Derrière ses comédies, il sut derrière une certaine légèreté traiter de sujets alors tabous tels que le plus souvent l'inceste et la prostitution adolescente.

Quella strana... est certainement son film le plus abouti et le plus grave, une des oeuvres non seulement les plus fortes et marquantes qu'il ait réalisé mais aussi dans ce style de cinéma érotico-morbide dont l'Italie se fit la spécialiste dés la fin des 60s.
Marco et Angela sont frère et soeur. Après le décés de leurs parents, les 2 ados vivent dans l'immense bâtisse familiale qui se dresse au milieu de la verdoyante campagne. Ils ont développé une très forte relation incestueuse. Marco aime admirer sa soeur dormir nue, Angela en est passionnement amoureuse, leurs jeux aussi ludiques soient ils ayant dépassé depuis longtemps le stade de l'innocence du moins pour la jeune fille.
L'arrivée d'une professeur de piano, séduisante femme mûre, va étourdir les sens de Marco qui en tombe follement amoureux.
Après qu'elle les ait surpris faire l'amour, Angela va se replier sur elle même, les observant derrière un miroir sans tain, maladivement jalouse. Cette relation triolique morbide ne pourra conduire qu'à un drame inéluctable, cruel, violent, sanglant, dans un climat de plus en plus lourd et maladif, point de non retour d'une folie latente...
Quella strana.. c'est l'histoire d'un amour passionnel, obsessionel et contre-nature baignant sans cesse dans un climat de folie latente que dissimule la beauté du cadre naturel et champêtre.
Vivant isolés dans cette grande demeure délabrée, les 2 ados se sont au fil du temps coupés du monde dont les seuls reliquats sont ce prêtre qui vient leur rendre visite et Rocco l'homme à tout faire, monstrueusement balafré à la suite d'un accident de voiture qui lui a fait perdre l'usage de la parole.
Un des passes-temps de Marco est de truffer la maison et le jardin de micros et de hauts-parleurs, véritables espions et objets de communication dont il se sert avec sa soeur mais également pour terrifier et rendre fou Rocco en diffusant des bruits d'accidents suramplifiés qui lui déchirent l'esprit.
Premiers signe d'une douce folie à l'instar d'Angela qui se complait à regarder et son frère et l'intimité de cette intruse derrière un miroir sans tain, intruse qui sera le point déclencheur d'une autre folie cette fois destructrice, cruelle et meurtrière.
Voyant son frère lui échapper lentement, elle va vivre en recluse, l'espionnant derrière un miroir sans tain, guettant ses faits et gestes, nourrissant chaque jour un peu plus une haine pour cette femme qu'elle doit pourtant accepter par amour pour Marco.
Angela se détruit lentement, rongée par la colère et le désespoir. C'est étrangement auprès de Rocco qu'elle va trouver un peu de réconfort, donnant naissance à une curieuse relation oscillant entre protection et amour surnois aussi trouble que troublante entre l'adolescente et cet escogriffe. Jusqu'à cette nuit où Angela surprendra son frère entrain de faire passionément l'amour à cette femme mûre, celle ci ayant succombé aux charmes si innocents de l'adolescent.
Ce sera l'occasion pour cette folie latente habitant chacun des protagonistes de pouvoir enfin exploser lors d'un final aussi inattendu que cruel, d'une violence stupéfiante, véritable moment de pure terreur mâtiné de gore rapellant les meilleurs films d'horreur d'alors.. ou quand l'amour se marie à la mort même bien involontairement.. ou l'ironie des choses.
Quella strana.. c'est la parfaite illustration d'un amour impossible et contre-nature entre 2 êtres au sortir de l'adolescence depuis longtemps coupés d'une certaine réalité, l'illustration d'une folie dont on n'est peut être pas conscient mais qui vous ronge lentement se dissimulant derrière la beauté des apparences.
Les personnages de Imperoli ont cette beauté qui se fond dans celle de la nature environnante mais ils sont pourtant à l'image de cette gigantesque demeure, délabrée et fissurée de toutes parts, sorte de superbe ruine ancestrale paraissant indestructible mais abritant l'alienation d'êtres somme toute pervers. On songe parfois à l'hotel morbide et l'atmosphère pesante de Pensione paura et ce personnage d'adolescente livrée à sa propre démence incarnée par la Fani.
Imperoli avec un sens tout particulier de l'esthétisme donne à son film des réminescences quasi gothiques à travers ces longs corridors, ces escaliers interminables et ses salles aux murs effrités ornés de lourdes tentures et de tableaux, zébrés d'éclairs lors des nuits d'orage contrastant avec la luminescence de la campagne par ces journées d'été.
On songe par moment à ce cinéma d'antan où dans un climat érotique insidieusement osé des gourgandines en détresse étaient la proie de la démence de chatelains ayant perdu la raison.
Au même titre que les décors, Imperoli magnifie voire sublime la beauté angélique de ses personnages en des plans simples mais magistralement superbes, capture un regard, un visage comme on peint un tableau.
L'érotisme tout en nuance et volupté est tout aussi sublimé, jamais scabreux ou sale malgré le sujet traité, baigné par la magnifique partition musicale de Manuel De Sica.
L'interprétation tout en justesse des 3 principaux interprètes achève de donner au film cette touche de perfection.
On saluera donc ici la prestation du jeune et divin Christian Borromeo




A ses cotés, Bebe Loncar offre ses courbes nubiles au personnage d'Angela, son regard vert presque translucide et ses formes généreuses de presque femme qu'Imperoli caresse de sa caméra.
La très mature Marina Giordana est l'intruse tandis que George Eastman est cet homme à tout faire balafré et muet, un rôle sidérant pour Eastman plus effrayant que jamais, tenant là un de ses plus beaux rôles, court certes mais déterminant pourtant dans cette histoire de folie incestueuse qui se cloturera par un no happy end presque onirique.
Voilà un point de non retour d'une folie irreversible ou quand sous fond de balançoire le fantôme du passé se superpose à un sourire si délicatement inoffensif...
S'il fallait retenir un film de la belle carrière d'Imperoli, ce serait celui ci, véritable petite perle du cinéma érotico-morbide italien.
Le corbeau qui regrette de ne pas avoir de frère!