Etonnante construction que ce film. Le problème c’est que pour en parler, on est obligé de déflorer ce qui sera forcément une surprise pour qui n’a rien lu sur le sujet. Alors si vous voulez la garder cette surprise, peut-être voudrez-vous passer votre chemin. Je précise qu’il s’agit d’en présenter le déroulement et non dévoiler une révélation quelconque du scénario.
On démarre donc sur une banale enquête policière menée par un duo de fonctionnaires bien japonais, suite à la découverte du corps d’un vieil homme non identifié. Le seul indice, une bribe de conversation entre celui-ci et un homme jeune, attrapée au vol dans un bar, et un nom propre qui en ressort.
A partir de ce simple mot, peut-être le nom d’un lieu géographique, c’est parti pour un long, très long marabout-bout de ficelle d’un bout à l’autre du Japon, de ville en village, avec pour lien de continuels allers-retours en train. Hormis la possibilité de prendre un cours sur ce Japon, ses provinces et leur dialecte, ce sont 1h30 de non-spectacle, d’interrogatoires, et de détails qu’il faut bien suivre si on tient à connaître le fond de l’histoire, menés par des émules de nos inspecteurs télévisuels, dans un style tout autant télévisuel qui ne met quasiment pas en valeur le cinémascope en vigueur dans les productions B de cette époque. On n’a le droit qu’à une fade mise en image d’un matériau parlé.
Puis soudain basculement. Et c’est dans ces moments-là que ma profession de foi de ne jamais abandonner un film en cours de route quel qu’il soit prend tout son sens. A la faveur d’une révélation, au bout de ce qui serait la durée classique d’un métrage, un flash-back de 45 min. (oui vous avez bien lu, 45 min. !), mais surtout une ode au cinéma et une croyance entière dans le pouvoir de celui-ci. En l’occurrence, un quasi-retour au muet, seulement accompagné d’un morceau fleuve de musique illustrative. Tout ceci avec une photo et des cadres cette fois-ci complètement magnifiés par le scope. Et un montage envoûtant. Alors voilà, cela reste du mélodrame, mais pour qui goûte la chose … Une poignante chronique de l’Histoire du Pays du Soleil levant.
En tout cas, un sacré pari. Et de se dire qu’après des milliers de bandes visionnées, on peut encore assister à une torsion des clichés.
Le vase de sable - Y. Nomura (1974)
Modérateurs : Karen, savoy1, DeVilDead Team