peu crade, certains passages sont (délibérément ?) difficilement audibles. Mais rien de choquant pour un film tourné en 1962 en son direct et en décors naturels.
Pourtant, je ne suis pas allergique au bonhomme, ni à son cinéma, du moins en début de carrière. Mais là, on brasse quand même du vide pendant 80mn à mes yeux ! Centré autour d'Anna Karina (assez moyenne, parfois attachante, mais souvent quelconque), le film tente (péniblement) de brosser le portrait d'une jeune fille au début des années 60. Une jeune fille qui se cherche, hésite un peu sur tout, son avenir, une carrière, ses amants, entre problème de fric et liberté revendiquée, elle va pencher, puis basculer, dans la prostitution... 