Dans le Japon médiéval, un gouverneur aux idées trop progressistes (il soutient les revendications de paysans pauvres contre des militaires) est exilé dans une région reculée. Au cours d'un voyage pour le rejoindre, son épouse et ses deux enfants sont capturés par des trafiquants d'esclaves...
"L'intendant Sansho" est un grand classique du cinéma japonais tourné par Mizoguchi au pinacle de sa carrière, alors qu'ils réalisent des films pour le grand studio Daei qui sont de grands succès critiques en Europe. "L'intendant Sansho" gagne ainsi le Lion d'Argent à Venise à sa sortie.
Il s'agit d'un long drame dur, âpre, cruel comme il se définit lui-même, sur les méfaits d'un système féodal et oppressif inhumain. Des notables et hauts fonctionnaires s'enrichissent grassement sur le dos d'esclaves plus pauvres, marqués au fer rouge quand ils tentent de s'évader. Les images sont dans un noir et blanc parfois magnifique (ces vues des côtes à la profondeur de champs illimitée, de la forêt) proposant des visions ciselées d'un Japon aride et poétique. Le propos est social et, bien que sur un sujet a priori du passé (l'esclavage), il pose des questions universelles sur l'humanité, la dignité : comment en vient-on à traiter son prochain comme une bête, quand abdique-t-on son humanité en réduisant son prochain à une vie qui ne mérite même pas d'être vécue ?
Pas vraiment un métrage qui fait dans la gaudriole et dans la rigolade, mais certainement un très beau film qui réussit à faire dans l'humanisme sans tomber dans le sentimental pleurnichard. Un modèle de rigueur dans la forme et le fond en tous cas...
Vu sur la dernière édition française en date de ce classique, à savoir le dvd Films Sans Frontières publié en janvier 2008. Je ne m'attendais pas à grand chose de la part de cet éditeur inégal, mais la copie 1.33 4/3 noir et blanc d'origine s'est avérée une surprise des plus agréable. Image naturelle et ciselée, beau noir et blanc, précis. Certains contrastes sont un peu approximatifs, il y a des traces de rayures et de saletés, mais pour un film d'auteur japonais des années 50, c'est franchement de la bonne came. Bande son japonaise en mono 2.0, avec STF.