Room 237 - Rodney Ascher (2012)

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Superwonderscope
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Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par Superwonderscope »

Un passionnant documentaire sur Shining de Stanley Kubrick, sa genèse et ce qui se cache derrière chaque plan, ou le travail génial du père Kubrick. Ou pas.

Des elements de reponse dans la chronique sur le site:

http://www.devildead.com/indexnews.php3?NewsID=7489
Oh really? Well then I'm sure you wouldn't mind giving us a detailed account of exactly how you concocted this miracle glue, would you ?
Plisken
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Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par Plisken »

Un documentaire provocateur. Alors oui ça fait réfléchir, oui c'est ridicule, oui c'est tiré par les cheveux, moi aussi je peux émettre des théories fumeuses. Reste que ces points de vues sont intéressants qu'on y adhère ou non. 9 théories parmi d'autres et en aucun cas des vérités.
Image
choy
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Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par choy »

Ce qui est dommage c'est qu'aucune des théories développées n'est basée sur une preuve.
Bon, demander une preuve c'est un peu difficile mais celles-ci sont au mieux troublantes, jamais stupéfiante. On sent que chacun y met un peu de soit.

Au final c'est peut-être celle qui parait la plus farfelue qui est la mieux soutenue, celle en rapport avec apollo mais encore une fois, ça reste seulement séduisant.

Dommage qu'on ne voit pas les intervenants (ça donne un petit coté loose change à l'ensemble, film bricolé à la maison), dommage qu'il n'y ait pas plus de sources (on parle bien à un moment d'une discussion que Kubrick aurait eu… aurait, sans que l'on sache où, quand,…).
On en ressort avec le même sentiment qu'une recherche wikipedia baignant dans des pages au "contenu sujet à polémique". Ça fait rêver, on laisse passer tout ce qui est gênant pour apprécier l'instant puis à la fin on revient au monde réel, celui où le monstre du lock ness n'existe pas, le triangle des Bermudes n'est même pas intéressant mathématiquement, et où ces théories ont des bases plus que légères.

Bref, ça ne fait rêver que si on le veut bien sur l'instant. M'en vais chercher le docu relatif aux "boites" de kubrick, ça m'a l'air bien plus dans ce que je cherche.
woops
Winston Z.

Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par Winston Z. »

J'en suis encore un peu au début du doc, mais là non je fais une pose pour poster ça, parce que OK je veux bien que les fantômes manifestent des désirs sexuels envers les vivants, pour leur pomper leur force vitale (...), mais ça va un peu loin quand ils trouvent des trucs de ce style :

Image

Donc la pile de paplars sur le bureau forme littéralement un sboub dirigé vers Jack Nicholson, cool §£
ANTISOCIAL
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Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par ANTISOCIAL »

j'ai maté le doc, et y a du très fumeux, et du plus intéressant, mais... est-ce que c'est de l'extrapolation ou du hasard...

Par contre, à un moment quelqu'un parle de la théorie comme quoi Kubrick aurait filmé l'alunissage en 1969 d'Armstrong et Buzz l'éclair.
Je me souviens avoir entendu dans un reportage français quelqu'un dézinguer la théorie du complot, en se basant sur un reportage faux de A à Z, destiné justement à contrer les "complotistes", en imaginant que le voyage vers la lune n'a pas existé réellement en 69, et que c'est Kubrick qui a été payé pour le filmer (un faux, en somme, comme le protocole des sages de sion). Seulement, il serait de notoriété publique que cette théorie est fausse, pour railler les théoriciens du complot (et donc toute théorie dite du complot, si évidente soit-elle).

Alors je me demande si, après ce documentaire qui parle justement de ce soit-disant film, est-ce que beaucoup de gens s'y sont laissés prendre, et même devant la révélation du fake, veulent continuer d'y croire, en gros gogos, ou, est-ce que la théorie de Kubrick filmant l'alunissage est quelque chose de plus ancien, et qui faisait l'objet de rumeurs, et que le faux documentaire a essayé de reprendre, tout en faisant croire que c'est du fake ?
Je veux dire, il n'y a pas de fumée sans feu.

Pour revenir à room 237, ils abordent assez souvent Eyes Wide Shut, qui me parait beaucoup plus troublant que Shining, et à ce sujet, j'ai vu une vidéo qui donne quelques clés, très intéressante :
http://youtu.be/0WAjdhWOMGI[/youtube]
http://lacrypteduchatroux.hautetfort.com/
Blog littérature, films, bédés, disques...
Winston Z.

Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par Winston Z. »

ANTISOCIAL a écrit :Je me souviens avoir entendu dans un reportage français quelqu'un dézinguer la théorie du complot, en se basant sur un reportage faux de A à Z, destiné justement à contrer les "complotistes"
Un faux reportage tentant d'établir la vérité sur une fausse théorie qui sonne très vraie.
Merci, tout de suite c'est plus clair. :D
Dommage qu'on ne le trouve pas sur youtube celui-là, parce que pour les vidéos de complots il y a de la matière...
Au moins ça a le mérite d'être amusant, après vrai ou faux... qu'en savons-nous, pauvres mortels que nous sommes ?
Manolito
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Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par Manolito »

Déjà, la forme est abominable : quelques bluray de films de Kubrick, des extraits d'autres films et bandes annonces récupérées sur youtube, on assemble tout ça et, hop, on a un film. Qui aurait pourtant plus sa place sur youtube que sur un écran de salle...

Par ailleurs, les théories oscillent entre le connu et le franchement farfelu, énoncées par des zinzins à l'élocution soulante : celui qui ricane tout les trois mots (en expliquant par exemple qu'il est père d'un petit garçon et qu'il se sent de plus en plus comme Jack Torrance !), le spécialiste du grand complot caché...

On peut surtout voir le reflet de pathologies contemporaines, celles de voir des signes partout où on peut pour donner un sens à ce qui nous entoure. Trop de temps pour réfléchir, pas assez de choses à faire. En fin de compte, "Room 237" a été pour moi une vaste perte de temps.
bluesoul
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Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par bluesoul »

Bof, dans une trentaine d'annee les memes vont nous sortir une analyse vertigineuse de Transformers ou d'un autre Michael Bay, alors. :mrgreen:
En direct du Japon. Bonsoir. A vous, Cognac-Jay.
Cosmodog
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Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par Cosmodog »

J'ai tout d'abord copieusement détesté ce docu, parce que les théories sont tellement harsardeuses et jouent la sur-interprétation à outrance que ça m'a gavé direct. Et, au passage, quand cessera t'on de penser qu'il suffit de pouvoir citer Freud dans une analyse pour que ça veuille dire quelque chose ! (dernière exemple en date, Télérama à propos de "Pacific Rim" qui résume: "l'alliance de Godzilla et de Freud" )8 )8 )8 ).

Et puis, au final, contrairement à ce que je pensais, ce ne sont pas les théories et analyses de "Shining" qui sont intéressantes, mais plutôt le fait que des types soient assez passionnés et cinéphiles compulsifs du film de Kubrick pour pondre des trucs pareils. Et du coup, c'est plus un clin d'oeil amusé et complice de ces obsédés de films (de celui de Kubrick en particulier pour ""Room 237") que nous sommes ici tous un peu, qui est le centre de ce documentaire. Sympa du coup repensé sous cet angle.

Le gros avantage de l'édition DVD (par rapport à la sortie salle), c'est qu'elle est accompagnée d'un livret écrit par JB Thoret qui met bien en avant cette caractéristique du film et permet une autre lecture de "Room 237", peut être évidente, mais que j'avais complètement loupé en prenant le truc au premier degré.
Winston Z.

Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par Winston Z. »

Relativisons, il n'y a pas QUE des théories abracadabrantesques dans ce doc, par contre oui la diffusion en salles bof, cela dit voir un documentaire en salles c'est rarement excitant, faut vraiment le chercher un peu...
Je ne me souviens plus de grand chose mais un truc m'avait amusé, la disposition du bureau du directeur qui reçoit Jack Torrance au début. En repassant la scène on s'apercevait que le fond du bureau est mitoyen avec la cage d'ascenseur à l'autre bout du couloir, du fait impossible qu'il y ait une fenêtre donnant sur l'extérieur dans ce bureau. C'est un petit détail mais facilement vérifiable.

Au passage pour ceux qui ne connaîtraient pas la série Hannibal, quelques (grosses) références à Shining dans certains épisodes, et dans l'ambiance en général :
http://www.critictoo.com/les-chroniques ... e-shining/
Cosmodog
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Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par Cosmodog »

Winston Z. a écrit :Relativisons, il n'y a pas QUE des théories abracadabrantesques
Pour moi, si, presque...
Le fait que la géométrie des lieux soit impossible, dans la mesure où l'Overlook est pensé comme un labyrinthe (physique et mental) faisant écho au labyrinthe végétal extérieur, rend donc tout le travail de reconstitution des lieux inutile.

En fait, Thoret insiste sur le fait que Kubbrick possède une telle image de génie ultra-perfectionniste contrôlant TOUT que cela rend dans l'esprit de beaucoup inenvisageable la simple erreur de scripte, qu'il y a du sens derrièrre chaque détail de l'image (et même un des 40 stickers d'une porte à l'arrière plan gauche !).

Ca me rappelle le fameux plan d'Eraserhead où Jack Nance de retour chez lui enlève sa chaussure gauche après avoir marché dans une merde... du pied droit la scène précédente. Et analyses et significations... jusqu'au commentaire audio de Lynch qui dit: "ah ouais, on a tourné ça à 4 ans d'intervalle, on s'est gourré de pied !".
Winston Z.

Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par Winston Z. »

Cosmodog a écrit :En fait, Thoret insiste sur le fait que Kubbrick possède une telle image de génie ultra-perfectionniste contrôlant TOUT que cela rend dans l'esprit de beaucoup inenvisageable la simple erreur de scripte, qu'il y a du sens derrièrre chaque détail de l'image (et même un des 40 stickers d'une porte à l'arrière plan gauche !).
Je suis en partie d'accord mais il ne faut pas oublier que tout ce qu'on voit à l'écran comme les décors, les costumes, les couleurs ne sont pas choisis au hasard, que la majeure partie ont été pensés pour coller avec les personnages, l'ambiance etc.
Donc oui ça laisse le champ libre à l'interprétation et les théories les plus obscures, mais parfois ça sonne plus que juste. Je pense notamment à l'effigie du chef indien sur les boîtes de conserve de la remise. C'est pas là gratuitement, ça fait partie des petites touches qui ça et là dans l'hôtel rappelle la présence indienne dans la région à l'époque de la construction de l'Overlook (et le cimetière indien sur lequel il a été bâti au passage). Un petit élément de décor innocent certes, mais voulu.

Petit exemple avec une capture d'écran d'une scène du film The Trouble With Bliss (avec Michael C. Hall/Dexter).
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Le personnage porte une grosse meule de fromage sous le bras, rien de bien passionnant, sauf que si on lit l'étiquette on comprend que c'est une private joke. L'étiquette dit "Larson's Brie" (le Brie de Larson), et l'actrice qui lui fait face dans cette scène s'appelle justement Brie Larson, son vrai nom je veux dire, pas celui du personnage qu'elle joue. :D

Ci-dessous une capture sur Psychose 2.
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Je ne sais pas si la nana est une star du x (faudrait que je vérifie :@ ) mais l'inscription est intéressante : "To Warren with all my love". Warren Toomey est le gars qui a repris le motel Bates durant l'internement de Norman. Un plan qui dure quoi 2 secondes ? Pourtant c'est un détail fait pour illustrer le côté dégueu du lascar, même s'il y a peu de chances que quiconque l'ait remarqué (il m'a fallu 23 ans et surtout un écran 27"). Merde je viens de réaliser que j'ai une photo compromettante quelque part où Olivia del Rio me fait un bisou sur la joue, oups... bah pas grave, je fume pas moâ.

Et pour finir, The Thing.
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En fait je ne suis pas du tout sûr que le truc était voulu, mais j'ai trouvé ça assez amusant. Le nom du flipper, "Heat Wave" (Vague de Chaleur) et MacReady qui joue du lance-flammes juste à côté, tss... :mrgreen:
Lord Taki
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Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par Lord Taki »

A voir au 2ième degré.

Le visage de Kubrick dans les nuages... j'ai pas vu.
Bon, effectivement partir du principe que chaque erreur de raccords n'est pas une erreur mais le génie de Kubrick ça aide un eu à démarrer le propos.

Les intervenants sont très imaginitifs et on reste en haleine jusqu'au bout afin de découvrir si la théorie suivante est plus fumeuse que la précédente.

Je n'avais pas autant ri depuis Idiocracy.
orco
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Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par orco »

Vu hier. Effectivement, difficile d'adhérer à la plupart des théories énoncées ici. Cela reste tout de même fascinant à suivre et surtout cela permet de découvrir plein de détails que je n'avais jamais vus malgré de nombreux visionnages et qui, je pense, ne sont pas dûs au hasard (la chaise qui disparaît, la machine à écrire qui change de couleur, les nombreuses fautes de raccord, la fenêtre qui ne devrait pas se trouver là...). De là à y voir des messages cachés sur l'holocauste, Apollo 11 ou autres, je n'irais pas jusque là. Je pense que c'était simplement la volonté de créer une sensation de malaise chez le spectateur en jouant sur de petits détails subliminaux. Et pour ce qui est des allusions aux Indiens, là c'était juste déjà évident à la base.

Et pour le visage de Kubrick dans les nuages : pareil, il faut vraiment se forcer pour arriver à voir vaguement un début de visage. D'ailleurs ça doit être facilement vérifiable en comparant avec les plans utilisés dans Blade Runner (si ce plan en fait partie).

Au passage, il y a un excellent article sur Shining dans le nouveau Rockyrama spécial Kubrick.
seriZ
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Re: Room 237 - Rodney Ascher (2012)

Message par seriZ »

Lord Taki a écrit : Le visage de Kubrick dans les nuages... j'ai pas vu.
Vous êtes pas très attentifs quand même...

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Sinon je reposte ici ma petite chronique que j'avais fait à l'époque de la sortie de ce film...
Depuis mercredi est sorti le très attendu Room 237 de Rodney Ascher, et ce qui est sûr c’est qu’il risque de déconcerter les gens qui s’attendent à un documentaire sur le Shining de Kubrick. Déroulé sur un peu plus d’une heure et demie, le film met en scène les discours d’une demi-douzaine d’obsédés du film, qu’on ne verra jamais et qui n’existeront uniquement qu’à travers leurs théories. D’emblée ils semblent faire autorité par le peu qu’on sait d’eux (un professeur d’université, un journaliste confirmé, des auteurs divers) et ils captent l’attention du spectateur jusqu’à ce que l’accumulation et le croisement de leurs discours versent dans l’absurde, s’annulant eux-mêmes ou brouillant notre attention par une observation obsessionnelle du film.
Alors, qu’en est-il vraiment ? Room 237 ne fait-il que l’étalage des excentricités grotesques d’une poignée de gogos, une sorte de Strip Tease cinématographique où l’on convierait l’audience à rire de ces gens ? Ou est-il au premier degré à prendre sérieusement son sujet en voulant sincèrement proposer un éventail d’analyses en apparence contradictoires mais qui pourraient se compléter les unes les autres ?

Ni l’un ni l’autre car le sujet du film d’Ascher se niche autre part. Peu importe qu’on voie dans Shining un film sur le génocide des Juifs par l’Allemagne Nazie ou un film sur le génocide des Indiens par les colons blancs. Ces deux points de vue semblant aussi sensés l’un que l’autre. Ce qui est intéressant dans la multiplication des observations méticuleuses qui nous sont ici rapportées, c’est d’être le témoin du travail du film de Kubrick sur l’intellect de ses spectateurs.

L’un des passages les plus intéressants démontre que l’hôtel Overlook où se déroule Shining est construit sur une suite d’impossibilités architecturales, comme si la fameuse moquette orange aux schémas géométriques rigoureux se mutait en un dessin d’Escher. Cette contradiction spatiale, combinée à un décor particulièrement expressif (couloirs rouges, chambres vertes) semble vouloir provoquer le spectateur, le plonger inconsciemment dans un état de confusion inexplicable. Ce qui pourrait être vu comme une succession d’astuces pour mettre le spectateur dans une situation inconfortable et lui faire perdre ses repères est exacerbé par la nature même du film et la réputation de l’auteur. La légende qui entoure le réalisateur culte a été écrite, racontée, recopiée inlassablement dans pratiquement tous les articles qui lui ont été consacrés créant la mythologie d’un Kubrick maniaque et perfectionniste, ne laissant aucun détail au hasard, à tel point que n’importe quelle erreur de continuité (un autocollant disparaît, une machine à écrire change de couleur, une voiture ou un figurant disparaît d’un plan à l’autre…) devient porteur d’un message d’autant plus important qu’il est discret, d’autant plus sacré qu’il semble dissimulé à l’œil du profane.

Cette volonté de forcément voir le visage de Kubrick dans les nuages du générique de Shining, un message caché derrière le pull Appolo de Dany ou une plaisanterie visuelle avec une ramette de papier faisant apparaître une érection au directeur Ullman offre un spectacle assez naïf et montre à quel point les gens projettent leurs propres obsessions jusqu’à créer un sens au-delà de ce que le film a à proposer. Dans cette croisade sémiologique se dégagent de véritables moments de poésie, comme si on assistait à une mise en images et en paroles du ressenti émotionnel provoqué par un film comme Shining. La séquence où l’on peut apercevoir la superposition du film se déroulant à l’endroit et à l’envers provoque un frisson par ses intrigantes constructions esthétiques dont on est subitement le témoin, ces analogies fortuites aussi graphiques que mentales semblent soudain renvoyer aux visions hallucinées de Wendy et on peut voir, dans le voyage sans fin à l’intérieur du film qu’effectue chaque exégète, une sorte de redite du voyage de Jack. Chacun apparaissant appartenir au film comme Jack appartient à l’Overlook.

Ce sont la poésie, l’incompréhension et la confusion résultant de la vision du film qui semblent ici décortiquées. Finalement il n’est pas nécessaire de croire que le visage de Nicholson représente vraiment le visage bovin d’un minotaure ou que Kubrick a vraiment filmé le faux atterrissage sur la Lune, ce qui est passionnant, c’est de voir la succession des logiques visuelles et du sens qu’elles prennent afin d’être le témoin et de mieux comprendre, in fine, ce qu’un film peut provoquer sur son audience.

On finit par être captivés par la succession de films Shining différents qui peuvent exister, le nôtre s’y ajoutant, impliquant un nombre infini de copies différentes, mais qui obéissent toujours aux mêmes schémas labyrinthiques, aux mêmes volontés de dissimulation et s’opposant toujours aux mêmes contradictions et aux mêmes mystères.

Pour finir, on ne peut passer sous silence l’ombre qui plane sur le documentaire. Il s’agit de celui qui sur internet signe ses textes « Mstrmnd », qui a refusé de participer au film et dont les personnes interviewées reprennent globalement ses théories les plus acceptables. Il y a longtemps, j’avais passé des heures à me perdre sur son site où l’on suit avec difficulté un enchainement sans fin où se télescopent pyramides aztèques, analyses des affiches du film, vision de formes qui apparaîtraient dans le plan du labyrinthe et un nombre improbable de signes cachés… Le talent de Room 237, par son montage et sa mise en scène, c’est d’éviter de mettre en images les délires pathologiques du site de Mstrmnd mais plutôt de montrer l’esprit qui s’anime, stimulé par une œuvre aussi classique qu’atypique et de contempler la poésie qui s’en détache, pour finalement se retourner sur nos propres analogies personnelles, inconscientes, qui fondent nos émotions face à un film.
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