Dimenticare Venezia (Oublier venise) - Franco Brusati (1979)

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Superwonderscope
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Dimenticare Venezia (Oublier venise) - Franco Brusati (1979)

Message par Superwonderscope »

Dans une vieille maison de campagne, les retrouvailles familiales de Nicola (Erland Jepherson) et de sa soeur Marta (Hella Petri) se déroulent dans une ambiance éthérée. Nicola arrive avec son ami Sandro (david Pontremoli), et il retrouve sa nièce Anna (Mariangela Melato), adoptée par Marta. Anna se trouve être elle avec une autre nièce, Claudia (Eleonora Giorgi). Tous projettent une voyage à Venise afin de célébrer ce moment.

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film annonce : http://www.youtube.com/watch?v=FwnTNiw6yOg

Un film assurément post-Viscontien, avec des petites touches bergmaniennes (ça y est, je viens de perdre 75% des lecteurs qui s'attendaient à un bis rital :D ), qui fut nommé aux Oscars en 1979. Pour info, Brusati -assez peu connu chez nous - fut le scénariste de Romeo et Juliette de Zefirelli, du Désordre, Pain et Chocolat...
Une comédie dramatique aux accents de nostalgie profonde mais qui sait ne pas céder à la facilité mélodramatique. Il est par ailleurs assez étonnant de voir qu'un film italien (une co-prod française, par ailleurs) en 1979 parle d'un sujet aussi peu courant et avec deux couples gays et lesbiens en tete de distribution :shock: Ceci dit, la mise en scène reste très prude et sage quant aux démonstrations amoureuses, et ne passe que par de brèves scènes : par exemple Sandro (et son surnom Picchio) qui décide de séparer les deux lits à une place (rapprochés pour la nuit afin d'etre près de Nicola)) pour que la vieille servante Caterina ne soit pas choquée; Ce qui amuse Nicola, lui n'ayant pas ce souci de choquer ou pas. Ayant accepté sa nature il y a longtemps.

En fait, nul problème sociétal - mais une réflexion sur l'attachement au passé, et la nécessité d'en faire parfois table rase afin de pouvoir s'accepter en qualité d'individu. De pouvoir vivre sa vie. le début du film est assez symptomatique : deux effets-Julie où Erland Jepherson (acteur chez bergman, justement) se rattache toujours à ses images de jeune adolescent, référence à une vie sans encombre. idem pour Anna, sa rage envers ses parents qui l'ont abandonnée à ses peurs, entre un père absent coureur de jupons et une mère à moitié folle. Elle ne trouve son équilibre qu'auprès de Marta, cantatrice fantasque mais une amoureuse de la vie.

Cela passe par une célébration du corps - et une exploration de la sensualité de chacun. La caméra de Brusati n'est ainsi pas avare des charmes de Mariangela Melato, Eleonora Giorgi et David Pontremoli. pas dans le sens voyeur que le cinéma d'exploitation transalpin a pu le faire, mais dans une certaine innocence. Claudia indique à un moment que le temps soit suspendu, que chacun reste dans la maison - elle y trouve enfin son équilibre et son bonheur. Tout du moins refuse-t-elle encore de quitter son adolescence malgré son age.

Peur du futur, de sauter le pas, de quitter un cocon protecteur. L'arrivée de Nicola & Sandro va provoquer un bouleversement dans cette maison maisonnée féminine et chacune va devoir assumer sa vie, sa mort, sa folie. Un rite de passage obligé, visiblement, pour que l'ordre apparaisse.

Un film de cinéma, qui passe par beaucoup de paraboles et du langage par l'image. Un fantastique léger, entre le passé qui s'insère directement dans le présent de par l'intervention de personnages qui ont peuplé les vies des protagonistes. jusqu'à ce qu'un enfant ressemble comme deux gouttes d'eau à un souvenir de Nicola. Une manière de filmer élégante, avec une caméra fluide, qui insiste sur le raffinement du relationnel et des décors. Une élégance qui rapproche quelque peu des univers de Thomas Mann ou de Marcel proust, par exemple.

Et un final apaisé - sorte de conclusion logique à un ordre trouvé. Ca n'est pas pour tous les gouts, c'est sûr. mais ces 102 minutes m'ont captivé, s'agissant d'un type de cinéma quo'n ne voit plus aujourd'hui. pensé, écrit, pour l'image, avec un découpage clair. Et cadré pour la réflexion, sans hurlements ni précipitation. Un beau voyage dans l'apprentissage (douloureux) du bonheur.

l'affiche française, qui axe le tout sur la nudité dans le film:

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manuma
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Re: Dimenticare Venezia (Oublier venise) - Franco Brusati (1979)

Message par manuma »

Celui-là, j'aimerais beaucoup le voir. Ca serait bien que M6 Vidéo le sorte dans sa collection italienne ...
manuma
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Re: Dimenticare Venezia (Oublier venise) - Franco Brusati (1979)

Message par manuma »

Très beau film en effet, même si d’un accès pas forcement toujours très aisé tant il approche avec retenue sa thématique universelle, touchant à la quête de soi, du bonheur et à l’acceptation du temps qui passe. C’est le plus souvent d’une extrême délicatesse, toujours signifiant dans ses nombreuses scènes déshabillées, avec quelques précieux moments d’émotion. J’avoue avoir un faible pour tout le passage nocturne dans la guinguette, marquant les brèves retrouvailles de Nicolas et son ami d’enfance.

Pour ce qui des références, je ne connais pas assez Bergman et Visconti pour faire le rapprochement. Moi, dans l’ambiance, ça m’a fait penser au peu que je connais de Tchekhov (la réunion de famille, le cadre champêtre). D’ailleurs, si je devais faire un petit reproche au film, il tiendrait sans doute à son caractère un peu trop théâtral, au petit manque de fluidité du récit, qui ressemble parfois trop à une succession de tableaux.

Bien belle découverte en tout cas. Au passage, en furetant sur IMDB, j’ai appris que la française Anne Caudry, qui interprète la jeune mariée dans le film et que j’avais bien aimé adolescent dans le Confidences pour confidences de Pascal Thomas et L’avare de Girault et De Funes puis totalement perdue de vue, est décédée du SIDA en 1991. Triste …

Et un franc merci à Superwondie ...
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