Titre US : The Longest Day
Dans la nuit du 5 au 6 juin 1944, les alliés anglais, américains et français lancent les opérations du débarquement sur les côtes normandes de la France occupée par les nazis. Ce sera... Le Jour Le Plus Long !
"Le jour le plus long" est un projet extrêmement ambitieux, voire mégalo, de la part du producteur Darry F. Zanuck, qui réalisera lui-même une grande part du film et au service duquel seront les trois autres réalisateurs. Le film est tourné entièrement en France et réunit une distribution internationale impressionnante de John Wayne à Bourvil, De Wolfgang Preis à Robert Mitchum, de Mel Ferrer à Gert Frobe, d'Arletty à Curd Jurgens, et on en passe et des meilleures ! Un tournage monumental présentant l'invasion de quatre côtés : côté français (la résistance et les FFL qui participent au débarquement), côté américain (les parachutistes et Omaha Beach), côté anglais (les commandos largués en planeur dans la nuit et les débarquements) et côté allemand.
Le film prend de prime abord quelques parti-pris intelligents : tous les personnages parlent dans leur langue, y compris les français et les allemands ; les acteurs jouent des personnages de leur nationalité. Autre partie pris : le film est entièrement en noir et blanc (CinémaScope).
"Le jour le plus long" se veut un film mémorable, historique, commémorant une des batailles les plus importantes de la seconde guerre mondiale. Il n'en reste pas moins qu'il a vieilli par certains aspects
Le plus étonnant aujourd'hui reste la représentation des français, extrêmement favorable. Le fait que le film ait été tourné en France n'y est sans doute pas étranger. Tout le monde est FFI ou FFL, on écoute des messages codés sur son poste de radio, on a des drapeaux français prêts à être déployés tout prêts. La place donnée au FFL dans le débarquement est très importante, presque autant que celle des US et des anglais, alors que les canadiens, la véritable troisième force de débarquement, ne sont pas mentionnés une seule fois durant tout le film ! Ce qui est leur faire une injustice à mon avis. Les séquences sur la résistance sont assez maladroites, semblent charrier des clichés aujourd'hui souvent parodiés... On est clairement pas dans "L'armée des ombres" !
Les FFL ont quant à elles le droit à une des bonnes scènes d'action du film, la prise d'un casino transformé en forteresse par les allemands, une séquence s'ouvrant par un très impressionnant plan aérien, et ponctué d'action et d'explosion ; c'est notamment la seule scène du film, si je me souviens bien, où l'on voit un tank en action dans une bataille (un M4 américain - ou anglais ?). Toutefois cette scène est en partie imaginaire...
Les séquences américaines concernent d'une part les parachutistes des différentes unités "Airborne" larguées avant le bombardement derrière les plages, pour isoler les forces allemandes. Des séquences multipliant les anecdotes pittoresques (red Button suspendu au clocher) et soulignant le grand bazar que fut le débarquement, le caractère aléatoire et chaotique de la guerre. John Wayne, à 55 ans, n'est pas très à sa place dans le rôle de l'officier supérieur des paras...
D'autre part, nous avons les scènes de débarquement US à Omaha Beach, assez moyennement réussies, en particulier l'arrivée de la première vague. Evidemment, c'est difficile de passer aujourd'hui après l'ouverture du "Soldat Ryan", mais l'arrivée des américains donne lieu à des scènes vraiment maladroites. Mitchum trottine nonchalamment sur la plage, qui semble défendue par une poignée d'allemands... Les séquences suivantes s'améliorent un peu, mais, encore une fois, on est surpris que le théâtre d'action le plus intensif du débarquement donne lieu aux scènes d'action les moins convaincantes.
Heureusement, l'assaut de la pointe du Hoc, séquence a priori moins ambitieuse que celles de Omaha Beach, s'avère quant à elle réussie, assez forte, même si non dénuée de petites maladresses...
Les scènes anglaises s'en sortent le mieux. L'arrivée des commandos anglais en planeurs et la prise du pont "Pegasus" donnent lieu à des scènes d'action plus nerveuses et carrées, moins larmoyantes que côté américains, la conscience de l'absurdité de la guerre étant ici rendu par une certaine dérision, mais ça ne mollit jamais. Le débarquement anglais est très habilement filmé, jouant intelligemment des cadrages et de la profondeur pour restituer le caractère massif de l'avènement. Le plan aérien de l'avion allemand mitraillant les anglais sur la plage est sans doute le plus impressionnant de tout le film !
Les scènes allemandes se limitent essentiellement à des séquences d'état major, avec des officiers voyant venir ou non le débarquement, des séquences bavardes et statiques, soulignant la passivité maladroite des états majors allemands, les difficultés de communication en tous genres. Les allemands ne sont jamais montrés comme des bêtes ou des "méchants", à part peut-être dans la scène très isolée entre la résistante et le soldat...
A l'arrivée, "Le jour le plus long" est un projet a priori plein de bonnes ambitions, mais qui manque d'unité, semblant plus un film à sketchs dont les épisodes se téléscopent et se suivent avec plus ou moins de réussite qu'un tout homogène et porté par une vraie vision synthétique et convaincante. Un film dont émerge des scènes réussies (la pointe du Hoc, le casino, Pegasus Bridge en particulier), mais qui souffre aussi de lourdeurs et de maladresses...
Vu sur le bluray Fox français, un bluray qui avait soulevé pas mal de polémique, tout comme "Patton", pour l'usage abondant de réducteur de bruit image donnant un rendu peu naturel. Et il est vrai que sur de nombreux gros plans/plans moyens, le résultat est souvent lissé, peu naturel, avec des arrières plans comme figés, une profondeur de l'image écrasée, des détails mobiles devenant peu visibles (la pluie lors des scènes sur les bateaux) et des rendus de peau cireux. Sur un écran 46 pouces, je n'ai pas trouvé ça totalement catastrophique, dans le sens que l'image reste tout de même très, très détaillée, certainement HD. A noter que sur pas mal de scènes, il n'y a pas ou très peu de DNR. C'est certainement bizarre... mais pas irregardable non plus. La copie est propre, les contrastes et le noir et blanc sont robustes... Fox aurait certainement pu et du faire mieux... Mais en soit, ce n'est pas non plus une catastrophe à jeter aux aux orties... La bande son DTS master (le film est sorti en son temps avec une bande son 4 pistes magnétiques) est un peu dure, avec des effets de spatialisation parfois excessivement marqués. Mais bon, pour un film de 1962, ça déménage quand même très correctement !