Après tant d'années d'absence dans le cinéma et l'arlésienne "King shot" qui a nourri tant d'espoir mutés en frustration, revoici enfin le grand Jodorowsky sur la toile.
Racontant de manière poétique et fantasmée l'enfance au Chili de ce jeune juif russe sous le joug d'un père autoritaire et l'amour d'une mère attentive, c'est sa propre enfance qu'il aborde dans ce film. Tourné dans la pauvre ville minière chilienne dans les lieux authentiques de sa jeunesse, Jodorowsky vieiliisant, à l'aube du trépas, porte un regard tendre et sans concession sur l'enfance, la sienne, ses parents et son premier pays d'adoption, le Chili, alors une dictature sanguinaire. Il dresse anisi un pont entre l'enfant disparu qu'il était et l'homme âgé qu'il est devenu, les deux se regardant avec tendresse.
Film magnifique, d'une liberté totale, accumulant les idées en scènes fortes, sans esbrouffe technique. Toutes le thématiques inhérentes à l'oeuvre de Jodo sont présentes, la filiation, la mutilation, la religion, la quête initiatique, la rédemption, la philosophie zen... l'humour également, qui cotoie la violence terrible des êtres humains. La psychanalyse aussi bien sûr, plutôt sous forme introspective donc, et abordée par le film lui-même comme une forme de thérapie familliale (rapport à la "psychomagie", créée par Jodo lui-même, sorte de thérapie liée à la mise en scène des rapports familliaux).
En résulte un film atypique évidemment, aux choix déroutants (la mère par exemple, s'exprimant pendant tout le film en chantant comme une cantatrice - déconcertant au premier abord puis donnant au final une rythmique particulière, rajoutant de l'émotion à bien des situations). Beaucoup d'allégories, certaines scènes se référant presque à l'art du mime pour simuler des idées (la masturbation, l'agressivité) cotoyant d'autres très dures et crues sans artifices, l'émotion brute faisant suite à la farce appuyée. Les corps mis en scène dans leur simplicité, leurs difformités, leurs nudité, donnant lieu à de nombreux moments de grâce.
Difficile à résumer, nous sommes moins dans la quête métaphysique (ce qu'étaient avant tout "El topo" et "La montagne sacrée") que l'évocation de souvenirs vécus et interprétés, mais le fim brasse une multitudes d'idées chères au meilleur de son cinéma (en ajoutant "Santa Sangre" et "Fando et Lis" donc - on revient à la liberté de ton de ces films, et pas les oeuvres de commandes comme "Tusk" et "le voleur d'arcs-en-ciel") et à ces oeuvres littéraires (BD notamment) avec cette constante chez lui de développer sans cesse les mêmes thèmes dans des genres très différents (SF, western, récits historiques...) tout en donnant de l'originalité à chaque fois (quasi...).
Si vous êtes hermétique à son univers, laissez tomber, mais s'il vous fascine, ce film est un cadeau.
Encore plus ici que dans ses autres films, Jodorowsky fait jouer plusieurs de ces ennfants, en premier lieu son fils Brontis Jodorowsky qui se révèle être un acteur hors normes (c'était déjà lui le serial Killer de "Santa Sangre). Un jeu d'une force incroyable qui élève un peu plus ce merveilleux film.
"la vie n'est qu'illusion, alors dépêche-toi".
Péotique et libre.
La danza de la realidad - Alejandro Jodorowsky (2013)
Modérateurs : Karen, savoy1, DeVilDead Team
Re: La danza de la realidad - Alejandro Jodorowsky (2013)
pas super excitant mentalement, c'est assez sobre visuellement disons pour du Jodo. de belles couleurs claires ou dénaturées qui apportent du calme. des moments agaçants dans l'excellente performance de son fils. mais globalement, bonjour la folie d'enfance que semble avoir dû vivre Jodo
.
