
Alors que le Parti Républicain est en pleine déroute, une directrice de presse puissante et ambitieuse choisit son amant, Grant Mathews, pour devenir candidat à la présidence des USA pour ce camps. Mais Mathews, industriel fortuné, est un homme de principes. Il accepte, mais compte dire leurs quatre vérités aux américains et proposer des solutions réalistes, bien éloignées des discours politiques classiques. Mary, son épouse, le soutient dans cette voie de l'intégrité...
Juste après "La vie est belle", Capra tourne "L'enjeu", métrage peu connu dans sa filmographie, avec son propre studio, Liberty Films, sous la férule de Paramount tout de même. Cette histoire a a priori tout d'une version réactualisée de "Mr. Smith au Sénat", avec cette histoire de Candide balancé dans le jeu des politiciens.
Sauf qu'ici, le Candide n'est pas une oie toute blanche. Son mariage va mal, c'est un chef d'entreprise humain et respectueux de ses employés. Mais ce n'est pas non plus un l'innocent chef scout que jouait James Stewart !
Il va frayer avec la corruption, et se voir contaminer par elle, qui prend deux visages séduisants : Conover, un machiavélique et habile chef de campagne, prêt à toutes les tractations et les mensonges pour arriver à ses fins ; et Kay Thorndyke (Angela Lansbury), patronne de presse impitoyable, dont la recette pour réussir est d'écrabouiller et détruire tout ce qui se met en travers de sa route.
Le contexte n'est pas innocent non plus. Les enjeux de l'époque sont clairement déterminés : la guerre froide, la menace atomique, les fascismes vaincus mais encore latents sous les cendres, un monde à reconstruire, et le communisme qui attend, tapi, que le capitalisme s'effondre. Le film est très explicite là-dessus, et après avoir vu ce film, on comprend mieux pourquoi Capra n'a pas eu la côté chez la critique "de gauche", du genre Sadoul, dans la France de l'après guerre !
La distribution est éblouissante, formidablement dirigé, la mise en scène est virtuose - la longue scène du dîner avant le discours de Detroit et ses chassés croisés de personnage. On apprécie aussi comment Capra joue avec les limites de la censure de l'époque dans le premier tiers du métrage (pas de couple dans un même lit, mais ils ont quand même un lit commun ; le strip tease en ombres de Katherine Hepburn).
Le résultat, très ancré dans son époque, nous paraît plus daté et lointaine que le très universel "Mr. Smith au Sénat". Mais l'humanisme républicain de Capra, entre idéalisme et amertume, s'exprime ici avec un ton moins familial qu'à l'habitude, plus adulte et précis. "L'enjeu" n'a pas la fluidité ni la perfection des meilleurs réalisations du metteur en scène, mais ce film un peu oublié mérite certainement un visionnage attentif.

Vu sur le dvd français de Bach Films.
"L'enjeu" appartient initialement au catalogue Paramount, catalogue maintenant exploité par Universal qui a sorti le film aux USA en DVD en 2006. Pour la France, Bach film a payé les droits de plusieurs films Universal, dont celui-ci.
Le film est proposé en 1.33 (4/3), son format d'origine, en noir et blanc. On ne peut s'empêcher quelques petites touches d'amateurisme : le film de deux heures est stocké sur un dvd5 (simple couche), ce qui est insuffisant. La compression est donc forcée. Les arrières-plans ont tendance à pixeliser. L'encodage vidéo pose des soucis, avec des effets de cisaillement flagrant si on visionne le disque en progressif "film". Il faut donc le visionner en mode "vidéo", sans que cela retire totalement des sensations de ghosting pas très agréables. On repère aussi quelques contours suspects (halos de edge enhancement), des moirages, etc. Mais tout cela part tout de même d'un bon télécinéma, d'une matériel 35mm en excellent état. S'il y a des défauts, nous sommes quand même bien au-dessus d'un dvd bach film moyen et cela reste globalement regardable. Bande son anglaise mono 2.0 encodé en pcm, avec un sous-titrage français de bonne tenue. Pas de VF.